Bâtisseurs d’Amérique – Des Canadiens français qui ont fait l’histoire 

Les leçons des bâtisseurs

L'ouvrage Bâtisseurs d’Amérique trace le portrait de 13 Canadiens français, hommes et femmes, ayant marqué le continent. André Pratte, Lucien Bouchard et Antoine Dionne-Charest ont collaboré à ce livre, lancé hier. Ils nous présentent des leçons à tirer de ces pionniers pour relever les défis d’aujourd’hui.

Avant la Révolution tranquille 

« Le grand défi du Canada est de trouver le juste équilibre entre l’exploitation des ressources naturelles, la protection de l’environnement et le droit des autochtones », souligne André Pratte, qui a codirigé l’ouvrage. 

Plusieurs des personnages du livre auraient des enseignements à offrir dans ce dossier, même si les temps ont bien changé, rappelle le sénateur. 

Il faut d’abord une vision claire, comme pouvait la concevoir un Henri Bourassa, politicien et fondateur du Devoir, pense-t-il. 

Puis du pragmatisme, comme en faisait preuve George-Étienne Cartier, un des Pères de la Confédération. 

« Et une approche typiquement française de travailler avec les autochtones, comme celle du sieur de La Vérendrye et du père oblat Albert Lacombe », ajoute-t-il. 

Ce livre original est composé de textes rédigés par plusieurs personnalités, francophones et anglophones, de tous les milieux. 

« On y découvre que les Canadiens français ont fait des choses exceptionnelles bien avant la Révolution tranquille. »

— André Pratte

Parmi les auteurs, l’écrivaine Margaret Atwood fait le portrait de Gabrielle Roy. Chrystine Brouillet, celui de la cuisinière Jehane Benoit. 

Ken Dryden raconte l’histoire de Jacques Plante, la première légende à garder le filet du Canadien. Et la médecin et écrivaine Vania Jimenez présente le cardiologue Paul David.

Culture et développement 

L’ex-premier ministre du Québec Lucien Bouchard s’est penché sur la vie du député fédéral Henri Bourassa. Cet être de feu, d’intelligence, de culture et de réflexion a combattu pour la souveraineté canadienne face à l’Empire britannique. 

Selon M. Bouchard, le grand orateur s’interrogerait aujourd’hui sur la qualité de la langue française. Et il mènerait probablement un combat pour donner plus de place à la lecture et à l’histoire. 

« Il suffit de lire ses discours ou ceux d’Armand Lavergne ou de Wilfrid Laurier pour voir les références littéraires et leurs connaissances du grec et du latin, dit M. Bouchard. Ça nous frappe. » 

Selon lui, Bourassa favoriserait le développement du Québec dans un monde globalisé où les idées circulent, pense-t-il. Mais il s’assurerait que sa culture et son identité ne soient pas effacées. 

« Il faut s’ouvrir à l’immigration et il faut combattre les préjugés et l’intolérance. Et, au-delà du multiculturalisme prôné à Ottawa, c’est au Québec de définir sa propre politique d’immigration pour accueillir et intégrer les immigrants. »

— Lucien Bouchard

Du côté constitutionnel, l’ex-premier ministre précise que la question est en suspens. « Bourassa était un grand fédéraliste, dit-il. Il n’a jamais considéré, à l’époque, que le Québec pouvait se séparer. Mais qui sait ce qu’il en penserait aujourd’hui ? » 

Le Québec n’a toujours pas ratifié la Constitution canadienne. « Ce n’est pas réglé, dit M. Bouchard. Et ce ressort, très fort, peut être activé. »

Économie et dualité 

L’ex-premier ministre du Québec Jean Charest a accepté de raconter l’histoire du politicien conservateur George-Étienne Cartier. Il l’a fait avec son fils, Antoine Dionne-Charest, étudiant au doctorat en philosophie à l’Université de Montréal. 

« Je m’intéresse à la politique québécoise et canadienne, dit-il. Et c’était une belle occasion d’écrire ensemble, mon père et moi. » 

Selon lui, Cartier nous enseigne l’importance du développement économique pour que le Québec soit pleinement autonome.

« À son époque, il a favorisé la construction des chemins de fer, un des moteurs supportant la création du pays. »

— Antoine Dionne-Charest 

Par ailleurs, George-Étienne Cartier incarne l’union entre la nation du Québec et le reste du Canada. « Si la définition traditionnelle de cette dualité est remise en cause, on peut la définir autrement et dire que la nation canadienne-française, surtout le Québec, défini par ses institutions, sa culture et sa langue, préexiste à la nation canadienne », dit-il. 

Dans leur texte, les Charest père et fils soulignent que le Canada a permis aux Québécois de passer de la survivance à l’épanouissement. « De devenir une nation à part entière qui, nous osons le mot, exerce sa souveraineté sur les domaines essentiels de la vie des Québécois. »

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