Compressions budgétaires

Les psychologues du public dénoncent l’« érosion » de leurs services

Les compressions budgétaires du gouvernement ont largement érodé les services psychologiques dans le réseau public, selon un sondage de l’Association des psychologues du Québec (APQ) obtenu par La Presse.

L’Association estime que les listes d’attente sont si longues que de nombreux patients préfèrent consulter un psychologue au privé. « On parle de 9 à 12 mois d’attente dans plusieurs établissements publics. On se questionne vraiment à savoir si le ministre Barrette ne procède pas de façon déguisée à une privatisation de nos services », dénonce le président de l’APQ, Charles Roy.

Suppression de postes

En mars, l’APQ a mené un sondage auprès de ses membres pour connaître les répercussions des récentes compressions budgétaires sur leur travail. « On a été surpris par l’ampleur de l’érosion des services qui est rapportée », affirme M. Roy. Par exemple, des postes de psychologues sont remplacés par des postes de travailleurs sociaux ou d’intervenants psychosociaux. « Les postes de psychologues sont ainsi abolis. Comme ça, on ne les comptabilise pas comme des postes vacants et on peut dire qu’il n’y a pas de pénurie », dénonce M. Roy. Selon lui, la pénurie de psychologues est ainsi apparemment en voie de se résorber, mais dans les faits, « c’est l’accès aux services psychologiques qui s’érode ».

Services diminués

Selon le sondage de l’APQ, dans différents établissements, les psychologues qui partent en congé de maladie ou de maternité ne sont pas remplacés « sous prétexte qu’il n’est pas possible de trouver des remplaçants ». Les psychologues restants voient leur tâche s’alourdir. Beaucoup disent subir des pressions pour voir rapidement les clients sur les listes d’attente. « Pour y arriver, on compresse les services offerts à nos clients réguliers », dit M. Roy.

Longue attente

Même s’il estime que les patients en grande détresse reçoivent des services psychologiques rapidement dans le réseau public, M. Roy mentionne que plusieurs patients attendent trop longtemps avant de recevoir de l’aide. Certains psychologues rapportent par exemple un an d’attente dans des services en santé mentale jeunesse, voire trois ans pour l’évaluation de troubles de déficit de l’attention et de troubles d’apprentissage. Dans l’intervalle, bien des patients souffrent dans leur vie personnelle, sont moins productifs et voient leur état se dégrader, énumère M. Roy.

Favoriser le privé

Selon M. Roy, le recrutement de psychologues au public est difficile, car la rémunération n’est pas encore concurrentielle par rapport à celle du secteur privé. À preuve, seulement 25 % des nouveaux diplômés en psychologie se tournent vers le réseau public. Découragés par les longues listes d’attente au public, de nombreux médecins dirigent également leurs patients ayant besoin de services psychologiques vers le privé, selon l’APQ. M. Roy déplore que la clientèle la plus démunie en pâtisse et que la baisse du nombre de patients orientés par les médecins soit perçue par certains gestionnaires comme une baisse des besoins. « En fragilisant les services publics de psychologie, on encourage le privé. Est-ce la volonté du ministre ? Si oui, il devrait le dire. Car c’est ce qui se passe », dit-il.

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