DROIT À L’AVORTEMENT

Washington abandonne la recherche sur les tissus fœtaux

WASHINGTON — Le gouvernement de Donald Trump a annoncé hier qu’il mettait fin à toute recherche médicale dans les centres fédéraux sur les tissus prélevés sur des embryons avortés, accédant à une revendication importante des militants antiavortement aux États-Unis.

Le département de la Santé a annoncé dans un communiqué que plus aucun chercheur des Instituts nationaux de santé (NIH) ne pourrait travailler sur ce type de tissus.

« Promouvoir la dignité de la vie humaine de la conception jusqu’à la mort naturelle est l’une des priorités de l’administration du président Trump », a indiqué le Département.

En outre, l’administration a indiqué qu’elle ne renouvellerait pas le contrat de financement public de 2 millions de dollars par an avec l’Université de Californie à San Francisco (UCSF) pour des travaux de recherche sur les tissus d’embryons. Ceux-ci sont utilisés pour mettre au point de nouveaux traitements contre le VIH, le virus qui cause le sida.

« Les actions d’aujourd’hui mettent fin à un partenariat de 30 ans avec les NIH pour utiliser des modèles conçus spécialement et qui ne peuvent être développés que par le recours à des tissus d’embryons pour trouver une guérison au VIH », a réagi dans un communiqué au vitriol le chancelier de l’Université, Sam Hawgood.

Le centre universitaire utilise des souris dans lesquelles les chercheurs implantent des cellules d’embryons pour créer un système immunitaire proche de celui de l’homme et tester des anticorps potentiels contre le virus.

Le dirigeant de l’UCSF a dénoncé une « décision abrupte », « motivée politiquement, à court terme et non fondée sur des faits scientifiques ».

Les tissus embryonnaires sont aussi utilisés pour la recherche contre la maladie d’Alzheimer, les blessures de la moelle épinière et des maladies ophtalmiques, a-t-il rappelé.

Satisfaction à droite

L’administration républicaine avait lancé un audit sur ce sujet en septembre 2018 et depuis, le contrat avec l’université était sur la sellette, soumis à des extensions de 90 jours. Finalement l’extension actuelle, qui courait jusqu’à hier, n’a pas été renouvelée, une décision apparemment sans préavis.

Les projets de recherche financés par des fonds publics dans d’autres universités ou centres de recherche ne seront pas exclus systématiquement à l’avenir, mais seront désormais soumis à une nouvelle procédure impliquant un comité d’éthique consultatif.

La décision n’est pas une interdiction légale : la recherche privée pourra se poursuivre, tant qu’elle n’est pas cofinancée par des fonds publics.

Les opposants au droit à l’avortement ont salué le changement de politique.

« La plupart des Américains refusent que leurs impôts créent un marché pour des parties de bébés avortés qui sont ensuite implantées dans des souris et utilisées pour des expérimentations », a affirmé l’organisation Marche pour la vie.

« L’État fédéral ne peut pas être complice de ces circuits horribles d’achat de tissus fœtaux issus de bébés avortés. » 

— Marco Rubio, sénateur républicain

Mais pour de nombreux scientifiques, les tissus embryonnaires sont essentiels pour les recherches de pointe et ils ont déjà permis de nombreuses avancées, notamment pour les vaccins contre la poliomyélite, la rubéole et la rage.

L’arrêt des financements publics « va anéantir des recherches cruciales, ralentir les traitements contre le cancer, le sida, la démence. Interdire le tissu embryonnaire, c’est interdire l’espoir pour des millions de gens qui souffrent de maladies invalidantes », a estimé sur Twitter Lawrence Gostin, professeur en droit de la santé à l’Université Georgetown de Washington.

Environ 1,1 million de personnes vivent avec le VIH aux États-Unis, où le chiffre annuel des contaminations stagne depuis 2013 à environ 39 000 cas. Aucun vaccin n’a encore été trouvé, même si les traitements actuels parviennent à rendre la charge virale indétectable.

La décision du gouvernement Trump intervient après le vote dans plusieurs États conservateurs de lois très restrictives sur les interruptions volontaires de grossesse (IVG). L’objectif est de ramener cette question sensible devant la Cour suprême, qui avait légalisé l’avortement en 1973, en espérant un revirement des juges de la Cour où les conservateurs ont désormais la majorité.

Donald Trump, un opposant déclaré à l’avortement, veut également mobiliser la base électorale conservatrice, opposée à l’IVG, alors qu’il briguera un second mandat en novembre 2020.

ÉTATS-UNIS

Des sénateurs s’allient contre des ventes d’armes à Riyad

WASHINGTON — Des sénateurs républicains et démocrates se sont alliés hier au Congrès américain pour tenter de bloquer plusieurs milliards de dollars de ventes d’armes à l’Arabie saoudite autorisées par le président Donald Trump, signe de la contestation croissante de sa politique favorable à Riyad.

Huit mois après le meurtre du journaliste saoudien Jamal Khashoggi par des agents venus de Riyad, la colère ne retombe pas au Congrès. Y compris chez certains fidèles alliés de Donald Trump indignés par la réponse tiède de la Maison-Blanche face au prince héritier Mohammed ben Salmane.

Dans ce contexte déjà tendu à Washington, l’administration Trump a employé des pouvoirs extraordinaires fin mai afin de contourner le Congrès pour autoriser directement 22 ventes d’armes distinctes à l’Arabie saoudite et à Dubaï, pour un montant de 8,1 milliards.

Elle a invoqué, pour le justifier, une situation d’urgence provoquée par l’Iran.

Cette décision a encore provoqué l’exaspération dans les hémicycles du Congrès, y compris chez des fidèles alliés de Donald Trump qui craignent que ces armes ne soient utilisées contre des civils au Yémen par la coalition menée par Riyad.

Beaucoup sont en outre furieux contre le prince héritier Mohammed ben Salmane depuis le meurtre de Khashoggi. Le renseignement américain estime qu’il a ordonné cet assassinat, mais Donald Trump a toujours refusé de lui en attribuer la responsabilité.

Le républicain Lindsey Graham, l’un des plus fidèles soutiens du milliardaire, figure ainsi parmi les sept sénateurs ayant introduit 22 résolutions visant à bloquer chacune de ces ventes d’armes.

« Même si je comprends que l’Arabie saoudite est un allié stratégique, on ne peut pas ignorer le comportement de Mohammed ben Salmane. Nous ne pouvons pas faire comme si de rien n’était avec l’Arabie saoudite. »

— Lindsey Graham, sénateur républicain

Technologie nucléaire civile

« Les efforts de l’administration Trump pour vendre des milliards de dollars d’armes américaines à l’Arabie saoudite et aux Émirats arabes unis ne sont qu’un nouvel exemple » de la volonté « de contourner le Congrès et du mépris pour les droits de la personne », a renchéri le sénateur démocrate Bob Menendez.

Aucune date n’a encore été fixée pour un vote. Et même si ces résolutions venaient à être adoptées, le président pourrait apposer son veto. Il faudrait alors aux deux chambres du Congrès une majorité des deux tiers pour outrepasser ce blocage.

Mais cette initiative au Sénat – contrôlé par les républicains – signale la fronde persistante, y compris dans le parti présidentiel, depuis l’assassinat de Jamal Khashoggi.

Critique du régime, l’intellectuel saoudien qui résidait aux États-Unis a été tué et démembré le 2 octobre par un commando d’agents saoudiens venu de Riyad, dans le consulat de son pays à Istanbul où il faisait des démarches administratives pour se marier. Son corps n’a jamais été retrouvé.

Donald Trump a déjà été forcé d’employer son veto en avril pour bloquer une résolution l’exhortant à mettre fin à tout soutien militaire à la coalition saoudienne au Yémen.

Un nouveau front s’est ouvert mardi avec l’annonce par le sénateur démocrate Tim Kaine – sur la base de documents officiels – que l’administration Trump avait autorisé des transferts de technologie nucléaire civile vers l’Arabie saoudite, y compris deux autorisations faites après la mort de Jamal Khashoggi.

L’Arabie saoudite, plus gros exportateur de pétrole du monde, a lancé un vaste projet de 80 milliards de dollars pour construire 16 réacteurs nucléaires. Le prince héritier a en parallèle suscité l’inquiétude en affirmant que le royaume chercherait à s’équiper de l’arme nucléaire si l’Iran, son grand ennemi, le faisait.

Le sénateur Kaine, colistier de la candidate démocrate Hillary Clinton en 2016, a fustigé l’attitude de Donald Trump.

« L’empressement du président Trump à donner aux Saoudiens tout ce qu’ils veulent, malgré les objections » de républicains et de démocrates « au Congrès, porte atteinte aux intérêts américains de sécurité nationale », a déploré M. Kaine. C’est « l’une des nombreuses mesures prises par l’administration qui alimentent une dangereuse escalade des tensions dans la région ».

États-Unis

L’Alabama veut castrer chimiquement les pédophiles

L’Alabama s’apprête à rendre obligatoire la castration chimique avant la remise en liberté anticipée des personnes condamnées pour pédophilie, une mesure controversée déjà en vigueur dans plusieurs autres États américains. La législature de l’Alabama, dans le sud des États-Unis, vient d’adopter une loi qui impose à tous les détenus de plus de 21 ans et condamnés pour une agression sexuelle sur mineur de moins de 13 ans de prendre des médicaments diminuant leur niveau de testostérone avant toute remise en liberté conditionnelle. Ce traitement, qui affecte la libido, devra se poursuivre jusqu’à ce qu’un tribunal juge qu’il n’est « plus nécessaire ». Si le condamné l’interrompt de son propre chef, il sera renvoyé derrière les barreaux. Sauf exception, le détenu devra payer les traitements, selon ce texte qui doit encore être promulgué par la gouverneure républicaine de l’État, Kay Ivey. Son promoteur, l’élu Stephen Hurst, a expliqué vouloir « une punition qui correspond à la gravité du crime ». La Californie a introduit une mesure comparable en 1996.  — Agence France-Presse

frontière avec le mexique

Hausse marquée des arrestations en mai

Plus de 144 000 migrants ont été arrêtés à la frontière sud des États-Unis en mai, en hausse de 32 % par rapport au mois d’avril, ont annoncé hier les garde-frontières de la U.S. Customs and Border Protection (CBP). Parmi eux, plus de 57 000 étaient des mineurs, dont près de 12 000 voyageant seuls, ont précisé les autorités. Après l’investiture de Donald Trump en janvier 2017, les arrestations à la frontière étaient inférieures à 20 000 par mois. Elles ont connu depuis une hausse constante, dépassant les 100 000 en mars et avril. Au-delà des chiffres globaux, les données démographiques des migrants interpellés ont radicalement changé. Il s’agissait auparavant principalement d’hommes seuls, souvent originaires du Mexique, venant travailler aux États-Unis. Mais en mai, près de 90 000 des migrants appréhendés se trouvaient en famille, 12 000 étaient des mineurs non accompagnés et seuls 43 000 étaient des adultes seuls, selon les chiffres de la CBP. La grande majorité des migrants viennent désormais du Honduras, du Salvador et du Guatemala. — Agence France-Presse

interdiction des trans dans l’armée

Trump défend sa décision

Le président américain Donald Trump a justifié hier sa décision d’interdire aux personnes trans de s’engager dans l’armée par les « quantités massives de médicaments » prises après les opérations de changement de sexe et le coût de ces opérations. En vertu de nouvelles règles entrées en vigueur en avril, les personnes ayant besoin d’un traitement hormonal ou d’une opération de réassignation sexuelle ne peuvent plus s’enrôler dans l’armée américaine, pas plus que les personnes ayant déjà subi un traitement médical de changement de sexe. Interrogé sur cette décision dans une interview diffusée hier sur la chaîne ITV, en marge de sa visite d’État de trois jours au Royaume-Uni, le président a expliqué l’avoir prise « parce que [les personnes trans] prennent des quantités massives de médicaments ». Il a aussi mis en avant le coût de l’opération. « Les gens entrent [dans l’armée] et demandent l’opération. L’opération coûte 200 000, 250 000 $ », a-t-il affirmé. Le Pentagone évalue à 9000 le nombre de personnes s’identifiant comme trans qui servent dans les forces armées. L’armée américaine compte 1,3 million de militaires en service actif.

— Agence France-Presse

Brexit

Trump persuadé que le problème du « mur » en Irlande sera réglé

Le président Trump a assuré hier au premier ministre d’Irlande, Leo Varadkar, que le problème posé par le Brexit pour son « mur » avec le Royaume-Uni finirait par trouver une issue positive. Son hôte a rétorqué qu’un mur était la dernière chose qu’il souhaitait. Au cours d’une rencontre à l’aéroport de Shannon, en Irlande, M. Trump a comparé la frontière entre la république d’Irlande et l’Irlande du Nord à celle entre les États-Unis et le Mexique. Tout le long de la frontière américano-mexicaine, très surveillée aux principaux points de passage, le locataire de la Maison-Blanche souhaite ériger un mur anti-immigration. Au contraire, la frontière irlandaise est actuellement ouverte à la circulation sans contrôle des biens et des personnes, les deux pays étant membres de l’Union européenne (UE). Et Dublin craint que la sortie de l’UE des Britanniques, programmée le 31 octobre, ne rétablisse une frontière physique. Ce à quoi le dirigeant irlandais a immédiatement répondu : « Je pense qu’il y a une chose que nous voulons éviter, bien sûr, c’est un mur ou une frontière. »

— Agence France-Presse

Ce texte provenant de La Presse+ est une copie en format web. Consultez-le gratuitement en version interactive dans l’application La Presse+.