Alimentation

Les charcuteries sans nitrites, un choix santé ?

Olymel fait un pas dans le monde des charcuteries sans nitrites avec des jambons et de la dinde tranchés exempts de cet ingrédient associé à une augmentation du risque de cancer. Comment s’y retrouver parmi les produits traditionnels et ceux qui s’affichent comme des choix santé ?

Du Breton a sa gamme bio. Maple Leafs a sa « Natural Selections ». Olymel a désormais deux jambons et de la dinde tranchés « sans aucun nitrite ni phosphate », comme c’est écrit sur l’emballage. Ce qui ne signifie pas forcément que ces trois produits sont équivalents.

Les nouvelles viandes d’Olymel ont été lancées en septembre dans le but de répondre à une préoccupation grandissante des consommateurs, selon Lise Gagnon, vice-présidente marketing, recherche et développement. « Un consommateur québécois sur deux a réduit sa consommation de charcuteries ou cessé d’en manger en raison de la présence de nitrites », dit-elle.

« Les nitrites sont connus pour causer le cancer, rappelle Satinder Kraur Brar, chimiste rattachée à l’Institut national de recherche scientifique. C’est établi. » Ce qui pose problème avec les nitrites, c’est qu’ils peuvent se transformer en nitrosamines, qui, eux, sont cancérogènes.

Les nitrites ajoutés aux charcuteries comme les viandes à sandwich servent essentiellement à deux choses :  à limiter la prolifération des bactéries et, dans le cas du jambon, à conserver la couleur rosée qui le rend appétissant.

« On ne peut pas juste les enlever. Il fallait trouver des ingrédients qui pourraient offrir les mêmes protections, mais qui soient plus acceptables pour les consommateurs. »

— Lise Gagnon, vice-présidente chez Olymel

Olymel a opté pour un concentré d’agrumes, un extrait de grenade et des épices pour remplacer les nitrites. Du Breton utilise des extraits de légumes dans son jambon bio sans nitrites mis en marché il y a environ un an, selon Julie Lamontagne, conseillère en communications pour l’entreprise. « Si vous donnez ça à un chimiste et lui dites de trouver des nitrites là-dedans, il n’en trouvera pas, assure-t-elle. Ni naturels ni artificiels. »

Et les nitrites « naturels » ?

Le détail compte : certains produits s’affichent en effet « sans agents de conservation ajoutés », ce qui signifie souvent qu’il contient des nitrites naturels utilisés comme agents de conservation comme du sel de mer ou de l’extrait de céleri. C’est notamment le cas du jambon Maple Leafs Natural Selections. « N’importe quelle source de nitrite, même naturelle, pourrait causer le cancer, dit toutefois Satinder Kraur Brar. Ça ne dépend pas de la source. »

Les nitrites contenus dans certains légumes ne posent toutefois pas tous le même risque. La betterave en contient beaucoup, mais elle contient aussi des composés antioxydants. « Ça diminue beaucoup le risque que les composés N-nitrosés se transforment en nitrosamines », explique Marie-Josée LeBlanc, nutritionniste et coordonnatrice d’Extenso, le centre de référence en nutrition de l’Université de Montréal.

Manger des betteraves n’augmente donc pas le risque de cancer. La nutritionniste doute toutefois qu’il reste bien des antioxydants dans un concentré de jus de légumes utilisé comme agent de conservation. 

« Quand on ajoute ces produits-là dans les charcuteries, on vient ajouter des nitrites, finalement. »

— La nutritionniste Marie-Josée LeBlanc

Quel est le choix santé ? Les produits avec nitrites naturels en contiennent moins que les produits traditionnels, souligne Marie-Josée LeBlanc. « Ce n’est pas la meilleure chose à mettre dans le lunch des enfants, même s’il y a zéro nitrite », juge la nutritionniste, précisant que les charcuteries sont salées et parfois grasses.

La modération a meilleur goût, en cette matière. « Ce n’est pas la meilleure garniture pour les sandwichs, il y en a plein d’autres qu’on devrait privilégier, poursuit-elle. Mais si le jambon ne contient pas de nitrites, c’est déjà mieux. »

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