Infrastructures

La Ville craint les risques de rupture

Malgré les études et l’expérience de nombreuses municipalités importantes qui démontrent que les conduites en PVC subissent moins de ruptures que celles fabriquées en fonte ductile ou en tout autre matériau, la crainte de rupture soudaine d’une conduite et des conséquences sur la vie quotidienne des Montréalais est au cœur des « critères restrictifs » établis par les experts de la Ville de Montréal. Entrevue avec Marc Blanchet, directeur général adjoint au développement à la Ville de Montréal. 

Pourquoi exclure les conduites en PVC du centre-ville ?

C’est lié à une analyse de risques. Les conduites en PVC sont plus sensibles aux chocs et aux mouvements du sol. Quand le sol bouge autour, il arrive qu’elles cassent. Et lorsqu’il y a une rupture, les conduites en PVC ont tendance à se fissurer de manière longitudinale. Avec la pression dans la conduite, ça fait des dégâts spectaculaires. Ce n’est pas que ce n’est pas un bon matériau. Mais il y a tellement de choses dans le sous-sol de la ville et on creuse souvent pour réparer pour le gaz, l’électricité. En intervenant autour de ces conduites, dans des réseaux souterrains fortement maillés, et très denses, comme au centre-ville, le niveau de risque est plus élevé de faire des dégâts.

Et pour le réseau principal ?

On part du même raisonnement. On parle des très grosses conduites. En cas de rupture, les dommages peuvent être très importants. Le problème, c’est qu’on arrive moins à détecter les fuites d’eau, avec ce matériau-là. Dans d’autres cas, on peut détecter le niveau d’usure d’une conduite et la remplacer avant que survienne la rupture. Avec le PVC, c’est plus difficile de les repérer. Quand ça brise, on le sait seulement quand il est déjà trop tard. Si c’est une grosse conduite du réseau principal, cela a des conséquences importantes pour la population.

Et ce n’est pas le cas avec les conduites de fonte ?

Oui, mais sur les grosses conduites en fonte, les fuites sont plus faciles à détecter et on a plus de chances d’intervenir avant qu’elles ne brisent. L’enjeu est différent sur les plus petites conduites. Même si on ne peut pas détecter une fuite sur une petite conduite en PVC et qu’elle se rompt, on n’aura pas autant de dégâts, parce que le débit d’eau est moins élevé que sur le réseau principal.

Qu’est-ce qu’une conduite de « hiérarchisation élevée » ?

Ce sont des conduites situées sous les principales artères et voies de circulation de Montréal. Dans leurs recommandations, les experts de la Ville invoquent un niveau de tolérance faible de la population face aux travaux de réparation pour étendre les restrictions à ces secteurs. Bien que les experts affirment qu’elles soient rares, les ruptures dans le PVC, quand elles se produisent, peuvent être qualifiées de majeures. Elles nécessitent le remplacement de plusieurs mètres de la conduite et une étendue importante de terrassement si on compare à d’autres matériaux, et des délais plus longs, comparativement à une intervention sur une conduite en fonte ductile.

Sachant que la tolérance à la conséquence des ruptures et au délai de réparation n’est pas égale partout – et elle est faible quand il s’agit de voies fortement sollicitées, notamment, les voies de desserte, etc. – il est recommandé de ne pas utiliser ce matériau pour les conduites de hiérarchisation élevée.

Et que vient faire la profondeur minimale de gel dans tout ça ?

C’est une question d’exploitation, qui n’est pas liée aux fuites. À Montréal, indique le rapport d’experts, « plusieurs conduites de la Direction de l’eau potable (DEP) sont installées au-dessus de la profondeur de pénétration du gel (1,8 m). Les conduites en PVC étant vulnérables aux variations de température (coefficient d’expansion thermique élevé), elles doivent être installées en deçà de la profondeur de pénétration du gel ». Les travaux d’excavation majeurs nécessaires pour augmenter la profondeur du réseau, à ces endroits, entraîneraient « des coûts supplémentaires et des contraintes additionnelles dans un sous-sol encombré ». Les portions de réseaux qui sont les moins profondément enfouies, surtout dans les plus vieux quartiers de la Ville, seraient donc aussi exclues des contrats ouverts aux tuyaux de PVC.

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