La relève verte / Korzen

Du kombucha zen

Chaque semaine, cet été, notre chroniqueuse Marie-Claude Lortie présente des entreprises de la relève dans le monde de l’agriculture et de la transformation alimentaire durable. Cette semaine, elle rencontre Julie Des Rosiers et sa mère Dominique Bouchard, de Korzen.

QUI SONT-ELLES ET D’OÙ VIENNENT-ELLES ?

Julie Des Rosiers, 37 ans, a fait des études de génie électrique à Polytechnique et travaillait jusqu’à l’an dernier pour Hydro-Québec à Montréal. Aujourd’hui, elle travaille toujours pour Hydro, mais à Beauport, près de la capitale, ce qui lui permet de vivre à Saint-Tite-des-Caps, tout juste avant l’entrée du comté de Charlevoix. Sa mère, Dominique Bouchard, mathématicienne comptable qui a fait carrière en entreprise à Montréal, native de Petite-Rivière-Saint-Francois, a acheté une terre à Saint-Tite en 2007. Puis, en 2009, elle y a fondé la Bioferme des Caps. En 2011, Julie a embarqué dans son projet et les deux femmes se sont officiellement incorporées et associées pour commencer notamment à produire du kombucha sous la marque Korzen, à la ferme. Dominique travaille à temps plein dans l’entreprise. Julie, elle, y est à temps partiel, en marge de son travail à Hydro comme ingénieure de projet. Elle a deux enfants, un conjoint, et Korzen, malgré la popularité des produits, ne lui permet pas d’aller chercher les revenus nécessaires pour vivre avec sa famille. Quand un médecin a annoncé à la mathématicienne et à celle qui est aujourd’hui ingénieure, il y a 25 ans, que Julie était atteinte de la maladie cœliaque, elles ont commencé à faire et refaire de fond en comble leur éducation sur l’alimentation, la production agroalimentaire industrielle et les méthodes alternatives, naturelles, de soin et de prévention des maladies. Leur vie a commencé à être « sans gluten » et sans produits laitiers bien avant que ce soit répandu.

LES PRODUITS

La Bioferme des Caps et sa marque Korzen sont surtout connues pour leur kombucha, cette boisson fermentée légèrement pétillante dont la consommation est actuellement en pleine croissance. Le kombucha de Julie et Dominique est fabriqué à partir de produits naturels et parfumé uniquement avec des plantes d’ici qui poussent à la ferme : mélisse, amélanche, sureau, argousier, pomme… La ferme est d’abord et avant tout un verger. Tout est fait sur place. Les deux femmes viennent d’investir dans de nouveaux équipements qui vont leur permettre d’automatiser un peu la production, jusque-là entièrement manuelle. L’image des produits a été mise à jour il y a quelques mois, ce qui a eu un impact direct sur la commercialisation, explique Julie. « On est très contentes. Le design est tripant et la nouvelle image de la marque nous ressemble. » À Montréal, on trouve ce produit dans quelques points de vente – voir sur le site korzen.ca –, mais c’est vraiment à Québec que le Korzen est le plus distribué. Pour le moment, Dominique fait la livraison à Montréal elle-même ! Elle cherche un distributeur pour la métropole ainsi que l’Estrie et les Laurentides. Julie explique qu’à court et surtout moyen terme, la Bioferme produira plus que du kombucha et étendra sa gamme de produits à d’autres dérivés de la lactofermentation, comme les vinaigres, les kimchis ou les choucroutes.

L’ENTREPRISE

Actuellement, Julie et Dominique produisent environ 2500 bouteilles de kombucha Korzen par semaine, et elles les vendent 2 $ à leurs distributeurs (elles sont vendues 3 $ au détail). Elles ont été chercher de l’aide gouvernementale fédérale et provinciale pour mener leur projet, notamment auprès d’un programme d’aide pour l’agriculture de proximité qui les a aidées avec leur site web. Elles sont aussi allées voir l’organisme Agriconseil, qui les a aiguillées vers Papille. Cette entreprise les a aidées avec leur mise en marché, notamment le changement de l’image de marque, et elle a analysé leur marché. « Selon Papille, on a un potentiel de croissance des ventes de 35 % par année. Moi, je crois que c’est plutôt 15 %, dit Dominique. Mais c’est déjà vraiment pas mal. » Actuellement, le chiffre d’affaires est de 100 000 $. « Si je me rends à 250 000 $, on est viables », dit l’entrepreneure.

L’INGRÉDIENT CRUCIAL

La nature québécoise. Ici, tout est naturel et local, à part le thé vert utilisé pour la base du kombucha. Et la marque tourne autour du caractère spécifique très québécois des ingrédients qui parfument les boissons : la pomme, l’amélanche, l’argousier, le sureau…

L’AVENIR

Dans cinq ans, Julie se voit en train de travailler à temps plein à la ferme, de vendre du kombucha, des choucroutes et des kimchis, des plats fermentés toujours conjugués avec des ingrédients qui poussent à la ferme, comme l’ail ou le raifort… Dominique, elle, espère surtout ne plus faire de gestion ou de livraison, avoir laissé tous ces aspects de l’entreprise à sa fille et être aux champs à temps plein, à faire ses boutures et à veiller sur ses arbres, ses buissons et ses plants. La Bioferme des Caps est vraiment un projet familial, piloté par deux cartésiennes qui ont néanmoins une vision holistique, alternative de la vie et de leur entreprise. Donc, dans l’avenir, la mère et la fille veulent combiner production et vente avec éducation, et aimeraient que leur ferme devienne un lieu de ressourcement et de compréhension de la nature et de l’agriculture. Elles veulent y inclure un volet éducatif. En outre, Julie entend investir et s’investir et aller chercher des revenus essentiels avec une école de thérapie cognitivo-comportementale mettant en œuvre les méthodes d’une amie travailleuse sociale pour aider les gens à atteindre « l’autonomie affective ». « On parle beaucoup de pleine conscience, de l’importance de vivre le moment présent, etc. Mais nous, on veut apprendre aux gens concrètement comment le faire », explique Julie. Un esprit sain dans un corps bien nourri. En gros, c’est leur façon de voir la vie et la mission de leur entreprise.

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