Chronique

L’année de la génération dorée ?

C’est un cliché du soccer international, au même titre que l’aphorisme de Gary Lineker – démenti en Russie – sur les Allemands qui l’emportent toujours à la fin. Le cliché de la « génération dorée ».

Le concept de génération dorée est lié à une nation qui, à une époque précise, a eu le loisir d’aligner des joueurs de très grand talent, nés à peu près au même moment. Souvent, ces stars ont fait leur marque ensemble et montré quantité de promesses, plus jeunes, dans des tournois internationaux « espoirs ».

Les exemples de générations dorées sont légion. Le Portugal a par exemple connu celle de Luís Figo et Rui Costa, la France celle de Zinédine Zidane et Thierry Henry. « Titi » est d’ailleurs, en Russie, l’un des assistants de Roberto Martínez à la tête de la sélection belge, la plus récente des générations dites dorées.

Les générations dorées ont ceci en commun qu’elles génèrent beaucoup d’espoir. Aussi, on attend beaucoup de cette très talentueuse équipe belge, qui a connu un Euro 2016 décevant après avoir atteint les quarts de finale de la Coupe du monde de 2014, au Brésil.

De négligés, les Belges sont passés en quatre ans au statut de favoris. Les plus redoutables des Diables rouges sont arrivés à maturité, dans la fleur de l’âge des athlètes de haut niveau, à l’image du milieu de terrain Kevin De Bruyne, qui fêtait hier ses 27 ans. Eden Hazard a lui aussi 27 ans, Thibaut Courtois a 26 ans et Romelu Lukaku, 25 ans.

Les Belges ont, tout comme en 2014, terminé la phase de groupes du Mondial russe avec trois victoires en autant de matchs. Celle d’hier à Kaliningrad, aux dépens de l’Angleterre, ne passera pas à l’histoire. Les deux nations étant déjà qualifiées pour le deuxième tour, c’est de manière préventive que les meilleurs joueurs n’ont pas été titularisés. Une fracture du métatarse est si vite arrivée. Parlez-en à Wayne Rooney, le nouvel attaquant de DC United en MLS, ou à David Beckham, porte-étendard d’une génération dorée anglaise qui n’a jamais rempli ses promesses.

De Bruyne, Hazard et Lukaku n’avaient donc logiquement pas été risqués du côté belge, pas plus que Harry Kane – meilleur buteur du tournoi jusqu’à présent –, Dele Alli ou encore Raheem Sterling chez les Anglais. Au total, 17 changements avaient été apportés aux formations belge et anglaise depuis leur match précédent. Plutôt que d’assister à une rencontre finale du groupe G relevée, ce que laissait entrevoir cette affiche avant la compétition, on a eu droit à un match amical sans conséquence, disputé entre deux équipes B.

Deux équipes qui, du reste, se connaissent très bien, la Belgique étant la plus « anglaise » des nations à disputer cette Coupe du monde… après l’Angleterre elle-même. Pas moins de 15 des 22 joueurs titularisés hier jouent en club dans la Premier League anglaise (et un seul, le Monégasque Youri Tielemans, n’y a jamais été lié). Roberto Martínez est lui-même un ancien entraîneur d’Everton, Swansea et Wigan, où il a fait l’essentiel de sa carrière de joueur.

Les Belges, plus entreprenants, ont dominé la première mi-temps. Dès la 5e minute, Tielemans, principal animateur du jeu belge, a testé à distance la vigilance du gardien anglais Jordan Pickford. Michy Batshuayi, qui a commencé la dernière saison à Chelsea avant d’être prêté à Dortmund, a subtilisé du pied le ballon des mains de Pickford, deux minutes plus tard, avant que Gary Cahill ne le dégage sur la ligne des buts.

Adnan Januzaj a dénoué l’impasse de ce match bien terne à la 51e minute, avec une superbe frappe brossée du pied gauche, après un joli crochet dans la surface. Il s’agissait du premier but en sélection belge de l’ex-starlette de Manchester United, que plusieurs ont crue, non pas de la génération dorée, mais de la « génération perdue », après des débuts très prometteurs en Angleterre.

Les Anglais, qui n’avaient pas cadré un seul tir en première mi-temps, ont été plus vifs en deuxième période. Tout laissait croire que Marcus Rashford, seul devant Courtois à la 65e minute, allait égaliser, mais le gardien belge de Chelsea s’est fait grand devant l’attaquant de United, qui a tiré du plat du pied à côté du but. À la 80e minute, Rashford avait une dernière occasion de faire 1-1 sur coup franc, mais ceux qui le suivent de près en club (j’en suis) n’ont pas été surpris de voir le ballon passer au-dessus de la barre.

Le seul enjeu de cette rencontre était de déterminer qui, du Japon ou de la Colombie – qualifiés plus tôt dans la journée –, serait l’adversaire au prochain tour. Les Belges et les Anglais ayant le même nombre de points et le même différentiel de buts avant le match, un nul aurait favorisé l’Angleterre en vertu des règles de franc-jeu (l’accumulation de cartons jaunes a causé à elle seule l’élimination du Sénégal, hier).

Les plus désabusés prétendaient avant le match qu’il serait préférable de terminer deuxième du groupe G, afin de ne pas se qualifier du côté « brésilien » du tableau (en compagnie notamment de la France et de l’Argentine).

Les Belges pourraient en effet devoir affronter les Brésiliens dès les quarts de finale, s’ils battent les Japonais au deuxième tour (les Mexicains, prochains adversaires des Brésiliens, ne seront pas d’accord).

Les Anglais, en revanche, auront une journée de repos supplémentaire avant d’affronter en huitièmes de finale, mardi, des adversaires en théorie plus coriaces que les Japonais, les Colombiens (avec ou sans James Rodríguez, blessé hier). Mais ils pourraient ensuite retrouver les Suisses ou les Suédois. Avec des « si », comme on dit…

On n’a pas fini de spéculer. La phase de groupes de cette 21e Coupe du monde est terminée. Passons aux choses sérieuses. À compter de demain, chaque match compte. Une défaite et c’est terminé ! Avec son parcours parfait, la Belgique peut tout espérer. Est-ce que 2018 sera l’année de la consécration de sa génération dorée ?

Le payant franc-jeu du Japon

Sous un crescendo de huées et de sifflets tandis qu’aucune des deux équipes ne tentait de marquer, le Japon s’est qualifié pour les huitièmes de finale en raison d’un nouveau bris d’égalité, celui du franc-jeu. Les Japonais se sont inclinés 1-0 devant la Pologne à leur dernier match du groupe H, mais son nombre moins élevé de cartons jaunes lui a permis de se qualifier devant le Sénégal, qui a perdu 1-0 face à la Colombie. Le Japon a obtenu quatre cartons jaunes en trois matchs, contre six pour le Sénégal. Il fera maintenant face au vainqueur du groupe G, la Belgique. — Associated Press

La Colombie passe, le Sénégal éliminé par ses cartons

Le Sénégal est devenu le premier pays de l’histoire éliminé en vertu de son nombre de cartons jaunes. Le Japon et le Sénégal étaient à égalité à tous les chapitres, sauf les points franc-jeu, établis en fonction du nombre de cartons jaunes et rouges. Le Japon a écopé quatre cartons jaunes, contre six pour le Sénégal. « Les points fair-play existent et ce règlement a été ajouté à ceux du tournoi ; nous devons le respecter », a dit l’entraîneur-chef du Sénégal, Aliou Cissé. La Colombie, qui a battu 1-0 le Sénégal hier, a terminé au sommet de son groupe et est devenue le quatrième pays sud-américain à se qualifier pour le prochain tour. — Associated Press

La Tunisie, pour l’honneur

Les Tunisiens n’avaient pas remporté un match de la Coupe du monde depuis 1978. Voilà qui est maintenant chose du passé : le capitaine Wahbi Khazri a préparé un but en deuxième demie avant de marquer lui-même, hier, aidant la Tunisie à l’emporter 2-1 contre le Panama. Le Panama avait pris les devants 1-0 avant de voir l’adversaire réussir un doublé. Le match était pour l’honneur, les deux clubs étant déjà éliminés avant le coup d’envoi, dans le groupe G. Les cinq présences de la Tunisie à la Coupe du monde ont pris fin en phase de groupe. La victoire d’hier fait quand même bien paraître l’entraîneur Nabil Maaloul, qui a intégré plus de jeunes joueurs à son équipe. — La Presse canadienne

À la recherche de son erre d’aller

KAZAN, Russie — La France et l’Argentine ont emprunté des chemins différents pour atteindre les huitièmes de finale de la Coupe du monde de soccer en Russie, mais elles se ressemblent à de nombreux points de vue.

Les deux équipes sont dotées de joueurs étoiles, les deux ont un style de jeu haut en couleur et elles ne sont toujours pas parvenues à répondre aux attentes placées en elles.

Quarante ans après leur dernier duel dans le plus prestigieux tournoi de soccer du monde, les ex-champions s’affronteront demain à Kazan avec, à l’enjeu, une place en quarts de finale. Pour y parvenir, les deux pays devront compter sur la contribution de leurs meilleurs éléments.

Avec son armada de joueurs étoiles, la France est demeurée invaincue dans la phase de groupes mais n’est toujours pas parvenue à trouver son erre d’aller. En trois matchs, l’équipe de l’entraîneur-chef Didier Deschamps a manqué d’audace et d’intensité. Les Bleus n’ont pas atteint leur plein potentiel en attaque, notamment en raison du piètre rendement de l’attaquant Antoine Griezmann, meilleur marqueur de l’Euro il y a deux ans.

Pourtant, le principal intéressé ne semble pas trop s’en faire.

« Je suis certain que j’atteindrai bientôt le niveau de jeu que tout le monde espère. Ç’a été la même chose à l’Euro en 2016. J’avais retrouvé mes repères à partir des huitièmes de finale. »

— Antoine Griezmann

Inquiétante Argentine

Le parcours de l’Argentine en phase de groupes a été beaucoup plus inquiétant. Les doubles champions ont été humiliés 3-0 par la Croatie et ont évité de justesse l’élimination hâtive en disposant du Nigeria 2-1 lors du troisième et dernier match. Cette victoire dramatique, acquise grâce à une volée spectaculaire de Marcos Rojo avec quatre minutes à négocier, a soulagé l’entraîneur-chef Jorge Sampaoli, qui a été vertement critiqué jusqu’ici pour ses choix tactiques douteux.

Les Français ne comptent toutefois pas établir un plan de match afin de contenir spécialement Lionel Messi, mais ils ont souligné qu’ils devaient maintenir leur bloc défensif et limiter l’espace entre les fronts défensifs.

« Personne sur cette planète ne peut freiner Messi. La réponse doit être collective », a d’abord évoqué le défenseur français Presnel Kimpembe.

« Ça n’a aucun sens d’essayer de marquer Lionel Messi. Il est trop fort à un contre un, a renchéri l’ex-défenseur français Bixente Lizarazu, maintenant analyste. Ils doivent rompre les axes de passe entre Messi et les autres attaquants. Parce que Messi est un franc-tireur, mais aussi un fabricant de jeux. »

C’est dans ces circonstances que le match présenté au Kazan Arena demain aura lieu. Il s’agira d’un match intrigant, mais très serré, entre deux équipes qui tenteront d’atteindre leur plein potentiel.

« C’est difficile pour tout le monde, a dit Deschamps à propos des ennuis offensifs de son équipe. L’Espagne ou l’Allemagne, reconnues pour leurs qualités offensives, ont connu des ennuis elles aussi. Est-ce que le jeu s’ouvrira un peu plus en huitièmes de finale ? Je ne sais pas. Mais je l’espère. »

Horaire huitièmes de finale (Heure du Québec)

Samedi 30 juin

10 h : France c. Argentine

14 h : Uruguay c. Portugal

Dimanche 1er juillet

10 h : Espagne c. Russie

14 h : Croatie c. Danemark

Lundi 2 juillet

10 h : Brésil c. Mexique

14 h : Belgique c. Japon

Mardi 3 juillet

10 h : Suède c. Suisse

14 h : Colombie c. Angleterre

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