Musique

En somme… Brown

Jamaïcain anglophone, Québécois francophone, Noir, Blanc, en somme… Brown. Deux artistes hip-hop de Montréal et leur paternel ont entrepris de créer un trio familial sur la base de leur métissage interracial et interculturel.

Hip-hop, rocksteady, dancehall, psychédélisme en rock sont les référents musicaux. Sur des beats façonnés avec des sons organiques, on y rappe, on y chante, on frappe souvent dans le mille. Pas d’équivalent dans notre île !

Avec nous pour cet entretien : papa Robin Kerr et ses fistons Snail Kid (Grégory, aussi membre de Dead Obies), Jam (David, associé aussi à K6A et P-Dox), sans compter le cousin Toast Dawg, beatmaker québécois renommé qui a coréalisé plusieurs chansons de ce premier opus signé Brown – paru vendredi sous étiquette 7ième Ciel.

JAM : « La base de tout ça ? Ça a commencé dans les partys de famille. Mon père prenait sa guitare et se mettait à chanter, je mettais des beats derrière, mon frère et moi essayions de le suivre. Et là, on se disait qu’un groupe à trois était possible. »

SNAIL KID : « Petit, j’ai vu mon frère rapper, j’ai commencé à rapper secrètement. Un jour, il est tombé sur ce que je faisais, on a tout de suite parlé d’un projet familial. Pour moi, l’influence numéro un était celle de notre père. Je l’avais toujours entendu chanter ! Quand j’étais enfant, il n’y avait que du reggae. »

Rocksteady, reggae, dancehall, mettez-en. Originaire de Montego Bay, Robin Kerr s’est installé au Québec il y a 30 ans. Ses fils sont nés d’une union avec une enseignante québécoise et francophone. Les Beaudin-Kerr ont grandi dans Hochelaga-Maisonneuve avant d’aller vivre à Greenfield Park pour ensuite faire leur vie à Montréal. Robin ne maîtrise pas le français, alors que Greg et David le parlent parfaitement avec l’accent québécois de maman.

ROBIN : « J’étais musicien professionnel en Jamaïque. J’ai commencé à jouer dans les années 60, soit lorsque le rocksteady s’est transformé en reggae. Avant de venir au Canda, je gagnais ma vie dans les hôtels jamaïcains. J’y proposais parfois mes propres chansons. Au Québec, j’ai joué avec plusieurs groupes reggae de Montréal, particulièrement Uprising. Mon style est aussi influencé par la soul. »

JAM : « Effectivement ! Les premiers vinyles soul ou R&B que j’ai eus lorsque j’ai commencé à faire de l’échantillonnage, c’étaient ceux de mon père : Isley Brothers, O’Jays, Teddy Pendergrass, j’en passe. La soul et le son Motown sont très présents dans la musique jamaïcaine. »

SNAIL KID : « Il y avait aussi de la musique québécoise dans la famille élargie, mais à la maison, ce n’était que du son jamaïcain. Pour nous, c’était l’expression d’une culture forte. »

JAM : « Qu’on se soit ensuite intéressés au hip-hop était logique, naturel, dans l’ordre des choses. »

Au terme de l’adolescence, David a fréquenté quelques cégeps, il a finalement effectué de courtes études en sonorisation avant de se consacrer exclusivement à sa passion : le hip-hop. Grégory, lui, a étudié le théâtre au cégep de Saint-Hyacinthe mais n’a pas terminé le programme vu son implication au sein de Dead Obies, dont il est l’un des rappers émérites. L’appel était plus fort que celui des études collégiales, doit-on comprendre. Et voilà le trio père-fils. Force est d’observer que l’approche préconisée par cette collaboration diffère de tous leurs projets antérieurs et présents.

JAM : « À part une chanson, les beats ne sont pas faits d’échantillons préenregistrés, mais bien d’instruments conventionnels et de sons naturels. Pour ce faire, je me suis éduqué musicalement : j’ai appris mes gammes, j’ai écouté beaucoup de musique, dont une bonne dose de rock psychédélique. Je me suis mis sérieusement au piano et à la guitare. Rapidement, j’ai composé des trucs, je me suis dit alors que je ferais toute la musique de Brown. Ainsi, j’ai invité mon père à enregistrer des parties précises, ou même à en créer lorsque c’était requis. Parce que mes musiques étaient incomplètes, pas assez meublées, j’ai ensuite fait appel à Toast Dawg afin qu’il m’aide à compléter le tout. »

TOAST DAWG : « Nous avons déplacé des trucs, modifié des structures, enlevé des couches, ajouté des couches. On écoute l’album aujourd’hui, on dirait le montage de plein d’échantillons alors qu’il n’y en a presque pas. Nous avons utilisé guitare, batterie, synthétiseurs analogiques, Fender Rhodes et plus encore. Nous avons aussi enregistré des sons que nous avons ensuite utilisés, nous avons repris des fragments de séances d’improvisation préalablement enregistrées. Tout s’est finalement imbriqué. »

L’idée de métissage n’est pas un objectif dans le cas qui nous occupe, c’est plutôt une réalité, une origine de laquelle émergent chant et rap.

SNAIL KID : « Le métissage est un point de départ, après quoi les chansons peuvent aller dans toutes sortes de directions. On ratisse large, on rappe en franglais car le métissage se trouve aussi dans la langue. On joue avec les contradictions de notre société, mais aussi avec celles qui se trouvent à l’intérieur de nous-mêmes. Prenez la chanson Parapluie, c’est le sentiment contradictoire de vouloir aller de l’avant mais d’être aussi nostalgique de ce qu’on a déjà vécu. Brown, en somme, c’est un projet très proche de ce que nous sommes pour de vrai. »

Brown se produit le 6 février prochain au Club Soda, en première partie de Koriass

Cirque

Machine de cirque triomphe en Allemagne !

Le collectif québécois Machine de cirque reçoit des critiques élogieuses de son spectacle présenté à Munich depuis une semaine. « Un grand divertissement », « Fantastique, charmant, hilarant », voilà quelques-uns des grands titres employés par les médias munichois. Le spectacle qui met en vedette 10 artistes sera présenté en Allemagne environ 200 fois au cours des six prochains mois. Les jeunes artistes de cirque qui évoluent dans un décor de cordes et de poulies font notamment des numéros de planche coréenne, de jonglerie et de vélo acrobatique. — Jean Siag, La Presse

Ce texte provenant de La Presse+ est une copie en format web. Consultez-le gratuitement en version interactive dans l’application La Presse+.