Certificats d’exportation contrefaits

Ottawa va resserrer les exportations de bœuf et de porc pour rassurer les Chinois

D’où vient la fameuse cargaison de porc dotée d’un faux certificat canadien d’exportation dont la découverte a entraîné la fermeture des frontières chinoises aux viandes d’ici ? En attendant d’élucider cette affaire mystérieuse, la ministre fédérale de l’Agriculture et de l’Agroalimentaire, Marie-Claude Bibeau, a annoncé hier qu’elle travaillait à resserrer le système d’exportation du bœuf et du porc vers Pékin.

« Il faut mettre en place des mesures additionnelles pour rassurer les Chinois que notre système d’exportation des viandes est fiable. Quand ils vont voir un certificat canadien, ils vont avoir ce qu’il faut pour savoir que c’est un vrai, pas un faux. C’est notre priorité », a-t-elle assuré en marge d’une table ronde qui se déroulait hier après-midi à Montréal avec des acteurs des industries porcine et bovine.

En froid avec Ottawa, la Chine a suspendu toutes ses importations de produits de porc et de bœuf canadiens à la veille du sommet du G20 au Japon. Depuis la fermeture des frontières, le 25 juin, le prix de gros du porc a chuté de près de 9 % sur le marché nord-américain.

Marché noir

Cette affaire a débuté lorsque les autorités sanitaires chinoises se sont plaintes d’avoir découvert un conteneur de langues de porc contaminées à la « ractopamine » en provenance du Canada.

Le chlorhydrate de ractopamine est un produit qui peut être donné sous forme de nourriture aux porcs et aux bœufs afin d’améliorer leur gain de poids et leur teneur en viande maigre. Il est interdit en Chine, mais permis au Canada. Dans les faits, il n’est plus vraiment utilisé par les producteurs canadiens depuis plusieurs années.

En enquêtant sur cette affaire, le Canada s’est rendu compte que le certificat de l’Agence canadienne d’inspection des aliments (ACIA) rattaché au conteneur était, en fait, un faux. Le nom de l’entreprise de Saint-Hyacinthe Frigo Royal figurait par ailleurs sur le document.

« On n’est pas les premiers à voir son nom utilisé pour l’émission de faux certificats. C’est un problème mondial. C’est très rare que le Canada soit touché par cela parce qu’on a un système particulièrement fort, mais on n’est pas exempt de cela et la preuve, c’est que l’on vient d’être touchés », a expliqué la ministre Bibeau.

Cette dernière a indiqué que le porc provenait du « marché noir » et pas nécessairement du Canada. La GRC enquête d’ailleurs pour retracer les fautifs, tout comme la Chine, qui veut aller au fond des choses, assure la ministre. Le Canada et l’empire du Milieu discutent de ce dossier quotidiennement, dit-elle.

Mme Bibeau semblait par ailleurs loin d’être persuadée de l’implication de Frigo Royal. « Ce certificat-là n’a pas été émis par l’ACIA, et Frigo Royal travaille avec l’agence. Donc, ça serait extrêmement étonnant qu’ils travaillent en double. L’enquête va nous dire d’où vient la viande », a-t-elle précisé.

Selon une déclaration publiée sur le site internet de l’ambassade de Chine au Canada, 188 certificats vétérinaires contrefaits attestant de la santé de porcs ont été découverts dans la foulée de cette affaire.

L’industrie inquiète

Si cette crise perdure, les producteurs de porc risquent d’encaisser un coup dur. L’an dernier, le Québec a exporté du porc pour une valeur de 283 millions de dollars vers la Chine. Près de 25 % des exportations canadiennes de porc sont destinées au marché chinois.

Le surplus de l’offre causé par la fermeture de la frontière chinoise a déjà fait chuter le prix du porc sur le marché nord-américain, qui est passé de 79,46 $ pour 100 livres le 25 juin à 73,41 $ hier.

« C’est inquiétant, mais ce n’est pas dramatique parce que ça pourrait remonter », espère René Roy, vice-président du Conseil canadien du porc, qui a participé à la rencontre avec la ministre Bibeau et son homologue Jim Carr, ministre de la Diversification du commerce international.

Depuis le mois de mars, le marché nord-américain espérait que la demande chinoise augmente sensiblement, en raison de l’éclosion de la peste porcine africaine, maladie qui a réduit le cheptel en Chine. La décision de fermer les frontières aura donc eu l’effet inverse.

Les 18 derniers mois ont été financièrement difficiles pour les éleveurs de porcs, a indiqué M. Roy. Ils fondaient beaucoup d’espoir sur la croissance de la demande chinoise pour éponger leurs pertes récentes. « L’été dernier, le prix du porc a chuté de 50 % en raison de la guerre commerciale entre la Chine et les États-Unis », rappelle-t-il.

Depuis cette crise, les éleveurs de porcs demandent à Ottawa d’être compensés, à l’instar des fermiers américains.

De son côté, le président des Producteurs de bovins du Québec a indiqué qu’il était trop tôt pour exiger des compensations d’Ottawa.

« Est-ce que les frontières vont rouvrir aussi vite qu’on le souhaite ? On a toujours des doutes. C’est très important pour les producteurs qu’elles ouvrent le plus rapidement possible », a déclaré Claude Viel en sortant de la réunion avec les deux ministres. « La Chine, ce n’est pas notre plus gros client, mais c’est important que le gouvernement soit ouvert, si besoin il y a, à compenser », a-t-il ajouté.

Alimentation

Exceldor étend sa présence au Canada

Exceldor se tourne vers l’Ouest dans le cadre d’une alliance avec la coopérative Granny’s, présente au Manitoba et en Saskatchewan, ce qui permettra à son chiffre d’affaires de franchir la barre du milliard de dollars.

Le producteur et transformateur de volaille québécois, qui appartient à ses 265 membres, accueillera ainsi les 130 membres de son nouveau partenaire, en vertu de l’accord annoncé hier. Les recettes annuelles de Granny’s sont estimées à 160 millions de dollars. Le siège social d’Exceldor demeurera à Lévis.

« Notre objectif est de mieux servir nos clients nationaux, a expliqué le président-directeur général d’Exceldor, René Proulx, au cours d’une entrevue téléphonique. L’industrie se transforme depuis plusieurs années et ce n’est probablement pas terminé. »

Au Canada, dans le marché de la volaille, Exceldor rivalise essentiellement avec Olymel, les Aliments Maple Leaf, Sofina Foods et Maple Lodge Farms.

À l’aube de son 75e anniversaire, qui sera souligné l’an prochain, la coopérative québécoise désirait afficher des revenus supérieurs à 1 milliard et étendre sa présence au Canada – ce que Granny’s lui permet de réaliser.

Exceldor, qui commercialise ses produits sous diverses marques, dont Exceldor et Butterball, compte parmi ses clients les grandes chaînes d’alimentation comme Loblaw, Metro, Sobeys ainsi que les détaillants Walmart et Costco.

Des entreprises spécialisées dans les services alimentaires comme Groupe Colabor et Sysco achètent également chez Exceldor.

« Évidemment, ces clients souhaitent avoir des partenaires qui vont les suivre dans leur croissance nationale et ce que l’on fait correspond à leurs attentes, a expliqué le président-directeur général de la coopérative. Les acquisitions vont se poursuivre. »

En avril, Exceldor avait, pour une somme non précisée, acquis une participation majoritaire dans l’entreprise familiale Les Viandes Lacroix, qui compte quelque 450 employés et qui est établie à Saint-Hyacinthe. Elle est aussi copropriétaire des entreprises Unidindon et Volailles Giannone au Québec, ainsi que Golden Valley Farms en Ontario.

M. Proulx a indiqué que la coopérative allait continuer à prendre d’autres bouchées, mais probablement à l’extérieur du Québec, où le marché est principalement occupé par Exceldor et Olymel. Il n’est toutefois pas question, pour le moment, de regarder du côté des États-Unis.

« Notre vision, c’est d’être un chef de file canadien dans la volaille. Les États-Unis, nous ne sommes pas encore rendus là. Cela ne fait pas partie de notre vision à court ou moyen terme. »

— René Proulx, président-directeur général d’Exceldor

Dans la foulée de l’accord avec Granny’s, le conseil d’administration d’Exceldor accueillera deux nouveaux membres, pour un total de neuf, en provenance du Manitoba. Plus de 80 % du volume de volaille proviendra du Québec et de l’Ontario, selon M. Proulx. Granny’s exploite une usine de transformation à Winnipeg.

La coopérative comptera dorénavant plus de 3450 employés.

Saga 737 Max

Boeing versera 100 millions US aux victimes

L’avionneur Boeing versera 100 millions US sur plusieurs années pour aider les familles et les communautés touchées par les écrasements de deux de ses avions 737 MAX, qui ont coûté la vie à 346 personnes. La société a précisé hier qu’une partie de cet argent irait aux dépenses courantes et aux difficultés des familles des passagers qui ont péri. Boeing fait face à des dizaines de poursuites en justice pour les accidents. Les proches des passagers d’un Lion Air MAX qui s’est écrasé au large des côtes indonésiennes ont accepté d’essayer de régler par la médiation, mais les familles des passagers tués dans un accident survenu avec un appareil d’Ethiopian Airlines attendent qu’on en sache plus sur ces accidents. Les enquêtes préliminaires font ressortir le rôle joué par de nouveaux logiciels qui ont fait baisser le nez des avions. Boeing met à jour le logiciel. Les avions MAX sont cloués au sol dans le monde entier depuis mars. — Associated Press

Techno  Sécurité

Action collective contre Norton

Un des antivirus les plus populaires, Norton, fait l’objet d’une action collective qui concernerait « plusieurs centaines de milliers de personnes » au Québec, selon l’un des avocats responsables du dossier, Me Pierre Boivin, du cabinet montréalais Kugler Kandestin. Initialement déposée en novembre 2018 et autorisée le 16 avril dernier, la poursuite n’a été communiquée aux clients potentiellement lésés que lundi. On reproche essentiellement à Symantec, concepteur des produits Norton, des « déclarations fausses et trompeuses » sur la sécurité de son antivirus. Selon la poursuite, entre 2010 et 2016, les antivirus Norton comportaient des défauts de conception qui les rendaient vulnérables aux attaques informatiques, et qui n’ont pas été corrigés avec célérité. Symantec fait l’objet de nombreuses poursuites à ce propos, notamment en Ontario et aux États-Unis. On estime à 10 millions le montant global des indemnités que pourraient recevoir les consommateurs québécois, qui sont automatiquement inscrits à cette action. — Karim Benessaieh, La Presse

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