Opinion

Une perte de poids n’est pas un spectacle

Nous avons été grandement surprises par la médiatisation du processus de perte de poids de l’humoriste Dominic Paquet, qui sera documenté pendant plusieurs semaines dans le cadre de l’émission de Julie Snyder, La semaine des 4 Julie.

Au-delà du segment sur la cryothérapie aux vertus douteuses, nous ne pouvons passer sous silence la promotion médiatique d’une perte de poids irréaliste et les propos grossophobes qui ont été prononcés à l’endroit de Dominic Paquet. 

« Tu étais à 230 livres. Faut que ça baisse ! On sent le p’tit paquet ici ! On a hâte qu’il y en ait moins ! » répète Mme Snyder en tapotant le pli de ventre de M. Paquet.

Ce ne sont là que quelques exemples.

Il faut savoir qu’il y a des conséquences négatives à l’omniprésence des commentaires dégradants sur le poids et l’apparence physique d’une personne.

À cet égard, la grossophobie est un nouveau mot qui reflète très bien cette réalité pas si nouvelle. Il a été défini en 2019 par le dictionnaire Robert comme étant l’« ensemble des attitudes et des comportements hostiles qui stigmatisent et discriminent les personnes grosses, en surpoids ou obèses ». 

D’ailleurs, la ligne est très mince entre la grossophobie et l’intimidation. En visionnant ce segment de l’émission, de nombreux téléspectateurs se sont probablement sentis stigmatisés ou jugés en raison de leur poids ou du format de leur corps. 

D’ailleurs, une étude publiée dans la revue scientifique Obesity suggère que les comportements grossophobes augmentent chez les téléspectateurs à la suite du visionnement d’un seul épisode de téléréalité mettant en vedette une perte de poids – dans ce cas-ci, on faisait référence à l’émission The Biggest Loser, traduit par Qui perd gagne au Québec.

Malheureusement, cette forme de stigmatisation dans les médias normalise la grossophobie en la rendant acceptable alors qu’elle ne l’est pas du tout. Il faut que ça cesse. Une perte de poids n’est pas un spectacle.

Il est déplorable de voir des émissions de variétés entretenir l’idée que perdre du poids est la seule et unique solution vers l’accomplissement de soi ou la santé. 

La plupart du temps, les méthodes proposées pour atteindre cet objectif sont nuisibles pour la santé physique et psychologique. Prescrire une perte de poids de 13,6 kg (30 lb) en deux mois n’est pas un objectif réaliste, contrairement à ce qui a été véhiculé dans l’émission. M. Paquet semble avoir le désir d’avoir plus d’énergie et se sentir mieux. 

Quelle belle occasion de démontrer publiquement que ses objectifs sont atteignables par des changements d’habitudes de vie sans égard au poids ! Tout être humain, peu importe son physique et son format corporel, mérite d’être traité avec professionnalisme, dignité et respect.

Nous demandons au gouvernement du Québec de modifier l’article 10 de la Charte des droits et libertés de la personne afin d’y inclure la discrimination basée sur tout critère lié à l’apparence physique, dont la taille et le poids des individus.

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