Clin d’oeil

« Ce n’est pas la bonne année pour soumettre au maire un projet de calèches tirées par des pitbulls. »

— Un entrepreneur

OPINION : COURSE À LA DIRECTION DU PARTI QUÉBÉCOIS

Un moment charnière de notre scène politique

Rien ne va plus au pays des patriotes. Le Parti québécois, à l’image d’ailleurs du Québec de la dernière décennie, se trouve aujourd’hui à la croisée des chemins. À l’instar de notre nation qui, voyant ses repères collectifs s’estomper en même temps que son rêve de devenir un État, se questionne quant à l’articulation de son identité dans l’espace public, le PQ de 2016 se voit, lui aussi, face à un nœud quant à son identité propre dont le dénouement entraînera sa survie ou sa lente et douloureuse agonie.

Si cette course qui s’achève a semblé polariser et diviser plus que jamais un parti que ses ennemis, de plus en plus nombreux, condamnent allègrement à l’obsolescence, c’est qu’au-delà d’un concours de personnalité teinté de bon-ententisme quant à la gestion de l’intendance de la province, c’était la pertinence du ciment unificateur de la grande coalition péquiste qu’est le projet indépendantiste qui était remise en question.

Entendons-nous : il était absolument nécessaire que le Parti québécois ne se contente pas d’un insipide couronnement.

Si les hautes instances du parti ont comme préoccupation première leur réélection et que leur appui quasi unanime au candidat s’inscrivant le plus harmonieusement en continuité avec la recette que nous a servie le PQ depuis la démission de Bernard Landry (recette qui ne fut guère électoralement fructueuse, notons-le), une proportion non négligeable des membres, épuisés de militer pour une organisation en déclin, ont plutôt pris acte de l’importance vitale de sortir le navire du marécage dans lequel son esprit velléitaire quant à son projet fondateur l’a plongé.

Dans un monde où le grand carnaval du libéralisme mondialisant règne en maître, où même le pape, plus protestant que John Locke lui-même, en appelle à « abattre les frontières » et où, parallèlement, les grands États-nations d’Europe se préoccupent plus que jamais de la sauvegarde de leur souveraineté nationale, le parti souhaitant créer une nouvelle frontière et donner à son peuple la souveraineté doit en effet impérativement faire preuve, s’il veut survivre, de volonté, de courage et d’originalité dans ses positions politiques fondamentales. À cet égard, ce que ses détracteurs nommèrent de la chicane tout au long de la course était bien davantage un débat difficile, émotif, certes, mais ô combien nécessaire.

L’issue de ce débat sera connue ce soir. Il s’agit sans aucun doute d’un moment charnière qui teintera fortement l’évolution prochaine de la scène partisane québécoise et qui scellera possiblement l’avenir du Parti québécois. Peut-être survivra-t-il et continuera-t-il de porter le flambeau de la nation, gardant son identité propre, regagnant son statut de pôle d’attraction des patriotes et participant à la préservation et au développement de l’exceptionnalité québécoise en Amérique. Peut-être aussi prendra-t-il le chemin de la mort glorieuse et fracassante de l’idéaliste usé, portant à bout de bras un projet qu’il n’arrivera à renouveler ni formellement ni fondamentalement pour le rendre réalisable dans un avenir prévisible.

LENTE AGONIE

Peut-être finalement, et cela me semble le scénario le plus pénible, agonisera-t-il longtemps et péniblement en échouant à porter un projet distinctif, porteur de puissance et d’espoir pour les gens d’ici, le diluant dans l’océan idéologique libéral anglo-protestant qui s’impose comme une hégémonie politique dénationalisante à l’échelle occidentale.

Dans tous les cas, que l’on soit indépendantiste ou non, les temps sont décisifs pour la suite des choses et pour l’avenir de notre nation embryonnaire. Plusieurs forces politiques montantes n’attendent que le déraillement final pour purger le Québec de ce qui lui reste de volonté de puissance.

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