la marche pas à pas

Marcher est une activité naturelle. Il y a pourtant plein de choses à apprendre pour pouvoir marcher de façon efficace. Un tout nouveau bouquin vient donner de nombreux trucs pour améliorer sa performance. Mais encore faut-il savoir pourquoi il faut marcher. Ça tombe bien, un autre livre explore les bienfaits de la marche pour la santé, l’environnement, la société et l’âme.

Un dossier de Marie Tison

Comment marcher ?

Pour l’auteur Jean-Yves Cloutier, il n’y a rien de pire qu’une personne bien motivée qui commence à marcher quotidiennement et qui abandonne après deux semaines parce qu’elle se décourage ou parce que ses genoux la font souffrir.

« Nous voulons donner un cadre aux gens, déclare-t-il en entrevue. Nous voulons que les gens soient motivés longtemps en évitant les erreurs. »

Il y a quelques années, M. Cloutier a écrit Courir au bon rythme, une référence dans le domaine de la course à pied avec des programmes d’entraînement visant tous les types de coureurs. Avec Lyne Jolicoeur, qui a parcouru le chemin de Compostelle à quatre reprises, il a décidé de répéter l’exercice pour les marcheurs. « En faisant des recherches, nous avons réalisé qu’il n’y avait pas de programmes d’entraînement pour la marche, indique M. Cloutier. La plupart des gens qui se préparent pour le Kilimandjaro ou Compostelle improvisent leur entraînement. »

Les programmes d’entraînement constituent donc le cœur de Marcher au bon rythme. « Les gens ne sont pas obligés de les suivre à la lettre, précise M. Cloutier. Mais ils peuvent s’y référer et se dire :  “OK, je ne suis pas dans le champ”. »

Trois programmes, quatre niveaux

Les auteurs ont créé trois programmes qui se déclinent chacun en quatre niveaux, de façon à rejoindre à peu près tout le monde. On trouve ainsi un programme de mise en forme, un programme de préparation à la longue randonnée et un programme d’entraînement avec intervalles.

C’est ce dernier programme, destiné aux amateurs de marche rapide, qui a donné le plus de fil à retordre aux auteurs. Il a fallu déterminer la vitesse de base et la vitesse des intervalles rapides. « J’ai établi cela avec un entraîneur de marche olympique, Jocelyn Ruest, note M. Cloutier. Nous avons testé ces programmes-là. Dans notre sport, il faut éviter l’improvisation. »

Les auteurs consacrent quelques pages aux bienfaits de la marche pour la santé. Ils suggèrent également quelques trucs pour garder sa motivation, à commencer par les podomètres, bracelets et applications qui permettent de compter ses pas. 

« C’est une belle source de motivation pour les gens. Des gens vont faire des détours pour atteindre leur objectif, que ce soit 10 000 pas par jour, ou 8000, ou 7500. »

— L’auteur Jean-Yves Cloutier

Les auteurs consacrent finalement plusieurs chapitres à ce qu’ils appellent leur boîte à outils : des conseils sur les vêtements à porter, les chaussures, le sac à dos et les bâtons. Ils offrent également des suggestions de collations à apporter et donnent finalement des recommandations spécifiques au sujet de la marche par temps froid, par temps chaud et par grand vent.

Les auteurs se veulent « pratico-pratiques ». Pas question de stigmatiser les gens sédentaires. « Nous ne sommes pas là pour dire aux gens qu’ils auront des problèmes de santé s’ils ne marchent pas. Nous voulons simplement donner des façons de les stimuler pour sortir de la maison. »

Pas question non plus de compliquer les choses avec « des idées scientifiques et des mots à 100 piastres ». « Il s’agit de vulgariser la matière pour que les gens améliorent leur mode de vie. »

Marcher au bon rythme

Jean-Yves Clouter et Lyne Jolicoeur

Les Éditions La Presse

190 pages

Pourquoi marcher ?

Rédacteur en chef d’un magazine canadien-anglais au début des années 2010, le journaliste Dan Rubinstein traversait une période difficile. « Autant d’un point de vue personnel que professionnel, je me sentais perdu, désenchanté, raconte-t-il en entrevue. Je cherchais une solution. »

Déjà passionné de marche, il prend connaissance d’études scientifiques sur les bienfaits de la marche, entend parler de divers projets communautaires basés sur la marche. « J’ai compris qu’il y avait une histoire fascinante à raconter. »

Il se lance alors dans deux ans de voyages, de recherches et d’écriture qui donnent naissance à un essai qui vient d’être traduit en français sous le titre Un pied devant l’autre, ou comment survivre au 21e siècle grâce à la marche.

« De façon anecdotique, on sait que la marche, c’est bon pour la santé et l’environnement. Quand ça ne va pas bien au boulot, on va marcher dehors sur l’heure du midi et on se sent mieux. Or, la recherche scientifique explique pourquoi ça va bien, pourquoi la marche aide les gens à se comprendre les uns et les autres et à comprendre l’environnement. Il ne s’agit donc pas d’une simple observation superficielle. »

Il rappelle qu’à l’origine, l’être humain devait marcher pour trouver à se nourrir et à se loger, pour migrer au rythme des saisons. « Nous avons cessé de faire cela. Nous vivons dans des villes, nous passons beaucoup de temps assis à nos bureaux, ou sur le sofa, ou en voiture. Nous avons perdu ce contact avec cet élément central de notre humanité. Je pense que ça cause beaucoup de problèmes sur le plan individuel et au niveau de la société. » À son avis, il y a des avantages tangibles à marcher davantage, à développer davantage d’infrastructures favorisant la marche.

Bon pour le corps, la tête et l’âme

Pour se mettre dans le bain dès le début, Dan Rubinstein participe à une étape de la grande marche du chirurgien innu Stanley Vollant à travers le territoire québécois. Il rencontre plus tard des vétérans américains ayant servi en Irak et en Afghanistan qui tentent d’atténuer leur choc post-traumatique en parcourant le sentier des Appalaches. À Glasgow, en Écosse, des organisations communautaires préparent des marches pour améliorer la santé mentale des habitants de la « ville la plus malsaine du Royaume-Uni ».

Si la marche est bonne pour la santé physique et mentale, elle est aussi bénéfique pour la société. Dan Rubinstein accompagne notamment des policiers qui effectuent des patrouilles à pied dans un quartier dur de Philadelphie. Les premières statistiques semblent montrer une diminution de la criminalité depuis le début de cette initiative.

L’auteur souligne que la marche a toujours joué un rôle central dans la politique, rappelant les grandes marches qui ont marqué le combat pour les droits civiques aux États-Unis et le bon vieux porte-à-porte des politiciens.

Les grands pèlerinages, comme  le chemin de Compostelle, illustrent de leur côté l’importance de la marche dans le domaine de la spiritualité, de l’âme.

Dan Rubinstein avoue qu’il a été un peu plus difficile d’écrire un chapitre sur les effets de la marche sur la créativité. Des chercheurs estiment toutefois que le cerveau de l’humain et sa capacité à penser de façon créative se sont développés à peu près au même moment où il devenait bipède. Le chapitre sur l’économie a également été un peu ardu, mais ce thème était particulièrement important.

Évidemment, une population en santé coûte moins cher en soins de santé. Mais M. Rubinstein montre aussi que la valeur foncière d’un quartier augmente lorsque la communauté se montre favorable à la marche.

Dans son livre, l’auteur traite essentiellement de la marche urbaine et semi-urbaine, et non pas de randonnée en montagne. « J’aime beaucoup la randonnée, mais il faut réaliser que 80 % de la population canadienne vit dans les villes. Il n’est pas nécessaire de prendre l’auto ou le train pour aller marcher. Il est possible de marcher là où on est, dans sa communauté. »

Il livre finalement un vibrant plaidoyer en faveur de la marche vers l’école. Il raconte toutefois comment une voiture les a renversés, lui et sa fillette, alors qu’il accompagnait celle-ci à l’école à pied. Heureusement, ils n’ont pas été gravement blessés. La conductrice du véhicule sport utilitaire venait d’aller reconduire son fils à l’école…

Un pied devant l’autre, ou comment survivre au 21e siècle grâce à la marche

Dan Rubinstein

Québec Amérique 294 pages

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