Grand parc-nature d’Anjou et usine solargise

Faire gagner l’est de Montréal deux fois

Plutôt que de tuer une bonne initiative pour en réaliser une autre, travaillons ensemble à concrétiser les deux projets.

L’entreprise britannique Solargise a annoncé récemment son intention d’investir dans la construction d’une usine de panneaux solaires dans l’est de Montréal. Selon plusieurs intervenants économiques, la réalisation de ce projet pourrait « changer la donne » en positionnant stratégiquement ce secteur dans le domaine des technologies propres, en plus de créer des centaines d’emplois qualifiés dans un domaine innovant.

L’Est a été délaissé depuis trop longtemps par les pouvoirs publics. On y trouve une concentration gênante de pauvreté et de terrains industriels à l’abandon, une mauvaise desserte en transport collectif et un manque d’espaces naturels et récréatifs qui pourraient augmenter la qualité de vie des gens de l’est de l’île. L’Est a besoin d’emplois, de transports en commun et de grands parcs. Si tant est qu’il soit sérieux et qu’il tienne la route, le projet de Solargise est une excellente nouvelle tant pour l’est de la métropole que pour Montréal et le Québec tout entier.

Le hic, c’est que le terrain identifié par le promoteur, le site du golf d’Anjou, annexé au parc-nature du Bois-d’Anjou, est destiné à devenir l’un des plus grands parcs urbains de la région de Montréal. La Ville de Montréal a d’ailleurs créé une réserve foncière sur ce terrain et manifesté son intention d’en faire l’acquisition afin de créer le parc-nature d’Anjou. Cet espace vert de près de 120 hectares doit contribuer à rééquilibrer l’accès à la nature entre l’est et l’ouest de l’île de Montréal et à en améliorer la qualité de l’air. Ce projet est le fruit de plusieurs années de travail de la part d’une multitude d’intervenants ayant à cœur la santé publique, l’équité sociale et la qualité de l’environnement.

L’espérance de vie des gens de l’Est est de plusieurs années inférieure à la moyenne québécoise, notamment en raison de la mauvaise qualité de l’air. Les gens de l’Est méritent d’avoir accès à la même qualité d’environnement que ceux du centre et de l’ouest de l’île.

Nous croyons qu’il y a place pour les deux projets dans l’est de Montréal. Nous pouvons y accueillir à la fois un grand parc urbain et une usine de panneaux solaires. L’est de l’île recèle des millions de pieds carrés qui n’attendent qu’à être revitalisés. Sur le seul site de l’ancienne raffinerie Shell, près de 8 millions de pieds carrés (plus de 70 hectares) peuvent aujourd’hui accueillir des investissements qui permettront de verdir l’économie. Le potentiel de développement économique de l’Est est immense, sans pour autant gruger un pouce de l’actuel golf, ni compromettre la création du grand parc-nature d’Anjou.

Les intervenants économiques interpellés

En échange de son implantation sur le site de l’ancien golf d’Anjou, Solargise, soutenue par la firme de relations publiques National, nous demande de sacrifier le projet de grand parc-nature dans l’Est. C’est une proposition qui tue un bon projet pour en faire passer un autre. Au cours des prochaines semaines, il nous faut travailler ensemble à la réalisation des deux projets. Nous devons trouver rapidement un autre terrain pour le projet Solargise dans l’est de Montréal que celui du golf d’Anjou, qui est déjà destiné à d’autres fins. Il y a de la place dans l’Est pour Solargise, et nous travaillerons avec les acteurs économiques afin d’accueillir cet investissement structurant pour tous. Nous demandons à la mairesse de Montréal, Valérie Plante, de réaffirmer son intention de créer un grand parc-nature dans l’Est avec la fusion du site de l’ancien golf au Bois-d’Anjou. Nous demandons du même souffle aux intervenants économiques de l’Est de proposer un terrain alternatif qui pourra accueillir l’investissement de Solargise.

Tous, intervenants économiques, sociaux, politiques et environnementaux, nous réclamons du vrai développement durable. À nous maintenant de réaliser ces deux projets de front. Ensemble, nous pouvons faire gagner l’est de Montréal deux fois plutôt qu’une.

* Autres signataires

Alexandre Beaudoin, biologiste et expert en développement durable, Jacques Brisson, professeur titulaire, Institut de recherche en biologie végétale, Université de Montréal, Sonia Côté, directrice par intérim, Solidarité Mercier-Est, Pierre-Alain Cotnoir, président, Maison de la coopération du Montréal métropolitain, Coralie Deny, directrice générale, Conseil régional de l’environnement de Montréal (CRE-Montréal), Gilles Dubois, président sortant, Conseil régional de l’environnement de Montréal (CRE-Montréal), Véronique Fournier, directrice générale, Centre d’écologie urbaine de Montréal (CEUM), Gareth Richardson, président, Coalition verte, Steven Guilbeault, cofondateur et directeur principal, Équiterre, Karel Mayrand, directeur pour le Québec et l’Atlantique, Fondation David Suzuki, Raymon Moquin, président, Collectif en environnement Mercier-Est, Simon Octeau, directeur par intérim, Regroupement des éco-quartiers, Stéphanie Pellerin, professeure associée, Institut de recherche en biologie végétale, Jardin botanique de Montréal, François Reeves, Cardiologue d’intervention, CHUM et Cité de la santé de Laval, Gareth Richardson, président, Coalition verte, Owen A. Rose, architecte, ROSE architecture, Charles Sainte-Marie, vice-président, Conseil central du Montréal métropolitain-CSN, Qussaï Samak, ancien commissaire, Bureau d'audiences publiques sur l'environnement (BAPE), Jonathan Théoret, directeur, Groupe de recherche appliquée en macroécologie (GRAME), Alain Branchaud, directeur général, Société pour la nature et les parcs - division Québec

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