ce qui ne changera pas...

Les énergies vertes moins chères

Les coûts des énergies vertes sont en chute libre. Selon l’Agence internationale de l’énergie, le coût des éoliennes offshore sera en baisse de 40 à 50 % d’ici 2021. Le coût des panneaux solaires suit la même courbe. L’énergie solaire est déjà concurrentielle par rapport au gaz et au charbon par kilowattheure produit. « Aujourd’hui, utiliser les énergies vertes et réduire les émissions de gaz à effet de serre coûte moins cher que de continuer d’utiliser les énergies fossiles », affirme Mindy Lubber, présidente de Ceres. Cet organisme à la frontière de l’environnement et de la finance étabi à Boston a été fondé dans la foulée de la catastrophe de l’Exxon Valdez en 1989. Il regroupe aujourd’hui 100 grands investisseurs qui gèrent collectivement 11 000 milliards de placements.

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Engagement de la Chine

Hier, à la conférence de Marrakech sur le climat, le gouvernement chinois a réitéré son engagement à lutter contre les changements climatiques. La Chine y voit son intérêt diplomatique et économique. « Il y a déjà une féroce concurrence à l’échelle mondiale pour déterminer qui sera la première économie sur le marché des infrastructures d’énergies vertes », affirme Sam Adams, directeur pour les États-Unis du World Resources Institute et ex-maire de Portland, en Oregon. La Chine est déjà le plus grand investisseur dans les énergies vertes, alors que l’administration Trump serait occupée à ressusciter l’industrie du charbon. « En Chine, dans leur grille d’analyse, les émissions de gaz à effet de serre sont un signe d’inefficacité », note Andrew Steer, président du World Resources Institute.

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Les entreprises bougent

Les grandes entreprises planétaires se sont déjà engagées à réduire leur empreinte carbone. Elles y trouvent leur compte en réduction des coûts énergétiques. La coalition We Mean Business regroupe 485 sociétés totalisant plus de 8000 milliards en revenus. Parmi elles, de nombreux piliers de l’industrie américaine, comme Apple, Coca-Cola, Bank of America, Facebook, General Motors, Google, HP, Johnson & Johnson, Microsoft, Nike, Proctor & Gamble et Starbucks se sont engagées à recourir à 100 % aux énergies renouvelables d’ici 2050, voire plus tôt. Walmart, déjà le plus grand consommateur d’énergie solaire aux États-Unis, a 380 projets d’énergie verte achevés ou planifiés. Pas de quoi stimuler la demande pour le charbon que M. Trump veut ressusciter.

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Plus de gaz, moins de charbon

Trump affirme que sous son administration, il va faire renaître la demande en charbon tout en ouvrant toutes les terres publiques à l’exploitation du pétrole et du gaz, en particulier le gaz de schiste. Il y a ici une contradiction évidente : le charbon et le gaz sont en concurrence sur le marché de la production d’électricité. Et c’est l’abondance de gaz de schiste qui a entraîné la fermeture des centrales et des mines de charbon. Cependant, il y a un aspect du programme de Trump qui pourrait donner un coup de pouce aux énergies vertes, selon Nigel Topping, PDG de We Mean Business : « Son programme d’infrastructures pourrait servir à améliorer les réseaux électriques et à créer de nouveaux marchés pour le Texas, par exemple, qui est un leader de l’énergie éolienne. »

lutte contre les changements climatiques

Trump peut-il saboter l’élan international ?

Donald Trump ne pourra pas « annuler » l’accord de Paris sur le climat signé par plus de 190 pays, en décembre 2015, comme il a promis de le faire durant sa campagne à la présidence des États-Unis. Mais en s’abstenant de donner suite aux engagements de son pays pour la réduction des émissions de gaz à effet de serre (GES), son administration pourrait fort bien saboter l’élan planétaire pris depuis un an pour lutter contre les conséquences des changements climatiques.

Dans sa marche triomphale vers la Maison-Blanche, le milliardaire de l’immobilier a présenté les grandes lignes d’une politique énergétique « pour l’Amérique d’abord » inspirée d’un autre âge. Elle prévoit, entre autres, la remise en production des mines de charbon du Midwest et une accélération des investissements dans les puits pétroliers et les activités de captage des gaz de schiste, pour créer « un demi-million de nouveaux emplois par année ».

Il y a deux semaines à peine, dans un discours prononcé en Caroline du Nord, Donald Trump a déclaré qu’il allait aussi annuler « toutes les sommes gaspillées par Obama-Clinton sur les enjeux climatiques, et toutes les sommes liées au réchauffement climatique versées aux Nations unies. » 

« Ces décisions nous permettront d’épargner 100 milliards de dollars sur une période de huit ans, et cet argent servira à reconstruire l’infrastructure vitale, y compris les systèmes de production d’eau potable, dans nos grandes villes. »

— Donald Trump, dans un discours prononcé il y a deux semaines

Pour le cofondateur du groupe écologiste québécois Équiterre, Steven Guilbault, qui a consacré la plus grande part de sa vie militante à sensibiliser l’opinion publique aux effets des changements climatiques, l’élection à la présidence de Donald Trump « est préoccupante à plusieurs égards ».

« Je crois qu’il va tenter de soustraire les États-Unis de l’accord de Paris, dit-il, mais je ne sais pas jusqu’à quel point ce sera lourd de conséquences. Plusieurs pays ont déjà mis en place des conditions pour réduire l’empreinte carbone dans leur économie, et je ne vois pas pourquoi ils reviendraient tous en arrière. »

Un héritage d’Obama menacé

Les États-Unis sont les plus grands émetteurs de GES du monde, après la Chine. En 2013, leurs émissions de GES, responsables des changements climatiques, se sont élevées à 5,3 milliards de tonnes, en baisse depuis 2008. Elles représentent 15 % des émissions mondiales de GES liées à l’énergie.

En comparaison, les émissions totales du Canada, dont le bilan s’élève à 550 millions de tonnes de GES par année, sont presque 10 fois moins importantes que celles du grand voisin américain.

En 2014, l’administration du président Barack Obama a signé un accord bilatéral de réduction avec la Chine, dans lequel les États-Unis se sont engagés à réduire leurs émissions de 26 à 28 % sous le niveau de 2005, d’ici 15 ans. La Chine s’engageait quant à elle à faire passer à 20 % d’ici 2030 le pourcentage de son énergie provenant de sources renouvelables.

Pierre-Olivier Pineau, professeur au département des sciences de la décision et titulaire de la Chaire de gestion du secteur de l’énergie de HEC Montréal, estime que plusieurs engagements de Donald Trump en matière d’énergie, notamment la relance de l’industrie du charbon, ne seront pas viables sur le plan économique. Elles risquent donc de s’effondrer sous leur propre poids.

Par contre, l’arrivée de Donald Trump à la Maison-Blanche pourrait sonner le glas de la pièce maîtresse de l’administration Obama pour réduire les émissions de GES du secteur énergétique : le Clean Power Plan. Ce plan « pour une énergie propre », adopté en août 2015, vise une réduction de 32 % des émissions de GES (sous le niveau de 2005), d’ici à 2030, en imposant des cibles précises à tous les États du pays, et l’achat de crédits carbone par tous ceux qui ne pourraient pas les respecter.

« Le plan, explique-t-il, a été stoppé en février dernier par la Cour suprême des États-Unis parce que de nombreux États contestent sa constitutionnalité. Je ne pense pas qu’il va survivre à l’arrivée de Trump, et sans lui, il n’y a plus de mécanisme pour mettre en œuvre les engagements de l’accord de Paris aux États-Unis. »

« Il pourrait y avoir des conséquences diplomatiques à se retirer de l’accord de Paris, dit Pierre-Olivier Pineau. Je ne crois donc pas qu’une administration Trump va tenter de s’y soustraire. Mais comme l’accord lui-même n’est pas contraignant, tout ce qu’il a à faire, c’est de se croiser les bras et ne rien faire. Le résultat sera le même. »

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