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Édition du 22 mars 2019,
section SPORTS, écran 3
Le Rocket de Laval est une très jeune équipe. Son noyau est âgé de 22, 23 ans. Évidemment, du groupe, plusieurs sont forcés d’apprendre à la vitesse grand V la vie de joueur de hockey professionnel. Pas le choix, au fil des transactions (joueurs rappelés par le Canadien et ceux réclamés au ballottage), ils se sont retrouvés très rapidement avec un grand rôle au sein du Rocket. C’est le cas d’Alexandre Alain, Lukas Vejdemo et Jake Evans, qui ont tous des places au sein des deux premiers trios. Et ils sont tous les trois à leur première année professionnelle en Amérique du Nord.
Alain, 22 ans, jouait la saison dernière pour l’Armada de Blainville-Boisbriand, dans la Ligue de hockey junior majeur du Québec (LHJMQ). C’est une saison d’ajustement pour lui, puisqu’il est passé d’un joueur très offensif au niveau junior à un joueur plus responsable dans la Ligue américaine. Il est reconnu pour sa combativité et sa lecture du jeu, mais a probablement été utilisé plus qu’il n’aurait dû cette saison. Il a aussi frappé un mur en janvier, et a mis du temps à s’en remettre.
Vejdemo, 23 ans, a passé trois saisons complètes en Suède avant d’arriver à Laval. Il a connu une éclosion offensive en deuxième moitié de saison. Tant et si bien que les descripteurs des matchs du Rocket au 91,9 Sports, Raphaël Doucet et Anthony Marcotte, jugent qu’il est peut-être le joueur le plus près de la LNH parmi les espoirs du Canadien.
Evans, 22 ans, est pour sa part devenu une vedette au niveau collégial américain avec Notre-Dame. Il est aujourd’hui un joueur bien plus complet qu’il ne l’était au début de la saison, en plus d’être le deuxième marqueur du Rocket. Il est doté d’un bon sens du hockey et on le décrit comme un joueur intelligent.
Lukas Vejdemo
Quand tu es plus jeune, c’est un rêve, mais tu ne sais pas trop comment ça va finir. Vers 15 ou 16 ans, tu comprends que c’est ce que tu veux faire de ta vie.
Alexandre Alain
Tu fais tellement de sacrifices. On quitte la maison très tôt. J’ai quitté mes parents quand j’avais 16 ans pour vivre ma passion. C’est superbe d’avoir cette chance ici et on espère tous pouvoir faire l’autre grand pas plus tard.
Jake Evans
En grandissant, tu mets tellement de temps là-dedans et tu aimes tellement ça. Tu regardes tellement de hockey, tu vois tellement de joueurs que tu admires. Toute ta vie est consacrée à jouer un jour au hockey professionnel. On n’est pas rendus au bout, mais on s’en approche.
Lukas Vejdemo
Le plus difficile est de jouer autant de matchs. En Suède, on jouait seulement 50 matchs dans une saison. Ici, il y en a trois par semaine. Ça a été très difficile de m’ajuster afin d’être prêt pour chaque match, physiquement et mentalement. En plus, on ne s’entraîne pas tant que ça, même si Joël Bouchard est dur avec nous [rires]. J’étais habitué à des entraînements plus intensifs en Europe, mais on jouait beaucoup moins de matchs. En Amérique du Nord, on a des séquences de deux matchs en deux jours chaque semaine. En Europe, ça arrivait une ou deux fois par saison.
Alexandre Alain
Je jouais dans la LHJMQ, alors j’affrontais des jeunes de 16, 17 ans. C’est vraiment différent ici. Les joueurs sont plus gros, on a moins de temps pour réfléchir sur la glace. C’est plus rapide, mais après un ou deux mois, tu t’habitues. C’est la grosse différence. Plusieurs joueurs avec une superbe carrière junior arrivent chez les pros et sont incapables de s’ajuster.
Jake Evans
Un peu des deux. J’ai joué 40 matchs l’an dernier. Jouer plus de 70 matchs est difficile. Aussi, il y a le talent des joueurs. Si tu commets un revirement ou que tu fais une passe molle, ils peuvent contre-attaquer et marquer. En tout cas, ça va arriver beaucoup plus souvent qu’au collège. Tu ne peux plus faire de jeux risqués.
Alexandre Alain
Les 30 ou 40 premiers matchs, tu reviens d’un été de congé. Tu as tellement hâte de jouer au hockey. Après ça, ton corps est fatigué, mais pour moi, c’était aussi mental. C’est la portion la plus difficile. On se prépare pour bûcher toute la saison, mais à un certain moment, c’est difficile de se concentrer sur chaque entraînement, sur chaque match, sur chaque journée. On doit s’y habituer. L’important pour moi est de penser un jour à la fois.
Jake Evans
La saison comprend aussi beaucoup de hauts et de bas. Quand tu joues bien, tu as hâte de venir à l’aréna. Quand tu ne joues pas bien, tu es fâché envers toi-même. Tu dois gérer les hauts et les bas et ne pas te mettre trop de pression sur les épaules. C’est vrai que c’est dur de jouer si souvent, mais en revanche, tu sais aussi que tu peux te reprendre rapidement si tu as connu un mauvais match.
Lukas Vejdemo
Après un mauvais match, tu te sens mal. Mais tu dois garder en tête que l’on vit notre rêve, qu’on fait le sport qu’on aime. Ça doit rester agréable. Tu dois te rappeler que c’est ce que tu veux faire de ta vie. Quand tu as un mauvais match, essaie de l’oublier avant d’aller te coucher et lève-toi pour faire face à une nouvelle journée.
Lukas Vejdemo
Le transport entre les matchs, les longues heures en autobus. Parfois, tu joues vendredi, tu pars en autobus après le match, tu arrives au milieu de la nuit et tu dois être frais et dispos le lendemain.
Jake Evans
Sept ou huit heures, à Hershey, je crois.
Alexandre Alain
On prend l’avion pour aller à Winnipeg, Cleveland et Charlotte. Ce qui est le plus dur hors glace, c’est certainement d’apprendre à gérer ton énergie. Tu dois avoir encore de l’énergie quand tu arrives sur la glace, malgré le transport, les nuits à l’hôtel. Tu dois bien manger, bien t’hydrater, te coucher tôt. On doit essayer le mieux possible de garder notre énergie pour les matchs malgré le calendrier exigeant.
Jake Evans
Je ne pense pas vraiment avoir de mauvaises habitudes. Mais on m’a encouragé à commencer à m’habiller un peu mieux [rires]. Quand j’étais au collège, je me rendais à l’aréna avec un pantalon en coton ouaté. Je dois faire un peu mieux ici.
Lukas Vejdemo
Juste de déménager de la Suède au Canada, c’était gros pour moi. Tu laisses derrière ta famille et tes amis. Tu arrives dans un nouveau pays avec de nouveaux entraîneurs, de nouveaux coéquipiers, une nouvelle langue ! C’était difficile au début. Je me suis embarqué dans une grande aventure et j’ai beaucoup appris. J’adore ça. J’aime tout ce qui entoure l’équipe, c’est tellement professionnel. On nous offre le déjeuner et le dîner chaque jour. Ils prennent vraiment soin de nous.
Alexandre Alain
Le style de vie du junior ressemble beaucoup à celui-ci. Mais j’ai dû apprendre à être un pro. Comment préparer ton corps. Des fois, au niveau junior, on revient de l’école, on arrive à l’aréna, on s’habille et on saute sur la glace tout de suite. Chez les pros, c’est un vrai travail. On voit comment les vétérans se préparent avant chaque match, comment ils gèrent leurs après-matchs. On doit faire comme eux. On doit apprendre de ces vétérans et on en a plusieurs excellents dans l’équipe. Ils nous aident beaucoup.
Jake Evans
Tu dois apprendre à devenir constant quand tu es un professionnel. C’est différent quand on va aussi à l’école. Maintenant, on est payés pour jouer et on rêve toujours de passer à la prochaine étape. Tu ne peux jamais prendre de journée de congé où tu manges mal et où tu dors mal.
Alexandre Alain
Je suis des cours en ligne de l’Université Laval. Ça m’aide à penser à autre chose que le hockey. On a le temps pendant la journée en après-midi. Ça me permet d’obtenir quelques crédits qui me serviront quand ma carrière de joueur de hockey sera terminée. J’aime faire autre chose que le hockey, et pour moi, ça fonctionne. Je veux travailler en santé plus tard, mais en ce moment, je suis des cours en entrepreneuriat pour développer des outils qui me serviront dans ma deuxième carrière.
(longue pause)
Jake Evans
Honnêtement, je pensais à chacun des vétérans. Il n’y a pas de sous-groupes des plus jeunes et des plus vieux. Ils nous invitent à manger avec eux sur la route, et tout ça.
Alexandre Alain
Je pensais que chez les pros, il y aurait des sous-groupes de joueurs qui se tiennent ensemble. C’est sûr que certains s’entendent mieux, mais tout le monde se mélange bien, tout le monde se parle. On a une belle chimie.
Jake Evans
Quand on est sur la route pour manger, il n’y a jamais un petit groupe qui part de son côté. On est toujours un gros groupe qui va au même restaurant, même si ce restaurant ne plaît pas à tout le monde.
Jake Evans
Intense. Mais il utilise son intensité pour faire sortir le meilleur de nous. Il essaie de donner une identité à notre équipe, et elle prend forme. On travaille fort, on est difficiles à affronter. Son intensité a été bonne pour de jeunes joueurs comme nous.
Lukas Vejdemo
Il est exigeant, c’est sûr. J’étais habitué à des entraîneurs plus tranquilles en Suède. C’était nouveau pour moi au début, mais il veut vraiment que l’on s’améliore et qu’on s’approche de notre but. Parfois, tu te dis qu’il est trop dur avec nous, mais au fond, il veut seulement que l’on devienne meilleurs et que l’équipe soit meilleure.
Alexandre Alain
Il a été mon entraîneur pendant deux ans aussi au niveau junior. Il n’a pas changé du tout. Il est passionné. Parfois, au début, certains se demandent ce qui se passe avec cet entraîneur parce qu’il est quelque chose. Mais après quelques mois, tu apprends à le connaître et tu comprends qu’on est importants à ses yeux. C’est noir ou blanc. Si tu fais les bonnes choses, il va te le dire, si tu fais les mauvaises choses, tu vas apprendre, car il va te le dire aussi.