COUPLE D’ÉCRIVAINS  GENEVIÈVE PETTERSEN ET SAMUEL ARCHIBALD

Un joyeux chaos

« Eh, Pol Pot ! »

Samuel Archibald surnomme affectueusement sa conjointe Geneviève Pettersen, arrivée presque au terme de sa grossesse, du nom d’un sanguinaire dictateur, juste pour rire. Les derniers milles sont éreintants pour elle, qui ne sait plus trop comment s’asseoir confortablement. « Je veux que tu m’appliques mon vernis à ongles sur les orteils jusqu’à l’accouchement ! », lui réplique-t-elle.

Il est professeur de littérature et auteur du recueil de nouvelles Arvida  ; elle est pigiste et auteure du roman La déesse des mouches à feu. Ils ont connu un véritable succès avec leurs livres, ce qui a fait d’eux un couple d’écrivains en vue.

Lorsque nous les avons contactés pour cette série, nous avons proposé de les photographier dans leurs bureaux de travail, mais c’est avec surprise que nous avons appris qu’ils n’en avaient pas ! Il n’y a pas de place pour un bureau dans leur charmante petite maison de Rosemont, d’autant plus que leur troisième enfant est en route.

DU TEMPS VOLÉ À ÉCRIRE

C’est un joyeux chaos qui règne chez les Archibald-Pettersen, entre les enfants, le chien qui jappe et les montagnes de bouquins. Comment sont-ils venus à bout de leurs manuscrits, on se le demande !

« J’ai pris l’attitude guérilla », répond Samuel. « J’écris sur le coin de la table de cuisine, beaucoup dans l’autobus, derrière des factures, même sur du papier de toilette. » « Lui, il est capable d’écrire dans le chaos, note Geneviève. Moi, j’ai besoin de plus de calme, de plus de silence. »

« J’ai compris qu’elle travaillait à quelque chose quand elle a fait un ménage pas ordinaire dans la pièce qui est aujourd’hui devenue la chambre du bébé. » 

— Samuel Archibald à propos de Geneviève Pettersen

Pour tous les deux, écrire signifie voler du temps au rythme effréné de leur vie. Il leur a tout de même fallu une petite retraite pour mettre la touche finale à leurs livres, en s’isolant dans un chalet, sinon carrément dans le salon de leur éditeur (ils publient tous les deux au Quartanier).

« J’ai constaté que tout ce que je n’écris pas, je le retiens et ça me travaille, dit Samuel. Quand j’écris des notes partout et que je les perds, je vire à moitié fou ! »

« ÇA, C’EST À MOI ! »

Une saine jalousie anime ce couple d’écrivains. « Sam est plus frustré dans le temps que moi, parce qu’il a un travail de professeur, note Geneviève. Je suis travailleuse autonome ; je peux travailler uniquement sur ce que je veux. »

Le processus d’écriture, ils le vivent chacun de leur côté et ils ne font lire que le résultat – jamais les brouillons – à l’autre, histoire d’éviter de trop s’influencer dans leurs commentaires en cours de création.

Pour les idées, qui leur viennent surtout en voyage, ils tracent spontanément les limites. « Si mon père raconte une bonne histoire, je lui dis : “Ça, c’est à moi !”, précise Samuel. Là où on collabore le plus, c’est lorsqu’on parle de nos titres et de la poutine d’un livre, comme le quatrième de couverture. »

Ils admettent que si Geneviève, qui a publié après Samuel, n’avait pas connu de succès, cela aurait pu être difficile pour leur couple. Heureusement, ils ont tous les deux goûté au plaisir du lectorat, « et ce qui est bien, souligne Geneviève, c’est qu’on n’a pas le même ».

« Moi, c’est les gens d’un certain âge, et elle, ce sont les kids », renchérit Samuel. « Malgré tout, dans les salons du livre, les gens s’attendent à ce qu’on signe ensemble, note-t-elle. Ça intrigue les gens. Ça ne nous dérange pas d’être ensemble ou de faire des talk-shows ; c’est tellement rare que les écrivains prennent ce genre de place. Mais nous faisons quand même attention, il faut que ce soit pour une bonne raison. »

On peut lire Geneviève Pettersen toutes les semaines sur le site web du magazine Châtelaine. Son essai, Vie et mort du couple (Éditions La Presse), est en librairies et son roman, La déesse des mouches à feu (le Quartanier), est en nomination aux prix Archambault. Elle cosigne avec Mélanie Charbonneau la série web Les Stagiaires qui sera diffusée en mars.

Samuel Archibald travaille à son deuxième livre qui sera publié au Quartanier, et présentera cet été sa pièce de théâtre Saint-André-de-l'épouvante à Carleton-sur-Mer.

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