Portfolio Ingénieurs

Une meilleure intégration des étrangers

Les ingénieurs formés à l’étranger qui veulent obtenir un permis de travail québécois doivent affronter un processus complexe et trop long, selon l’Ordre des ingénieurs, qui assouplira son approche dès l’été 2018.

Sa présidente, Kathy Baig, précise toutefois que l’organisation n’offrira aucun passe-droit. « Les gens pensent que nous faisons un nivellement par le bas, et c’est important de dire que non, assure-t-elle. On s’arrime aux mêmes critères utilisés pour les étudiants canadiens, mais on veut plus d’agilité et de personnalisation. »

Pour l’instant, certains demandeurs peuvent obtenir un permis rapidement en fonction d’accords signés avec quelques pays (France, États-Unis, Australie, Inde, Japon, Royaume-Uni, Afrique du Sud, etc.). D’autres doivent passer des examens qui leur sont prescrits automatiquement en fonction de leur formation. « Présentement, l’expérience de travail n’est pas nécessairement prise en considération, explique la présidente. Dans le futur, on veut évaluer l’acquis expérientiel. S’il y a certaines lacunes dans la formation académique, on va pouvoir déterminer si elles ont été comblées au travail. »

Ces nouvelles règles auraient bénéficié à Mauro Imaz, diplômé en génie industriel en Argentine. Il travaillait en tant que consultant au Québec depuis quelques années lorsque ses patrons lui ont suggéré d’obtenir son permis pour accroître sa crédibilité. Un processus qui lui a pris deux ans. « C’était très long, dit-il. J’ai dû retourner en Argentine pour récupérer la documentation, faire un examen de français et mon examen professionnel. »

Il a toutefois obtenu un permis d’ingénieur junior.

« C’est frustrant, car il faut refaire tes preuves. Tu es perçu sans expérience, même si tu en as. »

– Mauro Imaz, chef de service, amélioration continue, pour une entreprise montréalaise et aujourd’hui ingénieur senior

Dans le futur, l’Ordre veut aussi mieux outiller les candidats afin de combler un manque de connaissances potentiel. « Avoir à étudier comme autodidacte pour un examen, ça peut être difficile, souligne Mme Baig. Certaines personnes recommencent plusieurs fois. On aimerait donc varier nos moyens pour combler les lacunes, comme leur demander de faire un projet supervisé ou une brève formation universitaire. »

À la fin du mois de septembre, elle a d’ailleurs rencontré les doyens de presque toutes les universités pour leur en parler. « Leur réponse était plus que positive ! »

Toutes ces mesures pourraient favoriser l’accès à la certification et la diminution des délais, qui sont d’environ 16 mois. « On entend souvent des histoires de professionnels formés à l’étranger qui se découragent face à notre processus d’obtention de permis, explique Kathy Baig. Certains trouvent ça difficile d’étudier en travaillant. D’autres nous disent que les coûts sont élevés : c’est 330 $ par examen, en plus des frais d’admission qui oscillent entre 625 $ et 1245 $. On en perd quelques-uns dans le processus. »

Il ne faut pas oublier les efforts de francisation que doivent fournir plusieurs candidats, comme Mauro Imaz. Arrivé au Canada en 2004, il a vite constaté que son niveau de français n’était pas suffisant pour trouver du travail. « J’ai frappé un mur en arrivant ! dit-il. J’étais capable de conjuguer des verbes et de construire des phrases de base, mais j’ai réalisé que je n’étais pas capable de parler aisément pour intégrer le marché du travail. J’ai donc passé une année entière à perfectionner mon français. »

Quelques années plus tard, il a franchi chaque étape le menant à son permis. Un long chemin qu’il ne regrette pas. « C’est plus facile de trouver un emploi en appartenant à l’Ordre des ingénieurs, explique-t-il. Ça rassure les gens sur nos compétences. »

58 %

Taux d’obtention du permis d’ingénieur junior par les professionnels formés à l’étranger, selon l’OIQ

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