Recherche et innovation

La nouvelle stratégie du Québec sous la loupe

Elle était réclamée avec de plus en plus d’impatience par le milieu scientifique québécois. Après des années de vide, la ministre Dominique Anglade a annoncé à la mi-mai la nouvelle stratégie québécoise pour la recherche et l’innovation – ou SQRI, pour les intimes. Que contient-elle ? Comment est-elle accueillie ? Les points saillants.

585 millions

D’abord, la taille. Les mesures de la nouvelle SQRI totalisent 585 millions sur cinq ans. En guise de comparaison, la Politique nationale sur la recherche et l’innovation (PNRI) du gouvernement Marois, qui avait été mise sur la voie de garage à l’élection du gouvernement Couillard, annonçait une enveloppe de 941 millions, aussi sur cinq ans.

« La différence, c’est que moi, j’ai des crédits. La SQRI est financée de A à Z, contrairement à la PNRI », a plaidé en entrevue à La Presse la ministre de l’Économie, de la Science et de l’Innovation, Dominique Anglade.

Au-delà de la guerre de chiffres, Frédéric Bouchard, président de l’Association francophone pour le savoir (Acfas), estime que la SQRI « se donne les moyens de ses ambitions ».

De cette somme…

133 millions serviront à améliorer les compétences, notamment en finançant des stages en entreprise, en bonifiant l’enseignement des sciences et en soutenant divers organismes de culture scientifique ;

267 millions serviront à « accroître la capacité de recherche », notamment en finançant des projets particuliers, en soutenant l’innovation en entreprise et en finançant les regroupements de chercheurs ;

185 millions s’attaqueront à la commercialisation de la recherche, l’obsession du Québec. Pas moins de 100 millions sont misés sur l’intelligence artificielle, LE secteur qui a le vent dans les voiles actuellement.

Les fonds de recherche refinancés

À la grande joie de Frédéric Bouchard, président de l’Acfas, le financement des trois grands fonds de recherche du Québec est bonifié et, surtout, assuré pour les cinq prochaines années.

« On tenait absolument à une stratégie sur plusieurs années parce que ça permet aux chercheurs, aux organismes et aux universités de planifier leur développement », a-t-il dit à La Presse.

Ensemble, les trois fonds (santé, société et culture, nature et technologies) recevront 20 millions de plus l’an prochain, puis 40 millions de plus par année jusqu’en 2022. Ces sommes permettront de combler les baisses encaissées au cours des dernières années.

Une aide bonifiée

Financement des trois Fonds de recherche du Québec

Viser le top 10 mondial

Le Québec traîne la patte dans plusieurs domaines de la recherche et du développement (R-D). La SQRI veut ramener la province dans le top 10 de l’OCDE pour plusieurs indicateurs. Aperçu de sa position actuelle :

Ils ont dit...

La stratégie a été généralement bien accueillie. L’exception notable vient de la Fédération québécoise des professeures et professeurs d’université, qui juge les orientations trop « économiques et commerciales ».

« La plus grande portion des fonds de recherche annoncés est destinée à satisfaire les besoins immédiats des entreprises ou les priorités de l’État, ce qui témoigne d’une vision à courte vue de la recherche. »

— Jean-Marie Lafortune, président de la Fédération québécoise des professeures et professeurs d’université, dans un communiqué

« Je comprends qu’il y a une association qui aurait aimé qu’on reste dans le passé. Mais nous, on regarde vers l’avant. […] Cœurs sensibles s’abstenir. Il faut, un moment donné, qu’on aille dans une direction claire où on va aller performer. »

— Dominique Anglade, à La Presse, à propos de la réaction de la Fédération québécoise des professeures et professeurs d’université

« Il va maintenant falloir travailler très étroitement avec nos partenaires universitaires et collégiaux. Il va falloir faire l’arrimage entre la formation des étudiants et les programmes de recherche, et ça va certainement nécessiter du travail. »

— Rémi Quirion, scientifique en chef du Québec, en entrevue à La Presse

« Mme Anglade a livré la marchandise. La stratégie affirme l’importance de la diversité de la recherche. Maintenant, on a hâte de voir le plan d’action détaillé qui mettra en œuvre les orientations et on va rester vigilant, mais les intentions sont claires. » — Frédéric Bouchard, président de l’Acafs, à La Presse

« Le plus gros problème est la commercialisation, mais la solution n’est pas juste de mettre de l’argent dans la commercialisation. La solution est aussi d’investir dans la relève et dans la recherche fondamentale. » — Dominique Anglade, à La Presse

« La nouvelle SQRI propose un éventail de solutions qui permettra au Québec de prendre sa place et de devenir un leader mondial. Soulignons, entre autres, la place accordée aux marchés publics comme premier acheteur pour les jeunes entreprises innovantes. »

— Pascal Monette, PDG de l’Association pour le développement de la recherche et de l’innovation du Québec, dans un communiqué

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