Comme le montre une enquête publiée hier par La Presse, des agriculteurs malades montent au front afin que le parkinson et les lymphomes non hodgkiniens soient reconnus comme des maladies professionnelles par la Commission des normes, de l’équité, de la santé et de la sécurité du travail (CNESST). En France, ces agriculteurs seraient indemnisés par leur assureur.

Lors d’une période des questions qui s’est tenue exceptionnellement hier, alors que le gouvernement imposait le bâillon pour adopter le projet de loi visant à réformer le système d’immigration, le ministre du Travail, de l’Emploi et de la Solidarité sociale du Québec, Jean Boulet, a affirmé qu’il y avait une « révision fondamentale » au sein de son ministère pour revoir la liste des maladies professionnelles.

« Ces gens-là se sentent abandonnés, n’ont pas d’assurance et surtout pas de reconnaissance. […] Ils ont besoin d’aide », a d’abord déploré le député péquiste Sylvain Roy.

INTENTION DE MODIFIER LA LOI

« J’ai donné l’instruction à la [CNESST] de revoir l’annexe 1 de la Loi sur les accidents du travail […], qui fait une liste de toutes les maladies professionnelles, et [de celles] reliées aux pesticides. […] On a vraiment l’intention de modifier la loi pour mettre à jour cette annexe [et] répondre aux besoins des agriculteurs », a répondu le ministre Boulet.

« Tant la loi [sur la santé et la sécurité] que la loi sur les accidents du travail […] ont été adoptées en 1979 et en 1985. Elles n’ont pas été modifiées depuis. La réforme du régime de santé et sécurité du travail s’impose », a-t-il ajouté.

Le ministre de l’Agriculture, des Pêcheries et de l’Alimentation, André Lamontagne, a quant à lui assuré qu’il était « très sensible à toute la question de la santé des agriculteurs » et que « tout ce qui peut être fait pour [leur] venir en aide, en soutien, [le] gouvernement va le faire ».

Après la période des questions, hier matin, les leaders parlementaires des groupes de l’opposition ont demandé au président de l’Assemblée nationale, François Paradis, de statuer si le gouvernement pouvait imposer deux bâillons de suite avec une seule et même motion.

Le président, saisi de cette délicate question, a mis plusieurs heures avant de confirmer que le gouvernement pouvait procéder comme il l’avait annoncé. Ce délai a considérablement retardé le début de la procédure législative d’exception, expression officielle pour désigner un bâillon.

M. Paradis a finalement invité les députés à se joindre à lui pour réformer le parlementarisme lors de rencontres subséquentes.

Legault « très bien » avec le recours au bâillon

Le bâillon, que le gouvernement utilisera à nouveau aujourd’hui pour faire adopter son projet de loi sur la laïcité, prévoit un temps de parole limité pour accélérer le processus menant à l’adoption d’une loi.

À ce sujet, le premier ministre du Québec, François Legault, a dit hier qu’il se sentait « très bien » d’utiliser le bâillon pour adopter deux projets de loi controversés après une seule année de mandat.

« Est-ce que d’avoir 200 heures [de discussions supplémentaires] ajoutera quelque chose au débat ? Je ne pense pas. On est rendus à l’étape de voter. Tout ce qui avait à être dit a été dit. »

— François Legault, premier ministre du Québec

Pour le leader parlementaire de Québec solidaire, Gabriel Nadeau-Dubois, « la Coalition avenir Québec regarde les sondages […] et conclut qu’ils peuvent faire ce qu’ils veulent.  »

« Or, ce n’est pas le cas. Nous ne sommes pas dans une monarchie élective. François Legault n’est pas le roi du Québec, et Simon Jolin-Barrette n’est pas son prince », a-t-il ajouté, affirmant que « le pouvoir […] monte à la tête » de François Legault.

« Ce n’est pas une journée agréable pour le Québec. C’est une journée triste pour les Québécois et pour notre Assemblée nationale. »

— Sébastien Proulx, leader parlementaire du Parti libéral

« Ce qu’on déplore, c’est le fait qu’on entend beaucoup le ministre dire en entrevue que c’est l’obstruction des libéraux qui nous amène ici. On a assisté aux commissions parlementaires, et il y a peu de collaboration de la part du ministre », a quant à lui affirmé la députée péquiste Méganne Perry Mélançon. 

Ultime tentative pour les dossiers non traités

Le projet de loi 9, qui réforme le système d’immigration, revoit les critères de sélection des immigrants au Québec pour s’arrimer aux besoins du marché du travail. Québec annule également quelque 18 000 dossiers d’immigration non traités qui avaient été déposés avant une réforme du précédent gouvernement libéral et qui devaient être analysés selon le principe du premier arrivé, premier servi. 

Dans une ultime tentative, hier, les partis de l’opposition ont demandé à Québec de poursuivre le traitement de ces dossiers, ou à tout le moins de ceux qui concernent des travailleurs temporaires déjà installés au Québec.

« Si on doit traiter ces dossiers, on [doit le faire] selon les anciens critères. [Or, ces critères] ne répondent pas aux besoins du marché du travail », leur a répondu le premier ministre Legault, hier.

Dans son projet de loi, le gouvernement caquiste pose aussi les balises à l’instauration d’un éventuel test de valeurs et de connaissance du français, ainsi que des conditions à l’obtention de la résidence permanente.