Entrevue avec Jean-François Lisée

Matériel scolaire gratuit pour les élèves

Le chef du PQ fait sienne une promesse d’Alexandre Cloutier

QUÉBEC — Alexandre Cloutier a perdu la course à la direction du Parti québécois (PQ), mais pas toute son influence. Jean-François Lisée fait sienne sa promesse d’offrir gratuitement le matériel scolaire aux élèves du primaire et du secondaire. Il ouvre également la porte à la gratuité de la garderie pour les enfants de 4 ans.

Il n’y aurait pas de baisse d’impôt sous un gouvernement péquiste, mais Jean-François Lisée s’engage à limiter toute hausse de tarif à la croissance du revenu des familles.

Certes, « la classe moyenne paie trop d’impôt », a reconnu le chef du PQ en entrevue à La Presse. Mais il ne prévoit pas d’allégements fiscaux « dans l’avenir prévisible ». Car il y a urgence « que nos enfants aient des psychoéducateurs et des orthophonistes, que les CPE soient correctement financés, que nos 40 000 aînés dans les CHSLD ne soient pas sur le bord de la maltraitance comme l’a dit Me [Jean-Pierre] Ménard », avocat spécialisé en droit de la santé. « C’est ça, les priorités des Québécois », a-t-il soutenu.

Lors de la campagne électorale, « François Legault et Philippe Couillard vont proposer des baisses d’impôt, et moi, je vais proposer la qualité des services avec le fardeau fiscal qu’on a maintenant ».

Vers une « vraie gratuité »

Néanmoins, il propose des mesures pour soulager les contribuables, en particulier les familles.

Il veut « établir une vraie gratuité scolaire ». La facture relayée en début d’année aux parents pour le matériel contrevient au principe énoncé dans la loi, selon lui. Lors de la campagne à la direction, Alexandre Cloutier a tenu le même discours. Il a proposé d’offrir une trousse d’effets scolaires gratuitement aux élèves du primaire et du secondaire. Le député de Lac-Saint-Jean a évalué le coût de sa promesse à 130 millions par année.

Cette mesure et d’autres signées Alexandre Cloutier « vont devenir des propositions du Parti québécois », a indiqué M. Lisée. 

« Alléger le fardeau de la classe moyenne, c’est aussi en rendant l’éducation davantage gratuite qu’elle ne l’est maintenant, il n’y a pas juste les baisses d’impôt. »

— Jean-François Lisée

Quant aux tarifs, « ça ne devrait jamais augmenter plus rapidement que le revenu médian des ménages », selon le chef péquiste. On parle d’une hausse annuelle de 1 à 3 %, en tenant compte des statistiques depuis 2013. « Et si on est en récession et que le revenu médian des ménages baisse, bien les tarifs devraient baisser. »

La mesure ne sort pas de nulle part. Pour régler la crise étudiante, le gouvernement Marois avait décidé d’harmoniser la hausse annuelle des droits de scolarité à la croissance du revenu disponible des ménages. La facture des étudiants a donc augmenté ainsi au fil des ans : 

2013-2014 : 2,6 %

2014-2015 : 2,2 %

2015-2016 : 0,9 %

2016-2017 : 1,5 %

Changements pour les garderies

« C’est sûr » qu’un gouvernement péquiste réviserait la tarification des services de garde. Le gouvernement Couillard a décidé de moduler le tarif selon le revenu, une décision qui s’avère un « échec », selon le chef péquiste. Des CPE ont des places inoccupées parce qu’il est devenu plus avantageux pour certains parents de fréquenter une garderie non subventionnée et de toucher un crédit d’impôt, a-t-il fait valoir.

Le PQ rétablirait-il un tarif unique ou changerait-il la modulation ? « On va remettre ça à plat et faire une proposition pour 2018 », s’est contenté de répondre M. Lisée.

Il a avancé lui-même, au cours de l’entrevue, l’idée que la garderie soit gratuite pour les enfants de 4 ans. Le Conseil supérieur de l’éducation, un organisme qui formule des avis au gouvernement, a recommandé cette mesure en 2012, a relevé le chef péquiste.

« C’est vrai qu’il y a une logique là. Si on fait un pas vers la gratuité, c’est sûr que ce serait la priorité de le faire sur le 4 ans. Mais ça va être dans une discussion globale sur comment on revoit la tarification. »

Il dit avoir « une difficulté » avec le double standard actuel : des enfants de 4 ans qui ont accès gratuitement à la maternelle dans certains milieux et d’autres qui fréquentent les services de garde payants. « Il nous semble qu’il y a une logique de prolonger la gratuité scolaire », a-t-il plaidé.

Haro sur la revente de permis

Le chef péquiste veut mettre fin au « marché secondaire des permis » de garderie privée. Des propriétaires revendent leur permis pour plus de 2 millions. C’est sans compter la valeur de l’immeuble. Ce qui fait grimper les enchères, c’est les places subventionnées qui accompagnent le permis. Il s’agit d’une forme de revenu garanti par l’État, auquel on associe un bon rendement. « Cette spéculation, ça n’aurait dû jamais exister. C’est un service que l’État a délégué à des gens. Il ne devrait pas y avoir de spéculation sur l’enseignement de nos jeunes enfants », a soutenu M. Lisée. Un gouvernement péquiste ferait en sorte qu’un permis de garderie privée subventionnée ne puisse être transféré qu’à l’État ou à un CPE. Un propriétaire ne pourrait vendre à personne d’autre. M. Lisée entend également « geler » la création de nouvelles places dans le privé pour favoriser le développement des CPE, « étouffés » par le gouvernement Couillard.

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