Opinion : Élection américaine

Ce qu’en pensent les Chinois

Les sondages américains montrent que la candidate démocrate Hillary Clinton devance largement son adversaire Donald Trump. Les experts déclarent déjà une défaite de ce dernier. Pourtant, en Chine, de nombreux sympathisants demeurent attachés au candidat républicain.

Sur le site de microblogage le plus populaire du pays, on trouve une vingtaine de groupes de fans de M. Trump (par ex. : Trump : la lumière du monde, avec 3513 membres). Avec les mots-clés « les Chinois soutiennent Trump », le plus grand moteur de recherche chinois, Baidu, donne 1 800 000 résultats.

La presse officielle qualifie Hillary Clinton de plus mal-aimée des politiciens américains par les Chinois. Selon un sondage réalisé en mars dernier par le Global Times, journal appartenant au gouvernement, 54 % des Chinois sondés déclarent aimer le magnat de l’immobilier, et ne se réjouissent pas de la perspective de voir Hillary Clinton devenir la prochaine présidente des États-Unis.

Comment explique-t-on cette différence ? Rappelons que la renommée de Donald Trump remonte au début des années 2000, quand son émission de téléréalité The Apprentice est devenue, pour les étudiants chinois, un must pour apprendre anglais.

Donald Trump a un atout de taille : il fait partie du Parti républicain. La plupart des Chinois s’intéressent moins aux affaires intérieures des États-Unis qu’au développement des relations sino-américaines.

Historiquement, le Parti communiste chinois au pouvoir a souvent eu de meilleurs rapports avec les républicains qu’avec les démocrates.

Ce facteur historique explique le fait que les candidats républicains ont toujours une cote plus favorable auprès des Chinois. Par exemple, lors de l’élection de 2012, la Chine est un des rares pays qui aurait préféré la victoire de Mitt Romney.

Pour de nombreux Chinois, une victoire de Hillary Clinton mettrait en danger la santé des relations bilatérales. Une des raisons les plus évoquées est qu’elle est la principale instigatrice de la politique du « pivot asiatique » de l’administration Obama, qui vise à renforcer la présence des États-Unis en Asie afin de contenir la montée en puissance de la Chine.

TRUMP LE « PRAGMATIQUE »

Au contraire, Donald Trump propose de réduire la présence militaire américaine en Corée du Sud et au Japon. Selon lui, les conflits régionaux doivent être réglés par les pays qui s’y trouvent.

Comme le mentionne un jeune Chinois : « Trump n’insisterait pas sur les sujets idéologiques. Car il comprend que la Chine est le plus grand partenaire commercial des États-Unis. » Le candidat républicain est ainsi vu comme un homme d’affaires pragmatique. Rappelons que le pragmatisme est le fondement idéologique officiel et populaire de l’empire du Milieu, depuis le IIe siècle avant J.-C.

Un autre atout de Donald Trump est son franc-parler, un trait qui plaît aux internautes chinois qui le décrivent comme quelqu’un d'honnête et de sensible. Son discours sur l’immigration des musulmans trouve écho chez les Chinois qui font face, depuis ces deux dernières années, à des attaques terroristes provenant du Xinjiang, région musulmane du Nord-Ouest de la Chine.

Le coefficient de sympathie de Donald Trump est renforcé par la popularité de sa fille aînée, Ivanka Trump. Cette dernière, femme d’affaires et designer, est vue comme un exemple positif de « Fuerdai ». Ce terme, dans l’opinion publique chinoise, fait référence à la seconde génération des familles riches qui mène souvent une vie dispendieuse et arrogante. Donald Trump est ainsi considéré comme un père modèle qui sait bien éduquer ses enfants.

Donald Trump a réussi à s’attirer la sympathie des Chinois, y compris aux États-Unis au sein de l’électorat d’origine chinoise qui a pourtant tendance à voter pour le Parti démocrate. Qui va remporter l’élection du 8 novembre prochain ? Le mystère ne porte pas tant sur le résultat que sur l’avenir des relations sino-américaines.

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