Vers PyeongChang 2018

Sur la bonne voie

À moins de 50 jours de la cérémonie d’ouverture, nos journalistes brossent un portrait des athlètes canadiens depuis le début de la saison des sports d’hiver en Amérique du Nord, en Europe et en Asie. Malgré quelques blessures ou certaines incertitudes, les athlètes à la feuille d’érable font généralement bonne figure dans leurs domaines respectifs. Bilan.

Vers PyeongChang 2018  Bilan de l’année

À plein régime

La blessure au dos subie par Erik Guay a défrayé la chronique au Québec le week-end dernier. L’incertitude entourant la présence du champion mondial aux Jeux olympiques de PyeongChang est préoccupante pour l’équipe canadienne de ski alpin, déjà privée de Marie-Michèle Gagnon, son plus grand espoir (le seul ?) de médaille chez les femmes.

Malgré ce coup du sort, tout n’est pas noir pour le Canada à moins de 50 jours de la cérémonie d’ouverture. Les athlètes à la feuille d’érable roulent même à plein régime depuis le début de la saison des sports d’hiver en Amérique du Nord, en Europe et en Asie.

Samedi dernier, les planchistes canadiens Maxence Parrot et Spencer O’Brien ont brillé au Winter Dew Tour, au Colorado. Avec des performances époustouflantes, ils ont remporté la victoire en slopestyle masculin et féminin. « La compétition était très relevée, les meilleurs riders de la planète étaient là. Leur succès est très prometteur, note Maxime Hénault, entraîneur. En slopestyle et en big air, c’est le Canada qui a le plus de chances de médailles olympiques. »

Dans certains sports, presque chaque étape de la Coupe du monde a produit son lot de podiums. Au tableau des médailles, le Canada pointe au deuxième rang avec 85. L’Allemagne est en tête avec 107. Les États-Unis sont troisièmes avec 72, devant la Russie (68) et la Norvège (65).

« Avec ces performances vraiment solides, les athlètes, les entraîneurs et les programmes en entier gagnent en confiance et obtiennent la confirmation qu’ils sont sur la bonne voie. »

— Anne Merklinger, directrice générale d’ À nous le podium (ANP), l’agence gouvernementale chargée d’orienter les dépenses dans le sport de haut niveau

« Après Sotchi, j’étais très inquiet, je pensais que le Canada se dirigeait vers la catastrophe. Mais le vent a tourné depuis, notamment avec les succès en patinage de vitesse. C’est là qu’on fait le plein de médailles », avance Dominick Gauthier, fondateur de B2dix, structure d’encadrement d’athlètes olympiques.

Les trois disciplines de patinage (artistique, longue piste, courte piste) ont déjà disputé l’essentiel de la saison de Coupe du monde et des Grands Prix et ont confirmé leur potentiel pour PyeongChang. Mais ce sont les sports de glisse (bobsleigh, skeleton et luge) qui ont causé la surprise.

« Leurs performances sont assez exceptionnelles à ce stade-ci », souligne Merklinger, qui veille à la répartition d’environ 20 millions de dollars pour les sports d’hiver.

« Les performances en bob à deux masculin sont hyper encourageantes. Je ne serais pas étonné de voir un doublé canadien à PyeongChang. Les gars sont sur une lancée. Le bob à quatre va aussi très bien », affirme Yannik Morin, président et cofondateur de Bobsleigh Skeleton Québec. Chez les femmes, la championne Kaillie Humphries reste dominante, abonnée aux podiums.

En ski de fond, Alex Harvey a continuellement frôlé le podium en Coupe du monde, du jamais vu pour lui avant Noël. « J’avais dit qu’il avait progressé durant l’été, mais c’est mieux que je ne l’espérais », évalue son entraîneur Louis Bouchard. La quatrième place du fondeur au 15 km style libre de Toblach, la semaine dernière, est particulièrement réjouissante aux yeux du coach. Cette épreuve contre la montre devient « de plus en plus la carte maîtresse » pour PyeongChang. « Ça va bien alors qu’il n’a pas encore atteint sa cinquième vitesse », souligne Bouchard.

Les bosseurs canadiens, de leur côté, auront beaucoup de mal à faire aussi bien qu’à Sotchi, où ils avaient obtenu quatre médailles. « Les Canadiens ne sont plus aussi dominants, soutient Dominick Gauthier, ancien entraîneur d’Alexandre Bilodeau et de Jennifer Heil. La saison dernière, ils se sont fait chauffer les fesses. Mikaël Kingsbury est toujours en tête, mais une douzaine de skieurs rivalisent désormais à forces égales pour compléter le podium. »

Chez les femmes, Gauthier note un manque de constance. « Justine et Chloé Dufour-Lapointe ont le talent pour être toujours en tête, mais elles ratent régulièrement des podiums. Ça me surprend. Elles doivent arriver à skier à leur plein potentiel plus souvent. » Comme la saison est à peine commencée, le scénario pourrait changer au cours de l’hiver.

Alain Goldberg, analyste en patinage artistique, estime que le Canada a des chances de médailles « en équipes, en danse et en couples ». « Patrick Chan, c’est plus hypothétique, juge-t-il au sujet du vice-champion de Sotchi. Les patineurs exécutent quatre ou cinq quadruples sauts, ce qui est énorme, alors que Patrick n’en maîtrise que deux. Ça devient un sport extrême et certains peuvent donc tomber et se casser la figure. C’est tactique aussi et Patrick Chan peut très bien gagner une médaille olympique. »

En novembre, l’entreprise Gracenote Sports a publié un tableau de prédictions de médailles pour PyeongChang. Le Canada s’y classait troisième, avec 31 podiums projetés. Ces chiffres conforteront ANP, qui vise une amélioration par rapport aux 25 médailles gagnées à Sotchi en 2014.

« Les algorithmes de Gracenote sont toujours intéressants à observer », note Anne Merklinger.

« En tant qu’organisation, on a fait nos propres analyses techniques en collaboration avec chacun des sports et on a toujours une grande confiance en notre capacité d’atteindre notre objectif à l’approche des Jeux. »

— Anne Merklinger

Le flottement entourant le nombre d’athlètes russes qui seront autorisés à participer aux Jeux de PyeongChang mêle un peu les cartes. « On applaudit la décision du Comité international olympique, mais à ce stade-ci, les athlètes et les entraîneurs n’ont pas de contrôle sur ceux qui seront sur la ligne de départ », commente la directrice générale d’ANP.

« Ils doivent donc se concentrer sur leur propre préparation et la nécessité de réussir une performance sur commande, le jour des Jeux. C’est tout ce qui importe en ce moment. »

En collaboration avec le Comité olympique canadien et le comité organisateur, ANP s’est assuré que tous les athlètes qui avaient des chances de monter sur le podium puissent se rendre à PyeongChang avant les Jeux. « Certains y sont allés deux, trois et même quatre fois, a relevé Merklinger. Ils se seront beaucoup familiarisés avec l’endroit. C’était une stratégie délibérée du Canada. »

Bilan de l’année

Les sports de glisse

Plusieurs médailles sont à prévoir pour le Canada dans les épreuves présentées à la montagne, mais la récolte pourrait être maigre dans certains sports, notamment en ski alpin.

Ski alpin (feu rouge)

Les blessures subies par Erik Guay, incertain de sa présence à PyeongChang, et Marie-Michèle Gagnon, finie pour la saison, font un tort immense aux espoirs de l’équipe canadienne, qui espérait deux podiums en Corée du Sud. Le médaillé de bronze mondial Manuel Osborne-Paradis cherche encore ses marques, n’ayant pas fait mieux que 15e en Coupe du monde. Dustin Cook, médaillé d’argent en 2015, n’a pas encore percé le top 10 en super-G (11e à Lake Louise, 15e à Val Gardena). La slalomeuse Laurence St-Germain représente la seule éclaircie du côté féminin (17e à Levi, 14e à Killington).

Podium en Coupe du monde : 0

Ski de fond (feu vert)

Ne vous laissez pas tromper par l’absence de podiums pour Alex Harvey. Le fondeur de Saint-Ferréol connaît le meilleur début de saison de sa carrière, s’étant glissé parmi les 10 premiers à chacune des quatre étapes de la Coupe du monde. Il a terminé quatrième de la poursuite à Ruka et du 15 km style libre à Toblach, épreuve au programme à PyeongChang. Sa régularité et sa capacité à atteindre son meilleur niveau en championnat (hormis l’épisode de Sotchi) l’autorisent à de grandes ambitions pour ses troisièmes Jeux olympiques. Derrière, c’est beaucoup moins glorieux. Len Valjas, avec qui Harvey a gagné une Coupe du monde l’hiver dernier, soigne une blessure, tandis que Devon Kershaw, à part un flash au skiathlon de Lillehammer (19e), peine à marquer des points.

Podium en Coupe du monde : 0

Ski acrobatique (feu vert)

La saison commence à peine et, déjà, le bosseur Mikaël Kingsbury enfile les victoires, à l’image de l’an dernier. Médaillée de bronze jeudi, la bosseuse Andi Naude est à surveiller, selon l’ancien entraîneur Dominick Gauthier. « Elle réussit le saut périlleux arrière une vrille mieux que toutes. » En ski-cross, on devra faire sans la championne olympique Marielle Thompson, blessée, mais la deuxième place de Georgia Simmerling, jeudi à Innichen, est encourageante. En demi-lune, Cassie Sharpe, gagnante au Dew Tour, est pressentie comme médaillée olympique. « En sauts, c’est une boîte à surprises », dit Gauthier.

Podium en Coupe du monde : 19

Surf des neiges (feu vert)

Les planchistes canadiens sont les rois du slopestyle et du big air. « S’il y a un balayage du Canada à PyeongChang, c’est là que je le vois », note Dominick Gauthier. Plusieurs fois champion des X-Games, Maxence Parrot est sur une lancée. Aussi très fort, Mark McMorris, qui a subi un grave accident lors d’une descente hors piste en mars, a fait un retour remarqué en novembre, remportant la Coupe du monde de Pékin (big air) et le Banana Open (slopestyle). Chez les femmes, on aura à l’œil Spencer O’Brien et Laurie Blouin.

Podium en Coupe du monde : 6

Biathlon (feu jaune)

Durement touché par les coupes d’À nous le podium l’an dernier, Biathlon Canada se prépare pour PyeongChang avec les moyens du bord. Julia Ransom, 24 ans, a signé le meilleur résultat de la saison avec une 9e place au 15 km individuel de la Coupe du monde d’ouverture d’Östersund. Chez les hommes, Scott Gow a fini deux fois 16e, un sommet personnel. Premier médaillé canadien en championnat du monde en 2015, Nathan Smith a été ralenti par un virus l’hiver dernier et en début de saison. « On a vu de belles performances, surtout des plus jeunes », juge le retraité Jean-Philippe Le Guellec, 5e à Sotchi. « D’un point de vue générationnel, on n’a pas vu de tels résultats depuis 10 ou 15 ans. »

Podium en Coupe du monde : 0

Bobsleigh/Luge/ Skeleton (feu vert)

Les Canadiens vont à merveille dans les sports de glisse. En bob à deux masculin, le pilote Justin Kripps trône en tête du classement de la Coupe du monde, tout juste devant son compatriote Chris Spring. En bob à deux féminin, la championne olympique Kaillie Humphries est aussi première. En skeleton féminin, Elisabeth Vathje et Mirela Rahneva multiplient les podiums et sont deuxième et troisième au classement. La lugeuse Alex Gough, 30 ans, est également troisième au monde. Ça promet.

Podium en Coupe du monde : 24

Saut à ski et combiné nordique (feu rouge)

Aucune chance de podium olympique ici. En saut à ski, la meilleure Canadienne est Taylor Henrich, de Calgary. L’athlète de 22 ans a terminé 15e à la Coupe du monde de Chaikovsky en octobre, son meilleur résultat de la saison. Elle avait pris le 13e rang aux JO de Sotchi en 2014, lors de la première épreuve olympique de saut à ski féminin de l’histoire. Elle a terminé 5e aux Championnats du monde en 2015. Plusieurs Canadiens participent aux Coupes du monde (saut à ski), mais réussissent rarement à percer le top 30. Le sport, mené par l’Allemagne et la Norvège, est tout de même fascinant. Rien en combiné nordique.

Podium en Coupe du monde : 0

Bilan de l’année

Les sports de glace

Le Canada devrait faire belle figure dans les épreuves sur glace des Jeux olympiques de PyeongChang, qui seront présentées dans la ville côtière de Gangneung.

Patinage artistique (feu vert)

Le retour des danseurs Tessa Virtue et Scott Moir assure presque le Canada d’au moins un podium à PyeongChang. Les champions du monde en titre ont terminé deuxièmes à la finale du Grand Prix de Nagoya, derrière leurs partenaires d’entraînement français Gabriella Papadakis et Guillaume Cizeron, qui semblent avoir repris l’ascendant. Les médailles de bronze de Kaetlyn Osmond et du couple Meagan Duhamel-Eric Radford témoignent de la polyvalence de l’équipe. Gabrielle Daleman, médaillée de bronze aux Mondiaux, a dû se contenter du sixième rang à ses deux Grands Prix. Quatrième à Skate Canada, le triple champion mondial Patrick Chan s’est retiré du Trophée NHK, soulevant des doutes sur son niveau de préparation avant PyeongChang.

Médailles en Grand Prix : 11

Patinage de vitesse longue piste (feu vert)

À deux, Alex Boisvert-Lacroix (2) et Laurent Dubreuil (1) ont remporté près de la moitié des épreuves de 500 m en Coupe du monde. Sur les longues distances, le Néerlandais d’origine Ted-Jan Bloemen s’est révélé régulier comme une horloge avec des podiums à chacune des quatre étapes, sans compter sa médaille d’or à la poursuite par équipes à Salt Lake City, où Denny Morrison a confirmé son retour à la forme. Vincent De Haître n’a obtenu qu’un seul podium individuel, mais s’en est approché plusieurs fois. Ivanie Blondin a remporté des médailles individuelles dans ses trois épreuves de prédilection (3000 m, 5000 m et départ en groupe), en plus de ses deux podiums en poursuite par équipes.

Médailles en Coupe du monde (épreuves olympiques) : 15

Patinage de vitesse courte piste (feu vert)

Les vétérans comme les jeunes mènent la charge pour une équipe canadienne tout feu tout flamme. À elle seule, Kim Boutin a décroché le tiers des 21 médailles en Coupe du monde, en plus de sa contribution au relais (2 médailles). Marianne St-Gelais (3 podiums individuels) n’a pas trop souffert de sa commotion subie juste avant les sélections olympiques. Chez les hommes, Samuel Girard (3 podiums) et Charles Hamelin (2) ont rempli leur mission. Ce fut plus compliqué pour le médaillé de bronze olympique Charle Cournoyer, qui a échappé une place pour le pays pour le 500 m de PyeongChang.

Médailles en Coupe du monde : 21

Curling (feu vert)

Que dire du curling ? Le suspense est quasi nul : le Canada est la puissance mondiale. Depuis 1998, le pays a obtenu 10 médailles, n’a jamais manqué un podium. Au printemps dernier, le Canada a été couronné champion mondial (masculin et féminin) devant la Suède. À PyeongChang, l’Ontarienne Rachel Homan, 28 ans, et l’Albertain Kevin Koe, 42 ans, représenteront le Canada. Les sélections olympiques, en décembre, ont causé la surprise : les champions olympiques Brad Jacobs et Jennifer Jones ont été éliminés. Les sélections pour la nouvelle épreuve double mixte se dérouleront en janvier.

Hockey (feu jaune)

Championnes olympiques depuis 2002, les hockeyeuses canadiennes vont à PyeongChang pour gagner. On prévoit qu’elles croiseront le fer en finale avec leurs rivales, les Américaines (championnes du monde depuis 2013). Cet automne, les États-Unis ont damé le pion au Canada lors de la Coupe des quatre nations. Les deux formations ont ensuite disputé six matchs préparatoires et le Canada a pris sa revanche avec cinq victoires. En hockey masculin, par contre, rien n’est joué. La formation (toujours à l’essai) a été malmenée (trois défaites en quatre matchs) à la Coupe Channel One et à la Coupe Karjala (deux défaites en trois matchs). Dernier test avant les JO ? La Coupe Spengler qui débute mardi.

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