Pluies abondantes du printemps

Vers un été noir de moustiques

Même s’ils ne mesurent que quelques millimètres, ils peuvent être envahissants et gâcher bien des soirées d’été. Et 2017 pourrait être une année record pour les moustiques, mouches noires, brûlots et autres insectes piqueurs, compte tenu des pluies abondantes du printemps, prévient un microbiologiste.

« Cet été, ça va être un millésime ! », lance Jacques Boisvert, professeur retraité de l’Université du Québec à Trois-Rivières (UQTR) et chercheur sur les insectes piqueurs. « Il y a eu beaucoup d’eau pour faire des mares à moustiques. Le niveau d’eau des lacs est très haut comme tout le monde sait, et à la décharge des lacs, c’est là que les mouches noires se reproduisent. On n’est pas sortis de l’auberge », ajoute-t-il.

Toutes les régions du Québec risquent d’être prises d’assaut par les moustiques, ce qui constitue une suite logique à la crue historique des eaux, croit M. Boisvert. Le gouvernement du Québec évalue qu’il y a eu 261 municipalités touchées et plus de 5000 résidences inondées. Les terres imbibées sont autant de milieux propices à une augmentation du nombre de moustiques.

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Nombre d’espèces de moustiques recensées au Québec, selon le microbiologiste Jacques Boisvert

De ce nombre, sept ou huit espèces seulement seraient des insectes piqueurs ; toutes les autres bourdonnent autour de nos têtes, nous obligent à balayer l’air de nos mains, mais elles ne s’abreuvent pas de notre sang.

MARINGOUINS ÉLECTORAUX

À Terrebonne, au nord-est de Montréal, les maringouins se sont même invités dans la campagne électorale municipale qui s’amorce. Dimanche dernier, le candidat à la mairie de l’Alliance démocratique Terrebonne (ADT), Marc-André Plante, a pris « l’engagement ferme » de recourir à l’arrosage biologique pour contrôler les insectes piqueurs, s’il est élu en novembre prochain.

Cette promesse est une réaction à la décision de l’administration du maire par intérim, Stéphane Berthe, d’abolir le contrôle biologique des insectes piqueurs ainsi que la taxe de 30 $ qui y était associée. Au cours des dernières années, la Ville de Terrebonne a pourtant vanté l’efficacité de son programme de contrôle biologique qui, disait-elle dans ses communications publiques, est « sans danger pour les humains et les animaux »

« Ça peut paraître étonnant mais ici, c’est un enjeu électoral important. Dans le porte-à-porte que mon équipe et moi faisons, les citoyens nous en parlent beaucoup », soutient M. Plante. « Sans arrosage, les soirées sur la terrasse peuvent devenir un enfer. Une dame d’une garderie en milieu familial m’a même dit qu’elle va restreindre les sorties dehors avec les enfants, cet été », raconte-t-il.

CONTRÔLE BIOLOGIQUE

Le microbiologiste Jacques Boisvert soutient que l’arrosage de produits larvicides à base de Bacillus thuringiensis israelensis (Bti) est « très efficace et le plus sécuritaire connu jusqu’à maintenant ». 

« Il reste des études à faire mais si c’est bien fait, cela permet de réduire les insectes piqueurs de façon significative. En Allemagne, les bordures du Rhin sont arrosées depuis plus de 25 ans », explique M. Boisvert.

Des exemples de lutte contre les moustiques

Au Québec

Selon le microbiologiste Jacques Boisvert, une soixantaine de municipalités utilisent des produits biologiques pour donner un répit à leurs citoyens. « Il y a un gros apport économique lié à l’utilisation du Bti. J’ai en tête l’exemple d’un commerçant de piscines qui réussissait à en vendre juste assez pour vivre mais qui a prospéré lorsque les moustiques ont été contrôlés. Même chose pour les ligues de balle molle qui peuvent avoir des activités après 18 h lorsqu’il y a de l’arrosage », affirme Jacques Boisvert.

Châteauguay

À Châteauguay, on estime que le Bti permet de réduire de plus de 90 % le nombre de moustiques. Une ligne de signalement des milieux propices à l’éclosion des larves, Info-moustiques, est même en place. La municipalité de La Tuque fait aussi l’arrosage biologique de son territoire depuis 1994 et Mont-Tremblant, depuis 2005.

Trois-Rivières

À Trois-Rivières, l’épandage des pouponnières à insectes piqueurs a commencé au début du mois de mai dans les secteurs les plus touchés. Les traitements se font par voies terrestre et aérienne et coûteront 1,1 million (taxe de 37 $ par porte).

Winnipeg

En 2016, la Ville de Winnipeg, au Manitoba, qui est traversée par deux rivières (Rouge et Assiniboine), a connu une augmentation très importante des moustiques printaniers. L’utilisation de larvicides n’avait pas donné les effets escomptés. Du coup, les autorités ont décidé de lancer une opération de fumigation au malathion, un produit considéré comme cancérigène.

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