Opinion

L’enseignement à l’ère de la super communication

Une des raisons, parmi tant d’autres, pour lesquelles l’enseignement devient de plus en plus une profession difficile et mal aimée, est la surutilisation des modes de communication contemporains.

Jadis, lorsqu’un parent voulait avoir des nouvelles du parcours scolaire de son enfant, dans un premier temps, il posait tout simplement des questions à celui-ci. Si le besoin se présentait, il allait par la suite rencontrer son ou ses enseignants à la rencontre des parents. Stratégie classique et efficace.

Maintenant, grâce au clavier, beaucoup de parents sautent la discussion avec leurs enfants et la rencontre de parents, et vont directement à la solution « courriels ». Ce qu’ils oublient cependant est que les enseignants (particulièrement au secondaire) ont beaucoup d’élèves, dont un bon nombre ayant des besoins particuliers. Cela, jumelé aux préparations de cours, aux corrections, aux comités, au grand nombre de groupes et aux attentes parentales spécifiques, fait en sorte que la tâche est amplement pleine, voire surchargée.

La communication avec les parents via le courriel est efficace, mais peut devenir très lourde pour l’enseignant. Souvent ce sont pères et mères séparés qui veulent des informations personnalisées. L’enseignant doit passer d’innombrables heures à réfléchir, écrire et doser ses dires pour ne pas offenser, contrarier ou déstabiliser certains parents. Tous savent aussi que les textos nous mènent rarement au fond des choses et qu’ils peuvent être interprétés de façons différentes. Les escalades ne sont pas rares.

Les écoles mettent en place de plus en plus de systèmes qui facilitent la communication avec les parents. L’intention est noble, mais du même souffle, elle déresponsabilise inconsciemment ceux-ci dans leur rôle d’éducateurs.

Plus les outils seront performants et rapides pour communiquer, moins les parents vont développer une relation verbale intime avec leurs enfants. Le phénomène existe déjà tout autour de nous.

Personnellement, j’ai élevé une fille et un fils. Tout au long de leur parcours scolaire, à travers monts et vaux, comme bien des parents, j’ai suivi leur progression non en communiquant nécessairement avec leurs enseignants, mais plutôt en ouvrant des discussions sur une base régulière et constante.

Je suis chanceux. Ma fille a une maîtrise en administration et mon fils est en train de terminer un bac en génie électrique. Encore aujourd’hui, je discute régulièrement avec mon garçon concernant ses études. C’est une priorité. Je connais les résultats de ses examens et même ses devoirs. Je suis peut-être de la vieille école, mais pour moi, la communication la plus efficace est verbale et « d’homme à homme ».

Dans cette ère du « texto roi », il y a peut-être une réflexion à faire concernant la communication classique. Si plus de parents parlaient ouvertement et directement à leurs enfants de leur parcours scolaire et créaient des balises, peut-être que la situation des enseignants serait meilleure.

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