Génie

SNC-Lavalin :  « Il faut vite tourner la page ! »

Les firmes de génie-conseil souhaitent « un dénouement rapide » dans l’affaire SNC-Lavalin pour « enfin tourner la page » après des années de tourmente.

« La situation est inquiétante, affirme d’emblée le président de l’Association des firmes de génie-conseil – Québec, André Rainville. Les risques sont réels de créer des dommages importants pour l’industrie, particulièrement au Québec. Nous sommes préoccupés. »

« Il est normal d’être préoccupé, tout comme l’ensemble des Québécois, par le sort de la multinationale et de ses employés », précise de son côté la présidente de l’Ordre des ingénieurs du Québec, Kathy Baig.

Chose certaine, insiste André Rainville, dans la mesure où SNC-Lavalin parviendra à se relancer au terme de ses nombreux démêlés, il faudra « faire les choses comme il se doit [afin que] ceux qui ont commis des crimes économiques soient punis ».

« On voudrait que les employés de l’entreprise qui n’ont rien à voir avec ces crimes puissent continuer de gagner honnêtement leur vie et que la compagnie soit sauvegardée au bénéfice de ses actionnaires, et de l’économie du Québec, ajoute-t-il. Notre industrie a besoin d’un fleuron de cette envergure pour continuer de rayonner partout dans le monde. »

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Nombre d’ingénieurs employés de SNC-Lavalin au Québec

Source : Ordre des ingénieurs du Québec

Un accord de poursuites suspendues

Sans prendre de détour, le président de l’Association des firmes de génie-conseil estime que « si on veut bien faire les choses », il faudra permettre la conclusion d’un accord de poursuites suspendues, une mesure introduite il y a quelques mois dans le Code criminel canadien qui permettrait, dans le cas de SNC-Lavalin, la suspension des poursuites pénales.

« Sans une telle entente, indique André Rainville en évoquant un accord de réparation, on va continuer de traîner ce dossier et ça va nuire davantage à la réputation du génie-conseil québécois et à sa capacité de concurrencer dans le monde. »

Il s’inquiète d’ailleurs de voir que « la crise politique [à Ottawa] nuit à cette situation juridique et nuit à une solution ». « Il est temps que ça se règle ! », martèle-t-il, tout en déplorant les « lenteurs et les ratés » dans ce dossier. « Est-ce normal qu’après 10 ans on soit encore en train de discuter ? », demande-t-il.

« Ce serait déplorable que l’opportunisme politique prenne le dessus sur les intérêts socioéconomiques. On devrait comprendre qu’il y a des emplois en jeu ! »

— André Rainville, président de l’Association des firmes de génie-conseil

Un autre son de cloche

Le professeur Germain Belzile, de HEC Montréal, ne voit pas les choses de la même manière. Il croit même que ce serait une erreur d’accorder des « privilèges spéciaux » à SNC-Lavalin dans le but de soustraire l’entreprise à ses obligations légales.

« Il ne faut pas commencer à faire du cas par cas, affirme-t-il, et à dire que cette entreprise est trop importante, trop grosse, pour s’écrouler. Tout le monde doit être traité de la même façon, c’est aussi simple que cela. »

Il ajoute : « Mais là, d’après ce que je comprends, on cherche à donner une tape sur les doigts des dirigeants et pas de punition pour la compagnie ! »

Faut-il craindre pour l’avenir de la plus importante firme d’ingénierie au Canada ?

« S’ils font faillite éventuellement ou diminuent radicalement de taille [si on leur interdit d’avoir des contrats avec le gouvernement fédéral à cause des poursuites], dit-il, ça fera juste une autre opportunité pour d’autres entreprises d’ingénierie qui pourront prendre le relais. »

Il précise sa pensée : « Je pense qu’il faut qu’on arrête au Québec de sauver ce qu’on considère comme des fleurons ! Il faut favoriser la concurrence. »

En conclusion, le professeur, également chercheur associé à l’Institut économique de Montréal, rappelle que Lavalin a déjà fait faillite, en 1991. « C’étaient deux compagnies, SNC et Lavalin, et il n’y avait pas eu de catastrophe au Québec par la suite. Les ingénieurs chez Lavalin sont allés travailler pour SNC, qui est devenue SNC-Lavalin. »

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