Opinion  Pascale Navarro

#ellesaussi

Nous devons en faire plus pour aider les femmes vulnérables

Le 14 octobre dernier, quatre députées de différents partis se réunissaient pour affirmer leur soutien aux femmes victimes de violence, lors d’un événement qui marquait la première année de #moiaussi, à Montréal.

Véronique Hivon (PQ), Lise Lavallée (CAQ), Hélène David (PLQ) et Ruba Ghazal (QS) prenaient la parole pour exprimer leur soutien et leur résolution à travailler de manière transpartisane pour soutenir toutes les femmes du Québec. 

Lise Lavallée, jusqu’à récemment responsable des dossiers de condition féminine pour la CAQ, a mis la table pour les prochaines années, lors du point de presse des députées : « La présente législature est historique puisque nous avons, pour la première fois, la parité à l’Assemblée nationale. Les femmes élues deviendront le relais de toutes ces femmes courageuses qui ont pris la parole et celles qui la prendront encore afin de porter leur message. » 

Femmes des marges 

C’est bien vrai que plus de femmes ont fait leur entrée à l’Assemblée nationale, et on ne peut que s’en réjouir… à condition que ce nombre se traduise par des décisions politiques qui soutiennent les autres femmes de la société.

Or, quelques jours après ce premier anniversaire de #moiaussi, la Fédération des maisons d’hébergement pour femmes (FMHF) a demandé au nouveau gouvernement de se mobiliser afin de soutenir ce réseau sous-financé. En fait, selon les chiffres du regroupement des maisons d’hébergement, de 6000 à 10 000 femmes doivent chaque année rebrousser chemin après s’être heurtées à des centres de première ligne qui affichent complet. « Que peuvent-elles faire d’autre que retourner dans leur domicile où elles risquent leur vie ? Comment peut-on les aider si on n’a pas de ressources, c’est impossible de continuer comme ça », se désespère la présidente de la FHMF, Manon Monastesse, que j’interviewai le lendemain de la conférence de presse tenue le 17 octobre. 

« Il y a 23 ans que nous avons une politique au Québec sur la question, qui se traduit par un plan d’action. Or, il manque beaucoup de ressources pour assurer aux femmes qui en ont besoin de trouver refuge. »

— Manon Monastesse, présidente de la FHMF

L’épreuve de la réalité 

À l’ère de #moiaussi, les manques criants de ressources dans les maisons d’hébergement paraissent particulièrement anachroniques. Et ils traduisent là une épreuve de la réalité pour la parité : si des femmes réussissent à se faire élire et à intégrer une « élite » politique, que feront-elles pour celles qui n’en font pas partie ? Pourront-elles travailler encore plus à améliorer les conditions de vie, voire de « survie », des femmes de la marge ? 

La Fédération des maisons d’hébergement a tenté d’obtenir un rendez-vous avec François Legault, pendant la campagne électorale, sans succès. Dans sa volonté de réduire les dépenses de l’État, il sera intéressant de voir ce que le gouvernement de la CAQ considère comme des « dépenses ». 

Logiquement, on pourrait penser que c’est sur les épaules des députées caquistes que reposera cette délicate tâche : démontrer l’urgence du dossier des manques de ressources pour les femmes victimes de violence. 

Après la sortie des quatre députées, mentionnée plus haut, pourrait-on espérer que cette tâche soit partagée ? Parmi les quatre femmes présentes, trois ont déjà été députées et fait leurs preuves quant à la défense d’enjeux d’égalité femmes-hommes. Lise Lavallée, députée de Repentigny, a suivi de près le dossier de la parité, et on peut constater que cela a porté ses fruits. 

Quant à Véronique Hivon, elle a aussi travaillé à la parité dans son parti, et proposé une solution pour traiter des violences sexuelles et conjugales (la création d’un tribunal dédié). Ruba Ghazal vient d’un parti ouvertement féministe. Hélène David, jusqu’à récemment ministre de la Condition féminine, a répondu présente pour financer la prévention de la violence sexuelle en milieu universitaire. Elle avait également annoncé des sommes pour le réseau des maisons d’hébergement, mais non pour les refuges de première ligne, ce pourquoi le FMHF se mobilise actuellement. 

Bref, on peut conclure qu’il y a une unanimité transpartisane en ce qui concerne les besoins de femmes en position de vulnérabilité. Restera à voir quels seront les obstacles qui se poseront devant elles. Il faudra que nous, citoyennes et citoyens, exigions du gouvernement qu’il soit cohérent, qu’il n’oublie pas les femmes qui sont sorties de l’ombre et celles qui y sont encore.

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