OPINION SYSTÈME DE SANTÉ

Un demi-siècle de débordement des urgences

Les problèmes, autant que les solutions, sont sur le terrain

Lorsque je terminais ma formation en chirurgie à l’hôpital Notre-Dame vers la fin des années 60, il arrivait régulièrement que les urgences débordent.

L’équipe traitante faisait du slalom entre les civières et le médecin coordonnateur des urgences, appelé en catastrophe et parfois au milieu de la nuit, appliquait la seule mesure de désengorgement disponible : il demandait au directeur médical d’annuler les admissions du jour pour « vider les urgences », au grand dam des équipes de médecine et de chirurgie qui voyaient leurs activités cliniques et académiques chambardées.

L’attrait de la salle des urgences est facile à comprendre.

Le patient, puisqu’il faut l’appeler par son nom, moyennant un temps d’attente qui peut encore s’améliorer, dispose en un temps record d’un accès au médecin, au plateau technique de l’investigation et au traitement. Pendant plusieurs décennies cette situation a perduré, jusqu’au jour où on a réalisé que la salle des urgences n’est pas un appendice de l’hôpital et qu’elle doit être intégrée comme une unité de soins à part entière.

L’amélioration, malgré un véritable effort de coordination et des mesures coercitives inefficaces, n’a pas été substantielle et on a enfin réalisé qu’il fallait attaquer le problème en amont.

C’est là que nous en sommes : l’organisation de la première ligne, impliquant généralistes et spécialistes, pour prendre en charge les patients qui ne doivent pas passer par les urgences, pourront se concentrer et se limiter à leur mission première.

Cette réorganisation doit venir d’abord des médecins, en collaboration étroite avec les divers intervenants et l’administration, et non de façon encore coercitive d’un ministère qui ne s’est jamais adapté et d’un ministre qui poursuit dans la même voie.

Les problèmes sont sur le terrain et les solutions sont aussi sur le terrain. Pour avoir travaillé durant 40 ans dans le système public auquel je crois et auquel je tiens, je peux affirmer qu’il y a beaucoup de gens qui ont à cœur de l’améliorer, qui sont des travailleurs assidus, déterminés, créatifs et qui sont prêts à se serrer les coudes pour y arriver.

Le leadership viendra d’eux et le ministre en soutien devra se faire rassembleur et créer un climat de détente, de bonne entente et de coopération, plutôt que de favoriser encore et toujours l’affrontement, le recours légal et une gestion à distance avec des manettes ministérielles.

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