AMÉNAGEMENT ET URBANISME

Carignan soupçonné d’avoir contourné la loi

La ville de Carignan, en Montérégie, a-t-elle contourné la loi en 2012 pour autoriser un projet immobilier de 270 millions de dollars ? C’est la question soulevée par le ministère des Affaires municipales et de l’Occupation du territoire (MAMOT) après avoir reçu une plainte de citoyens de Carignan en mars 2013.

Le MAMOT ne tranche pas le débat, mais conclut que la municipalité pourrait être blâmée devant les tribunaux.

Dans une lettre transmise le 15 février dernier au directeur général de Carignan, le commissaire aux plaintes du MAMOT note que la municipalité n’a pas suivi la procédure normale pour modifier son règlement d’urbanisme. Le commissaire, Richard Villeneuve, conclut que si les « règlements [de la ville] étaient contestés devant les tribunaux, un juge pourrait possiblement considérer que la Ville aurait contourné la Loi en évitant la procédure d’approbation des personnes habiles à voter ».

Le commissaire recommande à la Ville de consulter son conseiller juridique au sujet de la validité de ses règlements adoptés en 2012 ainsi que de la procédure suivie pour les adopter, et de corriger la situation si nécessaire.

UN PROJET CONTESTÉ

Carignan avait d’abord adopté en janvier 2012 deux règlements pour modifier son zonage dans le secteur du golf Le Riviera. L’objectif était de permettre un important projet immobilier de 400 unités d’habitation évalué à 270 millions de dollars du promoteur André Simoneau.

Ces règlements devaient faire l’objet d’une procédure de consultation auprès des citoyens, mais ils ont finalement été retirés par la Ville et ne sont jamais entrés en vigueur. Celle-ci a plutôt adopté quelques mois plus tard des règlements de concordance pour se conformer au schéma d’aménagement de la MRC de la Vallée-du-Richelieu, procédure qui ne nécessite pas de consultation publique.

Le commissaire Villeneuve écrit que les nouveaux règlements adoptés par la Ville de Carignan contiennent de nombreuses dispositions qui semblent déborder de la simple obligation d’assurer la conformité au schéma d’aménagement.

« À l’époque, ça nous a donné l’impression qu’on voulait contourner la mobilisation des gens, affirme Sylvain Garneau, porte-parole du Comité de citoyens de Carignan sur le golf, groupe qui a porté plainte au MAMOT. On s’est sentis violés dans nos droits fondamentaux. »

UN ACCROC À LA DÉMOCRATIE

Ironiquement, l’actuel maire de Carignan, René Fournier, avait voté contre le projet de règlement en 2012, alors qu’il était conseiller municipal dans l’opposition. « J’avais voté contre la façon de faire à l’époque. On avait commencé par adopter un projet de règlement, puis la Ville avait trouvé une autre façon de faire. Ça me semblait un accroc à la démocratie. »

Aujourd’hui, le maire se dit cependant en faveur du projet immobilier, qui est « un beau projet pour Carignan », dit-il. Mais si des choses n’ont pas été faites correctement, ça devra être corrigé.

En entrevue avec La Presse, le promoteur André Simoneau affirme de son côté que la Ville n’avait pas l’obligation de consulter ses citoyens. « Tout a été fait dans les règles. J’ai plutôt l’impression qu’on essaie encore de stopper les choses. Pourquoi cette lettre sort-elle aujourd’hui ? Et puis, vous savez, ça se peut que le commissaire se trompe. »

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