Réseaux sociaux

L’envers de la médaille sur Instagram

Alors qu’elle n’avait que 21 ans, Larissa May a fondé #halfthestory, une plateforme qui permet de partager honnêtement des informations habituellement invisibles sur les médias sociaux.

En 2015, alors qu’elle était encore étudiante à l’Université Vanderbilt, au Tennessee, le compte Instagram de Larissa May suggérait une existence de rêve : elle avait habité à Paris, Chicago et Los Angeles, et elle couvrait en tant que blogueuse mode les plus grands défilés du monde. « Ça avait l’air formidable, mais je menais une double vie, l’une en ligne, l’autre hors ligne. J’étais déprimée et je souffrais d’anxiété chronique », confie l’entrepreneuse de 24 ans, qui habite maintenant à Brooklyn. 

« Je pleurais toute la journée, puis me tirais du lit pour poster un ou deux clichés impeccables sur les médias sociaux, qui me servaient de façade. »

— Larissa May, fondatrice de la plateforme #halfthestory

C’est cette double vie qui lui a donné l’idée de fonder le projet #halfthestory (la moitié de l’histoire), en 2015. Le concept est simple : des participants lui envoient une photo accompagnée d’un petit témoignage, qu’elle publie sur Facebook et Instagram. Certaines vignettes sont inspirantes, d’autres bouleversantes. Rien à voir avec les tableaux parfaits que l’on voit habituellement sur les médias sociaux. Au lieu d’y étaler leurs exploits, les gens y dévoilent des informations personnelles : anxiété, troubles alimentaires, problèmes de violence conjugale ou homosexualité cachée, par exemple.

« Nous passons notre temps à nous comparer aux autres d’un point de vue superficiel, nous bâtissons des murs. Mais nous traversons tous des épreuves, et ultimement, c’est ce qui nous unit : que ce soit un problème de santé mentale, le cancer, ou un déménagement dans une nouvelle ville loin de nos amis, par exemple », explique Larissa May. Ce projet scolaire pour lequel elle avait reçu une subvention de 800 $ est maintenant devenu une communauté planétaire, à laquelle plus de 4000 personnes venant d’au-delà de 99 pays participent.

Selon elle, il est important de publier ces histoires pour contrer l’effet négatif des médias sociaux, qui peuvent finir par affecter notre santé mentale. « D’un côté, ils nous permettent de rencontrer des gens de partout. J’y ai forgé toutes sortes de relations professionnelles formidables. D’un autre côté, ils contribuent à exacerber les effets de l’anxiété et de la dépression. »

« Depuis que l’iPhone a été inventé, en 2008, le nombre de personnes souffrant de dépression a explosé. »

— Larissa May

Un rapport publié en 2018 par la compagnie d’assurances Blue Cross Blue Shield rapporte d’ailleurs que les diagnostics de dépression majeure ont augmenté de 33 % aux États-Unis depuis 2013. Cette augmentation est encore plus marquée chez les milléniaux (47 %), et chez les adolescents (47 % pour les garçons, et 65 % pour les filles).

Pour sa part, Larissa May admet que son téléphone intelligent et les médias sociaux demeurent pour elle une grande source d’anxiété. « J’ai complètement changé ma façon de les utiliser. Il faut que je me crée des limites. » Pour ce faire, elle a éteint toutes les alertes de son appareil et le laisse en mode « avion » les soirs et les fins de semaine. Elle a surtout changé sa façon de percevoir les médias sociaux. « Maintenant, quand j’y passe du temps, je suis toujours consciente que l’information qui s’y trouve est incomplète, que ce n’est qu’une partie de l’histoire », conclut-elle.

Deux histoires inspirantes

Chase Marks

« Juin 2018, je marche dans la station Victoria, à Londres, les larmes aux yeux. Des milliers de gens m’entourent et ignorent complètement comment je me sens. Je souffre depuis plusieurs années de dissociation. Mes matins commencent habituellement par une rétrospective des moments les plus sombres de ma vie, ce qui contribue à accroître l’anxiété générée par l’inconnu que représente la journée qui m’attend. Mais cette journée n’est PAS comme les autres. En ce moment, je ne pense PAS à quel point ma dépression a rendu mes enfants invisibles. Aujourd’hui, je me souviens de leurs visages souriants alors que nous sommes en train de nous chamailler en rigolant. Aujourd’hui, papa est là, présent. Je sais dans mon cœur que l’avenir est prometteur et que mon passé sombre est derrière moi. »

Mikayla Geier

« Vaincre l’anorexie est la chose la plus difficile que j’ai vécue. Il y a deux ans, j’ai privilégié mon talent pour la danse au détriment de ma santé et de mon bonheur. Je sais aujourd’hui que j’ai beaucoup plus à offrir au monde que d’occuper moins d’espace. Passer de ballerine à femme d’affaires a été une transition folle, mais qui m’a permis d’évoluer énormément. Si je peux aider une personne en difficulté à se sentir moins seule, alors partager mon expérience vaut la peine. Je sais qu’il existe bien d’autres types troubles alimentaires et tous ceux qui en souffrent, sachez que vos émotions sont véritables. C’est sain de demander de l’aide. Guérir est un processus difficile avec des hauts et des bas, mais vous en valez la peine ! »

* Propos traduits et résumés

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