COMMANDITÉ
Les Tremblay d’Amérique

Le Petit Canada de Réjean

De 1840 à 1930, près d’un million de Canadiens français ont quitté leur coin de pays pour aller travailler en Nouvelle-Angleterre ou dans le Midwest américain. Ils partaient seuls ou en famille, souvent avec l’idée de revenir un jour et de conserver leur langue et leur culture. Un peu comme Réjean Lévesque, 18 ans, qui quitte la terre familiale en 1890, faute d’occasions d’affaires dans sa région natale de Bellechasse. Une histoire qui se répétera des milliers de fois, avec différentes variations sur le même thème : la volonté de bâtir un meilleur avenir au sud de la frontière.

Réjean vient d’en catcher une pas pire : ses trois frères suffiront amplement pour prendre la relève de la ferme familiale. Il se dit que son avenir n’est peut-être pas auprès des vaches.

Quand il regarde à travers la fenêtre de la maison de son père, Réjean ne voit qu’une chose : de la grosse neige lourde. Pas d’blonde, pas d’job : ça commence à être déprimant.

Ça a l’air que le gazon est pas mal plus vert aux États — en tout cas, c’est ce que lui laisse miroiter sa tante Joséphine, installée au New Hampshire. Là-bas, il y a de la job pour les gros travaillants comme Réjean.

Quand il arrive à Manchester, Réjean n’est pas trop dépaysé. Ses voisins, ce sont des Tremblay à gauche et des Gingras en face. Le prêtre vient de la Beauce et il célèbre la messe en français.

En 1894, Réjean marie Angéline, la fille du propriétaire de la quincaillerie. Le couple se dit qu’un jour, il va s’acheter une terre proche de Montréal.

Réjean parlera toute sa vie de retourner vivre au Québec. Mais la job est aux States, et le retour aux racines sera toujours remis à plus tard.

Roger, le fils de Réjean, aura longtemps le projet de reprendre la ferme de son grand-père près de Québec, mais ça ne se fera jamais. C’est finalement avec le fils de Roger, Jacques, que se terminera le rêve canadien-français de la famille.

Si vous le croisez, appelez-le Jack.

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