La question du proprio

Une quittance, pourquoi faire, donc ?

De nombreux lecteurs nous ont écrit pour en savoir plus sur la quittance, ce document officiel attestant que l’hypothèque d’une propriété est totalement payée, et que la maison est libre de tout droit, à part celui du propriétaire actuel.

La quittance est publique, inscrite au Registre foncier du Québec. Elle sécurise l’acheteur d’une maison. Mais en faut-il absolument une ?

Un couple nous raconte, par courriel, avoir obtenu deux avis contraires : la première, de l’institution financière (pas de quittance) et la seconde, d’un notaire (une quittance sans tarder), notaire qui a nuancé son propos par la suite (pas de quittance si vous ne comptez pas vendre). Comment s’y retrouver ?

SCÉNARIO UN : ON VEND LA MAISON

Si vous souhaitez vendre à court terme, la situation est limpide : il vous faut une quittance. Le document sera exigé par le notaire de l’acheteur.

« La quittance régularise la situation, explique Me Ginette Allard, du bureau De Grandpré Joli-Coeur, avocats-notaires. Elle signifie que le notaire a vérifié plusieurs choses : s’il y a une autre hypothèque, sans qu’on le sache, sur la maison ; s’il y a d’autres mentions à relier à l’acte de quittance ; si ceux qui ont signé la lettre de l’établissement financier avaient bien la qualité et le pouvoir de le faire, etc. Enfin, le notaire vérifie, après un certain délai, que le changement au Registre foncier a bien été effectué. »

Obtenir une quittance demande un à deux mois, parfois trois.

SCÉNARIO DEUX : ON NE VEND PAS

Si on ne souhaite pas vendre à court terme, le besoin ou non d’une quittance dépend en partie du type d’hypothèque en cause, explique Me Allard.

« Si l’hypothèque est à l’ancienne, c’est-à-dire conçue pour payer seulement une maison, mieux vaut demander une quittance, même si on ne veut pas vendre. Ça risque de coûter plus cher, si on laisse le temps passer. On risque aussi d’égarer la lettre de la banque nous signifiant qu’on arrive au dernier paiement. » — Me Ginette Allard

Les hypothèques, toutefois, sont de plus en plus de type « multiprojets » (parapluie). Elles couvrent plusieurs types d’obligations, présentes et futures (rénovations, achat d’une auto, d’un chalet, etc.) « On doit alors se poser deux questions, reprend Me Allard. Primo : a-t-on l’intention de vendre à court terme ? Secundo : est-il possible qu’on ait besoin d’une nouvelle avance de fonds, à moyen terme, pour un autre projet ? »

Si la deuxième proposition s’avère, laisser l’hypothèque ouverte permettra, éventuellement, de bénéficier d’un prêt à des conditions avantageuses.

AGIR SEUL ?

Il fut un temps où on pouvait obtenir par soi-même la quittance. Mais depuis 1994, le Code civil du Québec exige qu’un notaire ou un avocat attestent la teneur de l’acte. Une fois le sceau du notaire apposé, « on peut se présenter au Registre foncier et demander à ce que la quittance soit publiée », signale Nicolas Bégin, porte-parole du ministère de l’Énergie et des Ressources naturelles du Québec.

On peut se procurer en ligne, à peu de frais, un formulaire de quittance. Mais le jeu ne semble pas en valoir la chandelle. D’abord, il faut vérifier que l’institution financière acceptera de signer ce formulaire. Ensuite, les notaires et avocats n’y verront guère matière à diminuer de beaucoup leurs honoraires, lesquels se situent, en général, entre 300 $ et 500 $. 

« Le gros du travail n’est pas de remplir un formulaire, mais bien de procéder aux vérifications », explique Me Yves Papineau (Papineau avocats inc.), avocat spécialisé en droit immobilier.

Les honoraires du notaire incluent une tranche de 150 $ allouée au Bureau de la publicité des droits, pour l’inscription au Registre foncier. Si on agit seul, on devra soi-même payer ce montant.

ASSURANCES

Après avoir payé toute son hypothèque, un lecteur a bénéficié d’un rabais de 60 $ par année sur son assurance habitation, montant qu’il a obtenu rétroactivement, après neuf ans ! « Cette pratique est un avantage concurrentiel laissé à la discrétion de l’assureur, avec ou sans quittance, souligne Caroline Phemius, du Bureau d’assurance du Canada. Ce n’est pas une norme de l’industrie. »

Deux sociétés d’assurances contactées par La Presse, Desjardins assurances et Intact assurance, affirment qu’une maison libre de créancier peut générer chez eux un rabais de la prime d’assurance habitation. « Ça dépend de l’ensemble du dossier, dit Valérie Lamarre, chez Desjardins. Même chose pour le besoin ou non de quittance. »

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