Portfolio  Développement durable

Les PME pourraient faire mieux

Signe des temps, les entreprises mettent en place de plus en plus d’initiatives vertes. Les PME du Québec sont-elles des chefs de file ou des cancres en matière de responsabilité environnementale ? Survol de la situation.

Selon la Fédération canadienne de l’entreprise indépendante (FCEI), le Québec ne se retrouve ni en queue de peloton ni en tête au pays. « Un de nos récents sondages démontre qu’un grand nombre de PME québécoises font des efforts en matière de protection de l’environnement et de développement durable. Cette proportion est comparable à la moyenne canadienne », assure Martine Hébert, vice-présidente principale.

L’organisme a par exemple constaté qu’entre 2013 et 2016, environ 75 % des PME du Québec avaient intensifié leurs efforts concernant le recyclage et la récupération. « Ce chiffre est supérieur dans le reste du Canada (63 %), mais il faut dire que la Belle Province produit de l’énergie propre, ce qui n’est pas le cas pour toutes ses voisines, rappelle-t-elle. Mais dans l’ensemble, il n’y a pas de différence très marquée. »

48%

Près de la moitié (48 %) des PME québécoises ont amélioré leur efficacité énergétique entre 2013 et 2016, selon la FCEI.

Le Réseau entreprise et développement durable (REDD), de son côté, n’a pas de chiffres probants, même s’il s’est penché sur la question. « Il y a 10 ans, on a fait un sondage sur la responsabilité sociale, se rappelle sa directrice, Marie-France Turcotte. On s’est rendu compte que certaines PME faisaient du développement durable, mais sans l’organiser. Parfois même sans le savoir. »

La France et le Mexique font mieux

François Labelle, directeur de l’Institut de recherche sur les PME, a réalisé une étude il y a trois ans, en collaboration avec la France et le Mexique. Quelque 300 PME québécoises, 400 PME françaises et 400 PME mexicaines se sont prêtées au jeu. « Du point de vue environnemental, la France était un peu en avance. Le Mexique aussi, ce qui nous a étonnés. Mais il faut dire qu’il y avait beaucoup de coopératives dans la région sondée. Par leur mission, elles sont souvent plus avancées que les PME traditionnelles. »

Des freins aux gestes verts

Loin de l'image des cheminées des grandes entreprises, l’impact des PME sur l’environnement est néanmoins important, et leurs actions (ou leur inertie) ont des conséquences.

On compte près de 240 000 petites et moyennes entreprises au Québec, un chiffre considérablement supérieur au nombre de grandes sociétés, qui plafonne à 590.

Pourtant, la croyance que leur effet est limité est l’un des principaux freins à l’implantation d’un virage vert, avec le manque de temps et d’argent. « La conception des dirigeants est biaisée, estime François Labelle. Collectivement, les PME représentent presque 99 % des entreprises. Leurs impacts agrégés sont les plus importants. Elles produisent environ 60 % des déchets et 70 % des impacts environnementaux négatifs leur sont dus. »

Le professeur de l’UQTR est également dubitatif devant le manque de ressources financières souvent décrié par les PME, puisque de nombreuses initiatives vertes permettent en fait d’économiser. « Dans la plupart des cas, les premiers gestes posés dans le domaine environnemental se rentabilisent extrêmement rapidement, généralement en moins d’un an. »

Des outils

Marie-France Turcotte juge qu’on doit soutenir les PME en leur donnant d’abord de l’information. « Les PME qui font bien les choses sont en compétition avec d’autres qui ne sont pas nécessairement vertes, mais qui le prétendent. Certaines réglementations gouvernementales, notamment sur l’étiquetage, pourraient instaurer un cadre plus juste », ajoute-t-elle.

Martine Hébert croit pour sa part que le Québec doit retrouver l’équilibre entre les trois piliers (social, économique et environnemental) du développement durable. « On a laissé de côté le développement économique dans la réalisation de projets verts. Il est pourtant possible de concilier environnement et richesse. »

Elle suggère au gouvernement de miser sur les incitatifs fiscaux plutôt que sur des programmes de subventions. « La FCEI a proposé une déduction pour l’innovation, souvent liée à l’environnement, qui permettrait de déduire jusqu’à 100 000 $ par an pour des projets d’innovation. Ce genre d’initiatives est moins complexe et convient mieux à la réalité très diversifiée des PME. Il est clair pour nous que le développement durable doit passer par des opportunités d’affaires. »

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