« Les coûts des retours sont énormes »
Vous commandez en ligne une jupe en taille petit, sur le site de l’Aubainerie. Votre paquet arrive. Mauvaise surprise : la jupe, de la collection Fashionista, est trop serrée. Elle a été conçue pour un tour de taille de 68,5 cm. Vous avez pourtant une jupe Airoldi en taille petit – aussi achetée à l’Aubainerie – qui ne vous empêche pas de respirer. Elle a été coupée pour une taille de 71 cm. Eh oui, les grandeurs varient selon les collections, dans une même enseigne.
Il faut idéalement se mesurer, puis consulter le guide des tailles de la boutique en ligne, avant de commander. Une tâche rebutante, souvent escamotée.
Cela n’empêche pas les Québécois de magasiner : ils ont dépensé 8 milliards de dollars en ligne en 2015, selon le Centre facilitant la recherche et l’innovation dans les organisations (CEFRIO). Près de 30 % des adultes ont fait un achat par internet dans la catégorie « vêtements, chaussures, bijoux et accessoires ».
Pourquoi hésiter, quand les retours de marchandise sont souvent gratuits – c’est le cas à l’Aubainerie, chez Simons, Gap, etc. ? Gratuits pour vous, pas pour le marchand. « Les coûts des retours sont énormes, indique Marie-Ève Faust, directrice de l’École supérieure de mode ESG-UQAM. Énormes. »
Au début des années 2000, Mme Faust a calculé qu’un retour de commande (téléphonique, à l’époque) coûtait 10,80 $ au commerçant. Il faut non seulement payer les frais de port, mais ouvrir les paquets, étiqueter les vêtements, les presser et tenter de les revendre, souvent au rabais.
« Les consommateurs retournent environ 40 % de ce qu’ils achètent en ligne, principalement en raison de tailles inadéquates. »
— Le magazine Time dans son numéro du 12 au 19 septembre 2016
« C’est plus de 40 %, près de 50 % », estime Mme Faust.
En cabine d’essayage, « 48 % des gens essaient le même item en deux tailles », rapporte-t-elle. Plusieurs font pareil quand ils commandent en ligne, essayant dans leur salon. « C’est un échec en partant », soupire Mme Faust. Évidemment, rares sont les clients qui conservent un vêtement en deux tailles différentes.
Les retours, « on ne considère pas du tout ça comme un problème, parce qu’on a une bonne base de notre clientèle qui est loyale, fait valoir Jean-Sébastien Pilotte, directeur du commerce électronique à l’Aubainerie. J’imagine qu’elle a l’habitude de nos tailles ».
Est-ce un enjeu chez Simons, où les tailles diffèrent aussi selon les collections (plus petites pour Twik qui vise les jeunes, plus amples pour Contemporaine qui s’adresse aux femmes de 30 ans et plus) ? Il n’a pas été possible de le savoir. Peter Simons, président-directeur général de l’entreprise, n’a pas eu le temps de répondre à nos questions et personne d’autre de la maison n’a été autorisé à le faire.