Industrie du cannabis médical

Première incursion de l’industrie du tabac dans le pot

Pour la première fois depuis les débuts de la légalisation, un géant mondial de l’industrie du tabac vient de se lancer ouvertement dans le marché de la marijuana, en achetant deux producteurs de cannabis canadiens.

La transaction, qui suscite l’inquiétude de groupes de lutte contre le tabagisme, implique Alliance One International, un des quatre plus importants marchands indépendants de feuilles de tabac au monde.

Ce géant, qui dit dans ses communiqués s’être donné la mission de « transformer les vies des gens de façon à ce que nous cultivions ensemble un monde meilleur », a discrètement annoncé la semaine dernière avoir acquis 75 % de Canada’s Island Garden, un producteur de cannabis médical de l’Île-du-Prince-Edouard. Il a aussi acheté 80 % de Goldleaf Pham, de Toronto, un producteur en attente d’une licence de Santé Canada. Le prix des transactions n’a pas été dévoilé.

Ces acquisitions permettent à la multinationale du tabac active dans 90 pays de mettre la main sur « 1 million de pieds carrés d’espace de production d’ici trois ans », ce qui représente selon elle « une opportunité de devenir une compagnie de cannabis véritablement internationale », écrit-elle dans un communiqué.

« Ces produits promettent généralement de meilleures marges de rendement que celles de nos activités principales » liées au tabac, ajoute l’entreprise.

« Pas socialement responsables »

La transaction fait sursauter les groupes de lutte contre le tabagisme, qui craignent une forme de consolidation du marché du cannabis par l’industrie du tabac. « Ce sont des compagnies qui, à la base, ne sont pas socialement responsables, même quand elles se donnent une mission très cute de créer un monde meilleur, affirme Émilie Dansereau-Trahan, porte-parole de l’Association pour la santé publique du Québec. Elles ont démontré par le passé que c’est uniquement le profit qui les motive, aux dépens de bonnes pratiques sociales et environnementales. »

Lors d’un récent passage devant la Conseil du patronat du Québec, le PDG d’Imperial Tobacco Canada, Jorge Araya, avait déclaré que son entreprise n’avait « aucun plan ou intérêt, quel qu’il soit, d’entrer dans le marché du cannabis ». « Notre position n’a pas changé. Notre priorité est de continuer à développer des produits alternatifs et moins potentiellement nocifs dans le but d’offrir une alternative aux cigarettes traditionnelles pour les consommateurs qui le désirent », affirme le directeur des affaires corporatives de l’entreprise, Éric Gagnon.

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