Élections provinciales Opinion

L’économie après le plein-emploi, ça sera quoi ?

En 2002, le gouvernement de Bernard Landry promettait aux Québécois l’atteinte du plein-emploi. Dans un document d’orientation intitulé Vers le plein emploi – horizon 2005, le Parti québécois proposait de réduire le taux de chômage de 8,6 à 7,5 %. En 2012, puis en 2014, les libéraux promettaient aussi le plein-emploi avec la création de 250 000 emplois.

Alors que le plein-emploi est maintenant atteint, que l’automatisation a fait naître de nouveaux modèles d’affaires qui bouleversent notre quotidien et que la menace des changements climatiques est beaucoup plus pressante, force est de constater que le discours économique ne s’est pas adapté aux enjeux contemporains.

Depuis au moins deux décennies, l’emploi était la priorité économique des Québécois et les partis politiques se battaient pour le titre de « parti de l’économie ».

Maintenant que le taux de chômage est à un creux historique et que l’emploi n’est plus un enjeu électoral, les propositions économiques originales se font rares et se limitent à des consensus mous, dépourvus de vision.

La voie de la facilité a été privilégiée et le discours n’a pas été réinventé.

Tous pour le nationalisme économique

Alors que les États-Unis ont récemment misé sur un allègement majeur de la fiscalité des entreprises pour stimuler la croissance, ici, aucun parti ne propose de réduire les taxes et les impôts des entreprises. À quelques nuances près, toutes les formations proposent des mesures pour mieux soutenir les entreprises à fort potentiel de croissance, pour diversifier les exportations et pour favoriser le développement de certains secteurs.

Rien de bien différent depuis au moins une décennie. Pourtant, cette recette ne nous a toujours pas permis de prendre le virage numérique avec confiance et de nous doter d’outils suffisamment performants pour faire face aux défis environnementaux.

Favoriser l’interventionnisme de l’État est une option légitime, mais elle peut s’avérer inefficace si les mesures mises de l’avant sont trop rigides ou mal adaptées aux enjeux économiques réels.

La prudence fiscale et la bulle de verre de Québec solidaire

La CAQ, le PLQ et le PQ s’entendent également sur une certaine prudence fiscale. Malgré tous les milliards qu’ils ont annoncés, ils s’engagent à ne pas augmenter le fardeau fiscal des entreprises. Avec l’incertitude mondiale qui règne, c’est une sage décision.

Seul QS propose d’augmenter considérablement les impôts des entreprises. Ils omettent toutefois d’indiquer que cela rendrait la fiscalité québécoise beaucoup plus élevée que celle qui prévaut dans tout le reste de l’Amérique du Nord. L’économie n’est pas statique et, avec leurs propositions, le risque de pousser les entreprises et les citoyens vers les autres provinces – et donc de réduire les revenus de l’État – est bien réel.

Repenser l’économie : miser sur la formation et l’efficacité énergétique ?

Le sujet des pénuries de main-d’œuvre a été abordé principalement sous l’angle de l’attraction, de l’intégration et de la rétention des immigrants. Ça marque l’imaginaire et c’est concret. C’est pourtant une problématique beaucoup plus globale et complexe qui appelle à des changements de paradigmes dans presque tous les champs d’action de l’État.

Les programmes de développement favorisent encore les projets qui promettent de créer des emplois alors que les entreprises s’arrachent les talents ; les mesures d’Emploi-Québec sont encore orientées vers l’employabilité des travailleurs plutôt que la modernisation des pratiques d’embauche et de formation des entreprises ; et la mise à jour des programmes collégiaux prend encore plus d’une demi-décennie.

L’environnement a encore été abordé comme si c’était une contrainte au développement économique.

En misant sur la transition énergétique et la décarbonisation de l’économie, il est toutefois possible de concilier économie et environnement. Cela implique une profonde remise en question de nos habitudes de consommation d’énergie. C’est loin d’être simple, et donc peu attirant comme thème de campagne électorale.

Que nous proposent les différentes formations politiques pour que l’énergie renouvelable produite au Québec puisse, un jour, répondre à la majorité de nos besoins ? Comment migrer vers une réelle culture de l’efficacité énergétique pour soutenir le développement régional ?

La complexité de ces sujets et la tentation de la facilité ont malheureusement transformé l’occasion de présenter une vision renouvelée et moderne du développement économique québécois en rendez-vous reporté… à une prochaine fois.

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