Mon clin d’œil

Le prince Philip prend sa retraite. Est-ce que ça veut dire qu’il va commencer à travailler ? 

Opinion : Électroconvulsivothérapie

En critiquant le traitement, on stigmatise la maladie mentale

Madame Silvia Galipeau,

Nous avons lu avec grand intérêt l’article** paru dans La Presse+, le 23 avril dernier, au sujet de l’électroconvulsivothérapie [« électrochocs » dans l'article]. Il nous est apparu essentiel de contribuer à la discussion, car ce qui est écrit pourrait avoir des impacts importants sur les individus qui considèrent cette option de traitement.

Loin de devenir un traitement de moins en moins utilisé, l’électroconvulsivothérapie (ECT), en 2017, prend sa place parmi les options offertes à des personnes aux prises avec la souffrance et les conséquences de la maladie mentale.

L’électroconvulsivothérapie demeure le traitement le plus efficace pour la dépression majeure.

Parmi les autres conditions pour lesquelles ce traitement est efficace, se retrouvent aussi la manie résistante à la médication habituelle et la schizophrénie réfractaire (symptômes positifs). À noter que la dépression est deux fois plus fréquente chez la femme et que la dépression réfractaire se voit de façon plus importante chez les personnes âgées. Oui, les femmes âgées qui présentent une dépression grave et réfractaire méritent, elles aussi, « une approche humaine et respectueuse ». Bien que dans la majorité des cas, les individus dirigés vers l’ECT ont essayé de multiples approches qui n’ont pas soulagé leur maladie, son efficacité fait de celui-ci un premier choix dans certaines circonstances ; par exemple, lorsque la dépression met à risque l’intégrité physique et même, la vie de l’individu.

L’article de La Presse+ souligne que le nombre de traitements par individu augmente. Notre équipe a remarqué cette tendance. D’abord, chaque traitement nécessite de six à douze séances. De plus, à la suite d’un traitement efficace en phase aiguë, il sera parfois nécessaire de maintenir l’effet de celui-ci avec des ECT de maintien (séances d’électroconvulsivothérapie offertes à intervalles imposés par les besoins du patient, le plus fréquemment aux trois à quatre semaines). Ainsi, le nombre par individu augmentera. Ces deux commentaires ne signifient pas que l’ECT n’est pas un traitement d’exception !

Anachronisme

On ne pratique plus la psychiatrie comme dans les années 50 ou 60. Les ECT d’aujourd’hui n’ont rien à voir avec les interventions de cette époque. Cela nous apparaît tout à fait anachronique de juger les ECT de 2017 en se basant sur les traitements donnés durant cette période, considérant l’avancement et le développement des technologies modernes et des connaissances actuelles.

Le ton de cet article nous laisse avec des questions. Pourquoi ne voit-on pas d’articles qui à répétition déplorent la fréquence d’autres interventions médicales reconnues pour leur efficacité par les experts dans le domaine ? Ainsi, on ne voit pas d’articles qui critiquent l’utilisation de la cardioversion ; nous devons alors conclure que ce n’est pas l’utilisation du courant électrique qui anime cette critique. De plus, on ne voit pas d’écrits ou de commentaires qui se désolent de la neurochirurgie concernant l’épilepsie ; donc ce n’est pas le fait que le cerveau soit la cible du traitement qui génère les réactions négatives. Aussi, nous rencontrons régulièrement dans les médias des groupes qui se font une mission de bannir l’ECT.

Il semble que le seul facteur qui soit distinct est que l’ECT est un traitement qui concerne des maladies mentales, telles la dépression ou la schizophrénie.

Cette critique disproportionnée de l’électroconvulsivothérapie est en fait un symptôme de la stigmatisation de la maladie mentale qui demeure un facteur qui ajoute à la souffrance des personnes et qui, malheureusement, constitue encore de nos jours une des barrières les plus importantes à leur rétablissement complet.

La critique est saine et constructive lorsqu’elle est juste, basée sur des faits et ne cible pas de façon disproportionnée une intention négative. En particulier, les personnes souffrant de maladies mentales ne devraient pas avoir à surmonter, en plus du fardeau de la maladie, le stigma concernant leur traitement.

* Cosignataire : Claude Vanier, ancien chef médical du module d’électroconvulsivothérapie, Institut universitaire en santé mentale de Montréal

Ce texte provenant de La Presse+ est une copie en format web. Consultez-le gratuitement en version interactive dans l’application La Presse+.