Éducation financière au secondaire

Trop tard pour la prochaine rentrée

Le ministre de l’Éducation, Sébastien Proulx, vient d’approuver un nouveau cours pour initier les élèves de 5e secondaire aux finances personnelles, pour la prochaine rentrée scolaire, mais il est trop tard pour que les écoles le mettent au programme.

Les commissions scolaires ont reçu l’information la semaine dernière seulement, alors que les choix de cours pour la prochaine année sont généralement faits en février.

« Il ne sera pas possible d’offrir ce cours optionnel dans nos écoles pour septembre 2016 », indique la présidente de la Commission scolaire de Montréal (CSDM), Catherine Harel Bourdon. « Nos grilles horaires sont préparées en janvier au plus tard, parce qu’on doit ensuite consulter les conseils d’établissement et faire les inscriptions aux cours en février ou mars. »

Le cours d’éducation économique, autrefois obligatoire pour les élèves en dernière année du secondaire, est disparu du programme scolaire en 2009, une décision décriée dans les milieux de la finance et de la protection des consommateurs.

« C’est essentiel d’initier tous les élèves aux concepts financiers de base, surtout qu’ils sont happés dès le secondaire par la société de consommation : on leur offre des cartes de crédit, ils rêvent de s’acheter une voiture. »

— Philippe Viel, porte-parole de l’Union des consommateurs

L’Union des consommateurs, qui a contribué à la conception du nouveau cours, avec d’autres intervenants à l’invitation de l’Autorité des marchés financiers (AMF), se réjouit qu’il ait enfin été autorisé, mais déplore qu’il ne soit pas obligatoire.

Le PDG du Conseil du patronat du Québec (CPQ), Yves-Thomas Dorval, est du même avis : il a interpellé il y a quelques jours la ministre de l’Économie du Québec, Dominique Anglade, pour qu’elle sensibilise le Conseil des ministres à l’importance de rendre l’éducation économique obligatoire au secondaire.

Mme Anglade a répondu qu’elle était préoccupée par la question, mais que la décision relevait de son collègue à l’Éducation.

L’économie, les finances personnelles et les notions d’entrepreneuriat devraient avoir une plus grande place dans les écoles, et avant la 5e secondaire, selon Yves-Thomas Dorval. « Au-delà des objectifs de carrière, ce sont des connaissances de base utiles à tous les citoyens, dit-il. Même un élève qui se destine au domaine artistique doit savoir comment fonctionnent les entreprises culturelles, ce que ça implique d’être travailleur autonome, l’importance de l’épargne ou les règles du crédit, pour prendre des décisions plus éclairées. »

OUTIL ANTIDÉCROCHAGE

Initier les adolescents plus tôt à la gestion budgétaire pourrait même aider à lutter contre le décrochage scolaire, estime M. Dorval. Catherine Harel-Bourdon fait la même réflexion. « Si les jeunes apprenaient à 14 ans à faire un budget, avec le coût réel d’un logement, de la nourriture et des autres factures, et se demandaient comment payer tout ça en travaillant au salaire minimum, ça les motiverait à terminer leur secondaire et à poursuivre leurs études pour obtenir un meilleur revenu, souligne-t-elle. Il n’y a rien de plus efficace que d’être placé devant la réalité. »

Malgré la disparition de l’éducation économique obligatoire, certaines écoles, privées et publiques, ont continué d’offrir des cours et des activités touchant les questions d’argent et d’entrepreneuriat aux élèves de différents niveaux, comme le programme Jeunes entreprises. Le collège Mont-Saint-Louis, dans le nord de l’île de Montréal, par exemple, offre toujours un cours d’éducation économique optionnel en 5e secondaire. Environ le tiers des élèves le choisissent.

L’ancien cours d’économie comportait 100 heures, alors que le nouveau en compte la moitié moins. Son contenu est plus près de la réalité des jeunes : on leur enseignera l’importance de l’épargne et de l’équilibre du budget, les dangers du crédit, les choix de consommation et le fonctionnement du marché du travail, notamment, plutôt que de s’attarder aux grands concepts économiques comme l’offre et la demande ou l’inflation.

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