Journée mondiale contre la tuberculose

Des diagnostics rapides et économiques au Nunavut

Pratiquement éradiquée en Occident, la tuberculose fait pourtant des ravages dans le Grand Nord canadien. Des chercheurs de McGill viennent de montrer que de nouvelles machines capables de faire le diagnostic sur place permettent non seulement de limiter les contagions, mais aussi de générer des économies. En cette Journée mondiale de la lutte contre la tuberculose, coup d’œil en cinq chiffres sur une initiative qui fonctionne.

23 jours

C’est le temps qu’il faut, en moyenne, pour obtenir un diagnostic de tuberculose si on habite une collectivité reculée du Nunavut. La raison en est simple : il n’existe aucun laboratoire de microbiologie sur tout le territoire, et les échantillons de salive des patients doivent être envoyés à Ottawa par avion. Le temps de diagnostic est moins important à Iqaluit, qui possède un hôpital, mais il dépasse néanmoins 16 jours.

« Le problème, c’est que la tuberculose est contagieuse et que l’individu peut en infecter d’autres pendant ce temps », souligne le Dr Kevin Schwartzman, chercheur au Centre international de la tuberculose de l’Institut de recherche du CUSM.

60 000 $

En 2014, le gouvernement du Nunavut a acheté au coût de 60 000 $ une machine de la taille d’un four à micro-ondes qui permet de faire les diagnostics sur place. Son nom : Xpert MTB/RIF. Dans une étude publiée il y a quelques jours dans la revue PLOS One, le Dr Schwartzman et d’autres chercheurs ont décortiqué les données découlant de son utilisation pour montrer qu’elle réduit le délai de diagnostic à moins de huit jours.

« Il s’agit d’une amélioration très marquée », remarque le Dr Schwartzman, qui souligne qu’une machine semblable se trouve aussi à Kuujjuaq, au Nunavik.

881 $

Le coût d’acquisition de la machine et le fait qu’il faille utiliser des cartouches jetables à chaque utilisation peuvent sembler onéreux. Pourtant, la principale conclusion des chercheurs est que cette technologie permet, au bout du compte, d’économiser de l’argent.

Les économies s’expliquent d’abord parce que les patients sont pris en charge plus tôt, alors que la maladie a moins progressé. Ensuite, il arrive qu’en attendant un diagnostic, on hospitalise un patient pendant des jours en pensant qu’il est tuberculeux alors que ce n’est pas le cas.

« Ces jours d’hospitalisation ont un coût très élevé qui peut être évité », dit le Dr Schwartzman. Dans le meilleur scénario d’utilisation, en tenant compte de tous les coûts, les chercheurs estiment que la machine permet d’économiser 881 $ par patient testé.

Outre les avantages économiques, le Dr Schwartzman rappelle qu’un traitement plus rapide améliore les perspectives pour les patients et peut aider à briser les chaînes de transmission de la maladie.

60

Le taux d’incidence de la tuberculose au Nunavut atteint 234 cas par 100 000 individus, presque 60 fois celui observé dans le sud du Canada. En fait, à l’exception du Grand Nord, la tuberculose au Canada est considérée comme une maladie pratiquement éradiquée, la plupart des cas provenant de personnes fraîchement immigrées infectées dans leur pays d’origine.

« Les raisons de cette très haute incidence au Nunavut ne sont pas toutes connues avec précision », dit le Dr Schwartzman, qui explique que les logements surpeuplés, le taux de tabagisme élevé et le fait que les gens passent beaucoup de temps à l’intérieur pendant les longs mois d’hiver contribuent au phénomène.

Selon lui, les importants délais de diagnostic favorisent aussi la transmission des cas par contagion et font partie des causes auxquelles il faut s’attaquer.

4000

Selon l’Organisation mondiale de la santé, 4000 personnes meurent chaque jour de la tuberculose dans le monde, ce qui en fait la deuxième maladie infectieuse la plus meurtrière après le sida. Causée par une bactérie qui s’attaque habituellement aux poumons, la tuberculose se transmet dans l’air quand une personne infectée tousse, crache ou éternue. Elle peut généralement être soignée si la personne a accès aux antibiotiques appropriés. Les personnes infectées par le VIH sont particulièrement vulnérables à la tuberculose, et les deux maladies forment un cocktail meurtrier.

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