RÉSEAU ROUTIER 

Par quel bout commencer  ?

Tout le monde se plaint des transports, en particulier de la qualité du réseau routier, de nos autoroutes à nos rues et leurs nids-de-poule. Au-delà de nos conditions climatiques, un défi commun à tous les pays est le financement des infrastructures de transport, y compris routières. Comme le recommandaient le CIRANO et l’Association des économistes québécois, la meilleure solution serait l’instauration d’une taxe kilométrique. Une telle taxe est plus générale et pérenne que la taxe sur l’essence à cause de la diversification des sources d’énergie (véhicules électriques et autres) et plus juste puisque l’utilisateur paiera selon son usage de l’infrastructure et l’usure qu’il engendre.

Le mot qui est peut-être le plus associé au réseau routier dans les régions urbaines du Québec et à Montréal en particulier est la congestion. Les causes de cette congestion ou saturation du réseau sont en grande partie conjoncturelles et sont liées à la magnitude des travaux routiers et d’infrastructures souterraines, mais aussi à la bonne santé de l’économie. Il faudrait effectivement reconnaître que la demande en transport dépend de l’activité économique et que les routes sont construites pour répondre à une demande : construire des routes qui ne sont jamais congestionnées serait un gaspillage d’argent public.

Cela dit, la demande de transport trop importante qui cause la congestion a des impacts sur l’ensemble des usagers en termes de perte de temps et d’argent et sur l’environnement.

Il existe plusieurs solutions à la congestion, premièrement le développement des transports collectifs et l'augmentation du nombre de personnes (ou de la quantité de marchandise) par véhicule.

Le réseau peut aussi être mieux géré avec des solutions qui ont fait leurs preuves dans le reste du monde, y compris chez nos voisins ontariens, comme la gestion des incidents, le contrôle adaptatif en temps réel des feux de circulation et le contrôle d’accès aux autoroutes. Enfin, toujours selon le principe utilisateur-payeur, comme le recommande la commission de l’écofiscalité du Canada, il faudrait considérer une tarification de la congestion qui ferait varier le prix de la taxe kilométrique selon la saturation du réseau.

SÉCURITÉ ROUTIÈRE

Le troisième sujet d’actualité avec la proposition de réforme du Code de la route est la sécurité routière. Si la situation s’est grandement améliorée dans la dernière décennie, encore trop de personnes meurent et sont grièvement blessées sur les routes, ce qui engendre des coûts d’un ordre de grandeur similaire à ceux de la congestion en plus de coûts humains inestimables.

Là encore, nous pouvons suivre les meilleurs élèves, soit les pays d’Europe du Nord, en particulier la Suède qui adopta en premier en 1997 la Vision Zéro, soit une approche systémique de priorisation de la sécurité de tous les usagers de la route, motorisés et non motorisés, par la modification des aménagements urbains et routiers, l’amélioration de la sécurité des véhicules et les changements de comportement des usagers. Les villes et le gouvernement provincial doivent suivre l’exemple de Montréal qui a adopté la Vision Zéro en 2017.

Cela dit, la seule solution aux accidents de la route est de supprimer le conducteur, ce que l’automatisation de la conduite nous promet à moyen terme, dès 2020 selon certains acteurs.

Le véhicule sans conducteur, communément appelé véhicule autonome, va amener un bouleversement des systèmes de transport analogue au remplacement des voitures à chevaux par l’automobile.

Bien plus efficace qu’un conducteur humain, il promet d’augmenter considérablement le nombre de véhicules pouvant passer sur nos routes. Il est alors impératif de le prendre en compte dans tout projet d’infrastructure de transport. Intégré dans une offre de mobilité cohérente et complémentaire au transport collectif sous forme de navettes et véhicules partagés, il offre des opportunités de réaménager nos villes et réseaux routiers, puisqu’on aura besoin de bien moins de véhicules et d’espaces de stationnement. Enfin, la diminution drastique du nombre d’accidents de la route renforcera l’attractivité de la marche et du vélo dans un cercle vertueux. Mais si chaque véhicule est remplacé par un véhicule sans conducteur, les impacts sur l’environnement et la santé pourraient tout aussi bien empirer. Ces enjeux majeurs rendent urgentes une réflexion stratégique et une vision claire des gouvernements.

Pour conclure, si je pouvais formuler un souhait final, je souhaiterais la fin du règne des opinions en transport, en particulier dans les discours politiques et médiatiques. Nous avons les moyens scientifiques et techniques pour évaluer les mesures et politiques de transport, utilisons-les !

L’auteur remercie les étudiants et associés de recherche de la Chaire Mobilité de Polytechnique pour leurs commentaires.

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