Montréal Des occasions à saisir

Une chance unique en matière de leadership

Architecte, urbaniste et gestionnaires de projets, Clément Demers porte un regard optimiste sur l’avenir de la métropole. Il identifie trois grands pôles d’intervention incontournables.

Certains s’inquiètent perpétuellement de la croissance et de l’essor de Montréal.

Je ne suis pas du nombre.

Au contraire, j’estime que Montréal et l’ensemble de la région métropolitaine sont en excellente position pour profiter aujourd’hui d’une occasion exceptionnelle créée en 2011, avec l’adoption du Plan métropolitain d’aménagement et de développement (PMAD) de la Communauté métropolitaine de Montréal (CMM).

Rappelons que ce PMAD, attendu depuis 30 ans, a été unanimement adopté par 12 MRC et villes-MRC, 2 agglomérations et 82 municipalités de la région et favorablement accueilli par le gouvernement du Québec, et ce, notamment grâce au rôle de sensibilisation et de consultation assumé par la CMM auprès de l’ensemble de ces instances, mais aussi d’un grand nombre de résidants (plus de 340 mémoires déposés). Ce plan est crucial, car, non seulement il donne une vue d’ensemble de la région de Montréal, il définit une vision de celle-ci en matière d’aménagement urbain, de transport et d’environnement.

D’un tel plan découlent les schémas d’aménagement des MRC, puis les plans d’urbanisme des municipalités, parfois modifiés pour se conformer à ces schémas et au Plan. Depuis cette adoption, le scepticisme des partenaires de la région a donc fait place à une assimilation et à une meilleure compréhension des notions de densité, de périmètre d’urbanisation, de TOD (Transit Oriented Development), de multifonctionnalité et d’aires protégées, telles qu’elles puissent être appliquées en tel ou tel lieu du territoire.

En matière d’environnement, le PMAD se fonde sur des modèles connus et adoptés dans la plupart des grandes villes du monde, où l’on vise à ce que 17 % du territoire soit protégé. 

On est encore loin d’avoir atteint cet objectif dans la région de Montréal, où la protection touche à peine 9,6 % du territoire — incluant le fleuve ! Il reste donc beaucoup à faire.

Avec un Plan qui se donne simultanément des objectifs d’aménagement, de transport et d’environnement, la dynamique du développement urbain est modifiée :  les villes n’ont plus les moyens, comme ce fut le cas il y a quelques décennies, d’acheter tout le territoire souhaité pour en faire ce qu’elles veulent. Quant aux promoteurs, ils ne peuvent continuer à contribuer à un étalement urbain coûteux, et ils doivent se soumettre aux règles de protection des terres agricoles, des boisés, des milieux humides et des espèces menacées.

Si on veut réduire les conflits potentiels entre promoteurs, propriétaires terriens, municipalités et citoyens, conflits qui peuvent mener à une judiciarisation longue et coûteuse pour toutes les parties, la condition principale est le leadership politique. Or, précisément, l’actuel président de la Communauté métropolitaine de Montréal et maire de Montréal, Denis Coderre, est un rassembleur à l’échelle régionale et il a en mains tous les outils (dont le Plan) et la légitimité électorale qui lui permettent d’assurer dans l’harmonie la réalisation du PMAD.

RÉSEAU ÉLECTRIQUE DE MONTRÉAL

En outre, le nouveau contexte des grands projets urbains est plus que favorable : prenons l’exemple du réseau électrique de Montréal (REM) récemment dévoilé par la Caisse de dépôt et placement du Québec : il partira du Quartier DIX30 à Brossard, empruntera le nouveau pont Champlain et joindra le nord et l’ouest de l’île de Montréal. Ce type de projets donne accès à des sources de financement à la fois publiques et privées, allant de la « captation foncière » (capacité de tirer profit du développement riverain) jusqu’aux subventions des programmes gouvernementaux d’infrastructures. Le projet de la Caisse contribuera par ailleurs à réduire sensiblement la circulation automobile aux heures de pointe au centre-ville, ce qui est un enjeu environnemental majeur, et il permettra, dans le respect des règlements de zonage et dans le souci d’améliorer la qualité de vie en ville, la création de quartiers TOD combinant proximité des transports collectifs, densité et qualité d’aménagement public et d’architecture.

L’harmonie visée suppose que l’ensemble des parties cherche et discute des meilleures solutions, en gardant à l’esprit l’ensemble de la vision du PMAD. On n’implantera pas de TOD contre la volonté des habitants d’un quartier urbain ou de banlieue. L’esprit doit plutôt être : quelles sont les qualités d’un terrain et quel sont les meilleurs usages qu’on peut en faire ? Comment créer un quartier de type TOD qui permette de conserver un boisé ou des milieux humides ? De bonnes analyses de la valeur de chaque parcelle permettront sans aucun doute, parfois au prix d’une médiation entre les parties concernées – Vivre en ville, UPA, IPAM ou autres – , des revalorisations et des échanges de terrains permettant au bout du compte de réduire les coûts d’acquisition et d’accélérer la mise en œuvre du Plan.

J’insiste : on ne doit pas laisser passer cette occasion unique que constitue le leadership politique actuel associé à un Plan d’aménagement et de développement qui fait consensus. C’est un heureux mandat qui échoit au président de la CMM de porter et de réaliser enfin un projet aussi prometteur pour l’essor de Montréal.

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