Chronique

Le diamant du Plan Nord

Le gouvernement Couillard a eu beau, le printemps dernier, réactualiser le Plan Nord, l‘ambitieux projet de valorisation de notre potentiel minier ne converge toujours pas avec la conjoncture économique mondiale, qui n’affiche pas un grand appétit pour les produits de matières premières.

La pression à la baisse est encore forte sur les prix de la grande majorité des minerais et des métaux que l’on retrouve dans le Nord québécois, ce qui décourage les investissements dans tout nouveau projet d’exploitation.

L’implantation de la mine de diamants Renard et de l’usine du gisement diamantifère Renard, dans les monts Otish, constitue cependant une belle exception et apparaît comme une éclaircie rayonnante dans la grise morosité du Plan Nord.

On savait déjà que le gisement diamantifère qui y repose est d’une excellente qualité. On y produira, à partir de 2017 et sur une base commerciale, des diamants de joaillerie d’une valeur actuelle moyenne de 190 $US le carat.

La production annuelle devrait franchir le cap des 2 millions de carats dès que l’usine sera bien rodée et que la mine souterraine entrera en production, soit en 2018.

Durant les deux premières années d’exploitation, on traitera le diamant qui se trouve en surface du gisement Renard. Des prélèvements ont permis d’identifier des zones souterraines où la qualité des diamants laisse présager des prix au-dessus de la barre des 200 $US, aux cours actuels.

UN ALIGNEMENT FAVORABLE DES PLANÈTES

La beauté de la mise en production prochaine du gisement Renard est qu’elle surviendra au moment même où les analystes du secteur entrevoient que l’écart entre la capacité de production et la demande mondiales va aller en s’élargissant de façon importante jusqu’en 2025.

Dans son plus récent Global Diamond Report, la firme Bain & Company estime que le décalage entre la capacité de production des mines de diamants et la hausse prévue de la demande mondiale va atteindre plus de 25 %.

Depuis des années, la demande en diamants de joaillerie excède légèrement la capacité de production mondiale, ce qui a permis aux prix du diamant d’augmenter de 65 % au cours des 10 dernières années.

Mais la pression à la hausse sur les prix risque d’augmenter alors que les deux plus importants gisements de diamants du monde arrivent à la toute fin de leur cycle de production.

L’apparition de rares nouveaux gisements, dont celui de Stornoway, ne permettra pas de compenser la perte de production prévue alors que la demande va poursuivre sa progression.

Le développement des classes moyennes en Chine et en Inde, où des dizaines de millions de nouveaux ménages accèdent chaque année à un niveau de richesse supérieur, va faire pression sur les prix.

Patrick Godin, président et chef des opérations de Stornoway, confirme que la conjoncture ne peut être plus favorable et que c’est assez rare que cela survienne dans le secteur minier.

« J’ai travaillé longtemps dans le secteur de l’or. On préparait un projet d’investissement avec un prix de 400 $US l’once et lorsqu’on amorçait nos travaux, le prix était rendu à 300 $US.

« Le secteur du diamant est nettement moins spéculatif. Les prix évoluent de façon ordonnée et c’est certain que la demande va excéder l’offre au cours des 10 prochaines années », convient-il.

Il faut aussi rappeler que les frais d’exploitation de Stornoway sont en dollars canadiens et que ses revenus seront en dollars américains, et donc solidement fortifiés…

Enfin, Québec va aussi y trouver son compte puisque Investissement Québec est l’un des principaux actionnaires de Stornoway et du projet Renard avec près de 30 % des actions du groupe.

« On était actionnaires du projet Renard avant que Stornoway n’achète la participation d’Ashton Mining. On est resté actionnaire et on a acheté pour 180 millions de nouvelles actions lors du financement de 1 milliard qui a été fait l’an dernier. On a aussi investi 140 millions en prêts », précise Denis Williams, directeur général de Ressources Québec, la division minière d’Investissement Québec.

Selon les prévisions de l’organisme, le gouvernement québécois devrait prélever 330 millions en redevances minières au cours des 10 prochaines années avec le seul projet Renard. Une prévision faite à partir des prix d’aujourd’hui, faut-il préciser.

Investissement Québec percevra pour sa part une redevance de 2 % sur tous les revenus annuels de Stornoway tout en ayant droit à sa juste part des bénéfices que générera l’entreprise. « Et on va collecter nos revenus d’intérêt sur notre prêt de 140 millions », insiste Denis Williams.

Une mine d’or, le projet Stornoway ? Mieux, une mine de diamants…

STORNOWAY EN CHIFFRES

2 millions de carats

Production annuelle prévue au prix potentiel de 190 $US le carat

310 millions

Redevances estimées qui seront versées au gouvernement du Québec sur 10 ans

300

Nombre de travailleurs sur le chantier. Pointe prévue de 500 travailleurs l’automne prochain

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