Peut-on vraiment faire repousser des légumes « à l’infini » ?
Des blogues transmettent l’idée de façon périodique : on prend le cœur d’une laitue ou la base d’un légume (chou chinois, oignon vert, poireau, fenouil, céleri ou citronnelle). On le met dans un bol avec un peu d’eau, qu’on dépose à côté de la fenêtre. Puis on attend, en changeant l’eau fréquemment.
Et, « comme par magie », les légumes repousseraient… « à l’infini ». Rien de moins ! « Imaginez avoir une offre illimitée des produits préférés de votre famille », écrit une blogueuse américaine. Bonjour les « économies » et l’« agriculture durable » !
Technicienne en biologie et représentante technique pour Les Urbainculteurs, Geneviève Bessette voit souvent passer ce genre d’articles sur l’internet. Chaque fois, elle aurait envie d’ajouter les nuances qui s’imposent. On lui en a donné l’occasion.
« Au début, c’est mignon, parce que ça repousse un peu, convient Geneviève Bessette. Mais le rendement ne sera pas suffisant. Il y a des gens qui pourraient être déçus ! »
Les légumes, rappelle-t-elle, ont besoin d’oxygène et de nutriments. On n’a qu’à penser au système hydroponique, où l’eau est oxygénée avec un diffuseur d’air et additionnée d’une solution nutritive d’engrais.
« En n’ayant aucun nutriment, les feuilles de ta laitue seront seulement composées d’eau. »
— Geneviève Bessette, technicienne en biologie
Les cellules en carence de nutriments étant vulnérables aux pathogènes, le légume risque carrément de moisir, ajoute-t-elle.
Les gens qui voudraient tenter l’expérience auraient donc avantage à placer leurs restes de légumes dans du terreau avec un peu de compost et de fertilisant. Mais encore là, la capacité du légume à repousser a des limites.
Geneviève Bessette rappelle que la majorité des plantes potagères sont des annuelles ; leur cycle de vie est déterminé par leur génétique. Qui plus est, en ayant été coupé, le légume a subi un stress qui l’incitera à produire des graines rapidement.
« Il pense que c’est la fin du monde et qu’il faut qu’il se reproduise, illustre la technicienne en biologie. Bref, tu n’auras pas le céleri comme tu l’as acheté ! »
Par contre, d’autres suggestions véhiculées dans des blogues sont réalisables, indique Geneviève Bessette, comme faire pousser dans un pot de terre une gousse d’ail ou une racine de gingembre.
Quant au céleri, au fenouil et aux oignons verts, les feuilles qui repousseront pourraient servir à parfumer une soupe, par exemple… Ou, de façon encore plus réaliste, à égayer la maison en attendant le retour du printemps.