Société

Le « staycation », une mode ?

Les vacances à la maison ont toujours existé, mais le terme « staycation » – un mot-valise formé par les mots « stay » (rester) et « vacation » (vacances)  – est apparu en 2003 sous la plume d’un journaliste américain. Deux ans après les attentats terroristes du 11 septembre 2001.

« Le premier boom du “staycation”, ç’a été à la suite des attentats de 2001, indique Paul Arseneault, titulaire de la Chaire en tourisme Transat à l’École des sciences de la gestion de l’Université du Québec à Montréal (UQAM). Dans les mois qui ont suivi, les Américains n’ont plus voulu sortir des États-Unis, n’ont plus voulu sortir de la maison. »

Dès lors, note Paul Arseneault, on a vu apparaître une industrie qui est très, très forte aujourd’hui : celle du cinéma maison, du « home-staging », du jardinage… L’industrie entourant la maison, quoi.

« Dans les Home Depot et les Canadian Tire de ce monde, il y a des meubles de jardin, des barbecues, le kit de patio… C’est le paradis du “ne partez pas en vacances, les amis” », résume Paul Arseneault.

Son collègue Benoit Duguay, professeur au département d’études urbaines et touristiques de l’UQAM, abonde dans le même sens : « Est-ce que le “staycation” est devenu une mode, qui irait un peu avec le “coconnage” ? Est-ce que ça ne fait pas chic de dire : “Je reste chez moi” ? »

Dans une société de performance où la famille n’est plus ce qu’elle était, les vacances à la maison répondent sans doute à un besoin de relaxer et de se rassembler, croit Paul Arseneault.

« Pendant une période X, il n’y aura pas d’aquaforme, pas de soccer, pas de baseball, pas de gymnastique. On va rester dans cette maison-là, qui coûte d’ailleurs de plus en plus cher. »

— Paul Arseneault, titulaire de la Chaire en tourisme Transat à l’École des sciences de la gestion de l’UQAM

Paul Arseneault souligne que le « staycation » demeure moins populaire auprès de la génération Y, friande de voyage.

Mode ou pas, besoin ou pas, ce ne serait pas étonnant que bon nombre de Québécois réduisent leurs budgets de vacances dans les prochaines années, croit Benoit Duguay. « Si les taux d’intérêt montent [NDLR : la Banque du Canada a relevé cette semaine son taux directeur, ce qui entraîne une hausse des taux d'intérêt], avec les taux d’endettement actuels, les gens vont avoir de la difficulté à respecter leurs obligations financières. Dans un contexte comme celui-là, ce ne serait pas surprenant de voir les gens annuler leurs vacances. On va appeler ça du “staycation”, mais en réalité, ce sera du “no vacation”. »

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