Cyclisme

Une année de vérité pour Karol-Ann Canuel

La cycliste Karol-Ann Canuel s’attaque cette année au plus important défi de sa carrière : le contre-la-montre des Jeux olympiques de Rio de Janeiro. Le point sur sa préparation.

TRANSFERT

Karol-Ann Canuel s’était vidée de toute son énergie dans les derniers hectomètres du contre-la-montre par équipes des Championnats du monde de Richmond, l’automne dernier. Au point de voir des étoiles quelques secondes après avoir traversé la ligne d’arrivée. Son effort avait permis à Velocio-SRAM de devancer de justesse Boels-Dolman et de gagner sa quatrième médaille d’or consécutive, la deuxième pour la Québécoise. La seule cycliste canadienne détentrice d’un titre mondial sur route savait qu’elle disputait alors sa dernière course avec Velocio-SRAM, qui a fermé ses portes à la fin de l’année. Dix jours plus tard, Canuel a annoncé qu’elle se joignait à Boels-Dolman, formation néerlandaise dans laquelle elle épaulera la championne du monde, la Britannique Elizabeth Armitstead.

PREMIER CONTACT

Canuel a effectué un premier stage avec ses nouvelles équipières à la fin du mois de janvier à Calpe, en Espagne. Premier constat : c’est du sérieux. « Avec Velocio, les camps, c’était plus avec les commanditaires, raconte l’athlète de 27 ans en entrevue téléphonique. On rencontrait beaucoup de monde. Tandis que là, le camp, c’est le camp. On s’entraîne ! » La moitié de l’effectif de 12 coureuses se préparait pour le Tour du Qatar, disputé du 2 au 5 février. « Les filles étaient pas mal en forme. Pour moi, c’était... le mois de janvier ! L’ambiance est belle. C’est vraiment comme une grande famille. » Elle connaissait déjà l’Américaine Evelyn Stevens, qui s’attaquera au record de l’heure samedi au Colorado, et la Néerlandaise Chantal Blaak, avec qui elle a couru en 2014 chez Specialized-lululemon (devenue Velocio-SRAM).

SANTÉ

Victime de deux blessures graves au milieu (vertèbre et côte fracturées) et à la fin (bassin fissuré) de la saison 2014, Canuel entreprend l’année sans être passée par une période de récupération. « Ça fait vraiment une grande différence, constate la diplômée universitaire en sciences infirmières. Je suis contente de ma forme pour le moment. C’est sûr que ça va être bon pour moi de commencer à faire des courses. » Elle effectuera sa rentrée dimanche à l’Omloop van het Hageland-Tielt-Winge, en Belgique. Suivront Le Samyn des Dames (2 mars, Belgique) et les Strade Bianche (5 mars, Italie), toute première épreuve du nouveau WorldTour féminin.

OBJECTIF JO

Au moment de l’entrevue, Canuel attendait avec impatience la livraison de son nouveau vélo de contre-la-montre Specialized. Sur cette monture, elle tentera de gagner une médaille aux Jeux olympiques, son grand objectif de l’année. Sa sixième place surprise aux Mondiaux de Ponferrada, en 2014, en a fait une prétendante pour Rio de Janeiro, où le parcours accidenté risque de lui sourire. « Je pense que j’ai évolué encore plus l’an passé, note la championne canadienne. C’est dommage parce que je n’ai comme pas pu le prouver aux Mondiaux, parce que j’étais tellement fatiguée du contre-la-montre par équipes. » Signes de sa progression, elle relève sa troisième place d’étape à l’Internationale Thüringen Rundfhart, en Allemagne, et sa deuxième place au Chrono de Gatineau, où elle compte bien retourner le 3 juin malgré l’absence de son équipe. Les championnats canadiens Global Relay (25 au 29 juin) à Ottawa et Gatineau, sa ville d’adoption, auront aussi une importance particulière.

RECONNAISSANCE

Après une première visite en mars 2015, Canuel effectuera une deuxième reconnaissance du parcours du contre-la-montre des Jeux olympiques, le mois prochain. Ce sera l’occasion d’évaluer les quelques modifications apportées au tracé original. Elle veut en profiter pour tester du matériel, dont des roues. « Il y a une section de pavés assez intense, souligne-t-elle. Je veux voir ce qu’il y aura de mieux à utiliser pour les Jeux. » Elle retournera aussi sur les deux montées qui pimenteront le parcours de 30 km : Grumari (7 % sur 1,2 km, dont un passage à 13 %) et Grota Funda (4,5 % sur 2 km). Par ailleurs, la native d’Amos doit effectuer des tests ces jours-ci au vélodrome de Valence pour raffiner son aérodynamisme.

CONFIANCE

Boels-Dolman a recruté Canuel pour son contre-la-montre, mais aussi pour ses habiletés dans les courses par étapes. La principale intéressée s’est surprise elle-même en terminant deuxième de l’Internationale Thüringen Rundfahrt. Appelée à défendre le maillot de meneuse d’une coéquipière, elle s’était glissée dans une échappée lors de la dernière étape qu’elle avait remportée. Elle avait perdu le tour par 10 secondes. « Je me souviens qu’à cette course, c’était vraiment de savoir qui on laissait partir ou pas. Je ne croyais pas nécessairement en mes chances de gagner. J’aurais peut-être dû y croire plus, et j’aurais peut-être ramené le maillot jaune à ce moment-là. Je m’en suis tellement voulu. J’ai appris beaucoup de ça. Il s’agit de courir intelligemment même quand c’est dur. »

PARTENAIRE DE LUXE

Pour la première fois de sa carrière, Canuel a passé l’hiver à Gérone, où elle partage un logement avec Michael Woods, un ami d’Ottawa. L’ancien spécialiste de course à pied a effectué des débuts fracassants sur le WorldTour avec sa nouvelle équipe Cannondale, terminant cinquième du Tour Down Under. « On a fait nos sorties faciles ensemble », a dit Canuel. « Difficiles pour moi », a blagué Woods en arrière-fond. Pour l’anecdote, Woods et Canuel sont aussi les détenteurs du « record » non officiel de l’ascension du volcan Haleakala, à Hawaii, plus longue montée asphaltée du monde. Après avoir effacé la marque de Ryder Hesjedal sur les 55,5 km en décembre 2013, Woods a suggéré à son amie de tenter sa chance lorsqu’elle est venue assister à son mariage dans l’île un an plus tard. La Canadienne Catharine Pendrel, double championne mondiale de vélo de montagne, détenait le temps de référence jusque-là.

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