Chronique

Il était plus que temps

Ça a tout l’air que nous n’étions pas pressés. Le Québec aura eu besoin de 18 ans avant de prendre une décision nécessaire : remplacer le toit du Stade olympique. Si le plan approuvé par le gouvernement Couillard se concrétise, la nouvelle structure sera en place en 2023.

Cet investissement, qui donnera un élan additionnel à la relance du Parc olympique, aurait dû être dévoilé en grande pompe par les autorités responsables. Il a plutôt été révélé par les médias jeudi et confirmé par le premier ministre lors d’un autre évènement. Voilà qui illustre le malaise quasi permanent à propos de cet édifice phare de Montréal. Comme s’il était gênant de consacrer les sommes nécessaires à son entretien et à sa mise en valeur.

Après la déchirure de la toile en 1999, aucun gouvernement, qu’il ait été formé par le Parti québécois ou le Parti libéral, n’a eu le courage de trancher. On a commandé des études et des analyses, un truc éprouvé pour balayer un problème vers l’avant. On semblait surtout craindre le ressac politique d’une telle annonce.

Le Stade aura donc un nouveau toit. Cela mettra fin à une situation absurde, où son utilisation durant les mois d’hiver est réduite à sa plus simple expression en raison de la neige et du verglas. Nous sommes sûrement le seul endroit au monde où une enceinte à l’abri des intempéries ne peut être utilisée… en raison des intempéries !

Depuis 2009, un protocole a été adopté afin de rendre le Stade accessible durant l’hiver, si les précipitations ne dépassent pas les seuils autorisés. Cela a permis à l’Impact d’y jouer quelques matchs. Mais la possibilité d’une annulation de dernière minute plane toujours. Ce fut le cas lors de la rencontre inaugurale de l’équipe en mars 2014, reportée au lendemain en raison du mauvais temps.

Comment peut-on attirer de nouveaux évènements au Stade si les promoteurs n’ont pas l’assurance que ses portes demeureront ouvertes ? Comment peut-on, dans ce contexte absurde, demander au grand patron de la RIO, Michel Labrecque, de dénicher de nouvelles sources de revenus ?

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La relation des Québécois avec le Parc olympique est complexe. On y retrouve un mélange d’amour, de haine, de fierté et de regret. L’organisation des Jeux olympiques de 1976 a été un moment formidable de notre histoire contemporaine, mais la facture démentielle des installations a créé une vive amertume.

Il est maintenant temps de faire un trait sur les dérives du passé et d’envisager l’avenir avec optimisme.

Depuis six ans, le Parc olympique est métamorphosé. Le Centre sportif et son complexe aquatique, entièrement refaits, sont magnifiques. Et l’Institut national du sport offre à nos athlètes de pointe des services de niveau international.

La tour, jamais occupée depuis sa construction dans les années 80, accueillera bientôt mille employés du Mouvement Desjardins. Les vastes espaces extérieurs entourant le Stade et le Biodôme sont enfin mis en valeur et fréquentés par des milliers de personnes. Le stade Saputo et le terrain d’entraînement de soccer-football situé tout près ajoutent à la diversité des lieux.

Après des années de petite misère, cet immense quadrilatère reprend vie et devient un pôle d’attraction à Montréal. Si le Stade redevient accessible 12 mois par année, cela fournira d’autres occasions de développement. Le succès des récents Mondiaux de gymnastique, où l’enceinte a été configurée de manière originale, a montré les possibilités si l’imagination est au rendez-vous.

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Oui, il était grand temps d’annoncer le remplacement du toit, même si les contours du projet demeurent flous. L’option d’en rendre une partie « démontable » sera examinée. Avec le Stade olympique, rien n’est jamais simple.

Cela dit, cette bonne nouvelle ne sera pas suffisante pour faire du Stade un équipement du XXIe siècle. D’autres investissements majeurs seront nécessaires pour moderniser cette enceinte vétuste. Les besoins sont criants : aménagement des coursives et des aires de restauration, sonorité, éclairage, qualité des sièges et des loges d’entreprise, interactivité… Mais ces travaux pourront être exécutés au fil du temps.

Évidemment, bien des gens diront que le problème du toit réglé, les Expos devraient de nouveau s’établir au Stade olympique s’ils reviennent parmi nous. Oublions cette possibilité. Le baseball majeur a depuis longtemps tiré un trait sur ces installations gigantesques et multifonctionnelles. Les stades intimistes, conçus en fonction des besoins de ce sport et où on peut générer un maximum de revenus, ont la cote.

Non, les ligues majeures ne changeront pas leur modèle économique pour faire plaisir à Montréal. Au mieux, le Stade olympique servirait de refuge transitoire pendant la construction de la nouvelle demeure des Expos. Mais sans un nouveau stade collé sur le centre-ville, et en phase avec ceux des autres équipes, les Expos ne renaîtront pas. Mélanger ces deux dossiers est inutile.

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Dans un monde idéal, le Stade olympique serait doté d’un toit rétractable qu’on pourrait ouvrir et fermer à volonté. Mais après une si longue attente, l’important est de régler le problème. Une structure fixe fera l’affaire si ce projet de toit « démontable » s’avère impraticable.

Cela ne nuirait pas à la candidature de Montréal comme ville d’accueil de quelques matchs de la Coupe du monde de soccer de 2026. Des rencontres de ce tournoi ont été présentées dans des stades couverts en 1994 aux États-Unis (Pontiac, Michigan) et en 2002 au Japon (Sapporo). Il existe donc des précédents.

Espérons maintenant que rien ne fera dérailler ce projet de nouveau toit. Oui, la patience est parfois récompensée. La preuve : le nouveau CHUM, après un interminable feuilleton, a fini par ouvrir ses portes…

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