prestation de serment de la CAQ

Legault appelle ses députés à faire preuve d’« humilité »

QUÉBEC — François Legault a appelé ses députés à faire preuve d’« humilité » et à s’élever « au-dessus des considérations partisanes », hier, au terme de leur prestation de serment. Ses élus ont d’ailleurs promis un changement de ton à l’Assemblée nationale.

Les 74 élus de la Coalition avenir Québec (CAQ) sont officiellement devenus députés lors d’une cérémonie au Salon rouge. Ce faisant, ils ont mis fin à l’hégémonie du Parti libéral et du Parti québécois, qui se partageaient le pouvoir à l’Assemblée nationale depuis 48 ans.

Visiblement ému par moments, le premier ministre désigné a rendu hommage à son caucus, qui compte maintenant 74 députés, dont 51 nouveaux élus et 28 femmes. Il a souligné l’apport des députés issus de l’Action démocratique du Québec, qui a fusionné avec son parti.

« Quand on a lancé la CAQ, il y a presque sept ans, j’avais échappé quelques mots qui ont été souvent repris en disant “on verra”, a relaté M. Legault. Aujourd’hui, on voit. »

« proches des québécois »

Dans un discours à ses troupes, le chef caquiste leur a rappelé le « privilège » d’exercer la fonction de député. Il a demandé à son équipe de faire preuve d’« humilité » et d’« écoute ».

« Si on a été élus en si grand nombre, c’est parce qu’on a été proches des préoccupations des Québécois, a déclaré M. Legault. Donc la première chose que je vous demande pour les quatre prochaines années […], c’est de rester proches des Québécois, rester proches des préoccupations des Québécois. »

Le premier ministre désigné a rappelé qu’un député devait représenter l’ensemble des citoyens, et non seulement ses partisans. Il a ainsi promis de gouverner pour tous les Québécois, peu importe leur allégeance politique.

« Comme vous, désormais, je parle aussi au nom des électeurs péquistes, libéraux, solidaires qui n’ont pas voté pour moi et qui habitent chez moi. Donc on doit être conscients de ça. Ça nous oblige à nous élever au-dessus des considérations partisanes dans l’intérêt supérieur du Québec et de nos concitoyens. »

— François Legault

M. Legault n’a pas fourni de détails quant aux priorités de son gouvernement. Il présentera son Conseil des ministres demain.

Le chef de la CAQ est désormais le doyen de l’Assemblée nationale. Il a promis d’agir comme « mentor » auprès de ses députés.

« Il y a une leçon que j’ai tirée de cette campagne électorale, c’est qu’on peut reconnaître qu’on fait une erreur », a-t-il déclaré, faisant référence au cafouillage sur l’immigration pendant la campagne.

« C’est vrai pour moi, c’est vrai pour vous : les Québécois ne s’attendent pas à ce qu’on soit parfaits, ils s’attendent à ce qu’on les écoute, puis qu’on fasse de notre mieux, qu’on s’améliore, qu’on se retrousse les manches pour les aider. On a le droit de faire des erreurs. »

Des échanges plus cordiaux ?

Comme pour faire écho au discours de leur chef, les nouveaux députés de la CAQ ont promis des échanges plus cordiaux à l’Assemblée nationale à la reprise des travaux parlementaires.

Le député de Beauce-Sud, Samuel Poulin, a promis que le gouvernement caquiste se montrerait ouvert au dialogue avec l’opposition. Selon le jeune élu, ce changement s’impose pour restaurer la confiance des Québécois, qui a pu être ébranlée ces dernières années par la nature des débats au Salon bleu.

« Lorsqu’il y a des groupes [d’étudiants] qui étaient en haut, moi, j’étais gêné par moments de voir la façon dont ça pouvait se comporter, a relaté M. Poulin. Alors, oui, on a une responsabilité comme député de faire en sorte que les travaux parlementaires se passent mieux, que ce soit moins acrimonieux. »

Un premier coup de balai chez les hauts fonctionnaires

Un ex-péquiste est nommé au poste stratégique des communications gouvernementales

QUÉBEC — Le gouvernement de François Legault s’installe aux commandes. Une longue liste de mandarins associés au régime Couillard seront dégommés dès demain, à l’issue de la première réunion du nouveau Conseil des ministres. La plupart ne perdent pas leur emploi – ils ont acquis depuis longtemps une permanence –, mais ils se retrouvent dans un purgatoire sans affectation dans l’immédiat.

Premier geste, François Legault nomme un secrétaire général adjoint aux communications – un poste où, de tout temps, on a nommé des gens en symbiose avec les orientations du gouvernement. Le choix s’est porté sur Michel Léveillé, ex-directeur des communications du Parti québécois (PQ) et du cabinet de Gilles Duceppe à Ottawa, a appris La Presse.

M. Léveillé avait quitté l’univers politique pour la Croix-Rouge en 2001, jusqu’en 2005. Après un passage chez Optimum communications (Cossette), il est revenu à la Croix-Rouge en 2008, où il a été directeur général pour le Québec jusqu’en 2015. Il dirigeait l’équipe nationale des communications de la Croix-Rouge jusqu’en septembre dernier, moment où il s’est retrouvé au sein d’une firme de relations publiques de Montréal, Syrus Réputation.

Comme « secrétaire général associé aux communications », il remplace Christian Lessard, issu du cabinet de Jean Charest, qui avait dirigé les campagnes de Philippe Couillard à la direction en 2013 et aux élections en 2014. M. Lessard avait passé quelques années à la Société générale de financement, à Investissement Québec et dans le secteur privé.

nouveau « chef du protocole »

On nommera aussi un nouveau « chef du protocole », autre fonction stratégique. Elizabeth Rody était responsable du protocole au Parlement fédéral, un poste où elle gérait les visites de chefs d’État et de dignitaires. Le poste relève du ministère des Relations internationales, et correspond à celui d’un sous-ministre adjoint depuis 20 ans. Il était occupé par des hauts fonctionnaires « de confiance » pour le gouvernement Couillard – Marie-Claire Ouellet, ex-secrétaire aux communications sous Jean Charest, puis, plus récemment, Johanne Whittom, issue du cabinet de Philippe Couillard.

Un autre mandarin sera déplacé : Pierre Hamelin, secrétaire aux priorités, ancien chef de cabinet de Michel Audet, ministre des Finances sous Jean Charest. Une autre victime de la purge, à plus long terme cette fois : Marlen Carter, qui avait travaillé longtemps avec André Fortier aux emplois supérieurs. Fortier, devenu premier fonctionnaire après le départ de Roberto Iglesias, est aussi délogé, un déplacement prévisible. Son successeur Yves Ouellet était la dernière nomination du gouvernement Couillard, la semaine dernière, pour permettre au nouveau régime de se mettre en place.

C’était hier soir la réception de départ de Luc Monty, sous-ministre aux Finances, qui deviendra directeur général de la Ville de Québec, à 317 000 $ par année. M. Monty sera probablement remplacé par Pierre Côté, sous-ministre adjoint aux Finances, un ministère qui sera confié à Éric Girard, ex-trésorier de la Banque Nationale. Dans les cercles d’initiés, certains savent qu’Éric Ducharme, président de l’Agence du revenu, convoitait aussi le poste. Ce dernier, tout en relevant des Finances, en menait large dans les dossiers économiques sous Pauline Marois et pourrait aboutir de ce côté.

Autres changements

Mais la plupart des sous-ministres qui ont eu hier un coup de fil de M. Ouellet se sont fait annoncer qu’ils n’auraient pas à faire leurs boîtes pour un « nouveau défi ». Des sous-ministres vont toutefois changer, à court terme ; ceux-là étaient « rencontrés » au conseil exécutif, mais surtout aux bureaux de la Société québécoise des infrastructures que dirigeait M. Ouellet jusqu’à la semaine dernière.

D’abord Michel Fontaine, à la Santé, qui est identifié à Gaétan Barrette – il était à ses côtés en commission parlementaire pendant des heures pour l’étude de quatre projets de loi controversés. Il était déjà au bord de la retraite, mais aurait préféré rester. On suppute déjà sur son successeur ; les parieurs misent sur Michel Delamarre, ancien sous-ministre adjoint à la Santé, actuellement à la barre du CIUSSS de la Capitale-Nationale.

Une autre qui risque d’avoir à changer d’horizon : Sylvie Barcelo, à l’Éducation. La CAQ pense à scinder l’Éducation et l’Enseignement supérieur pour faire en sorte que les cégeps et les universités soient davantage au diapason avec le secteur privé. Là encore, un nom circule : Simon Bergeron, déjà sous-ministre adjoint à l’Éducation.

Jocelyn Dumas, sous-ministre à l’Économie, ancien chef de cabinet de Daniel Johnson, sera aussi déplacé.

sociétés d’état

Dans les sociétés d’État, François Legault ne tardera pas à remplacer Michael Penner, président du conseil d’administration d’Hydro-Québec. Étroitement associé à Philippe Couillard, M. Penner avait donné un coup de main au Parti libéral du Québec (PLQ) pour tenter de cibler des candidats aux dernières élections. Il avait aussi eu des frictions avec Éric Martel, PDG d’Hydro-Québec qui sera adoubé par la nouvelle administration. Un autre verra bientôt le couperet tomber : Pierre-Gabriel Côté, à Investissement Québec – à chaque occasion, François Legault revient sur un coup de barre nécessaire, à son avis, à Investissement Québec.

Les ministres seront nommés demain, mais déjà, les chefs de cabinet sont pour la plupart déterminés. Ancien député péquiste et ex-président du PQ, Jonathan Valois deviendra chef de cabinet – il souhaite hériter des dossiers de la Famille. Marie-Ève Bédard, ex-candidate du PLQ et chef de cabinet du libéral Yves Bolduc, dirigera aussi un cabinet. On parle d’un retour à Québec d’Isabelle Lewis, ex-attachée de presse de Richard Legendre et ex-ministre péquiste sous Lucien Bouchard. Elle serait directrice des communications dans un cabinet.

La Presse a indiqué hier qu’Alexandre Ramacieri serait chef de cabinet. Il dirigera, semble-t-il, l’équipe de Pierre Fitzgibbon, nommé ministre de l’Économie. Jean-Luc Benoît, longtemps dans l’orbite de Mario Dumont à l’Action démocratique du Québec, et passé par la suite dans les cabinets conservateurs à Ottawa, aura aussi un cabinet à gérer.

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