Commerce de détail

Les grands détaillants du monde sous la loupe

Quels détaillants réalisent les ventes les plus élevées de la planète ? Dans quels pays sont-ils situés ? Que vendent-ils ? Toutes les réponses se trouvent dans le Global Powers of Retailing 2018 de Deloitte, une étude rendue publique hier qui identifie les 250 détaillants les plus importants du monde. Et qui nous permet de dégager les grandes tendances de l’heure. Un dossier de Marie-Eve Fournier

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Huit grandes tendances

Amazon monte en flèche

La croissance exponentielle d’Amazon lui permet d’accéder au 6e rang, un an après être entré dans le top 10. En 2001, le détaillant était à la 157e position, ce qui illustre bien sa trajectoire unique dans l’industrie. « Le géant du détail est plus gros et plus puissant que jamais. Il continue de pénétrer de nouveaux marchés, d’accroître son assortiment de produits et de tester de nouvelles technologies et de nouveaux concepts, laissant un chemin de perturbation dans son sillage », écrit Deloitte en prédisant que la hausse va se poursuivre grâce à l’acquisition des supermarchés Whole Foods Market. Mais la palme de la croissance la plus rapide revient à Vipshop Holdings Limited, de Chine (+ 104 % depuis 5 ans).

Parler pour acheter

Les assistants vocaux tels Amazon Echo, Echo Dot et Google Home sont déjà en train de « perturber le chemin d’achat », rapporte Deloitte. Car il est possible d’acheter sur Amazon.com sans même aller sur le web ; il suffit de s’adresser verbalement à Alexa, la voix des appareils d’Amazon ! « Il n’est pas très étonnant qu’Amazon ait 68 % des parts de marché des assistants vocaux », note le rapport. La réponse de Walmart a été de s’associer à Google (en octobre) pour permettre les achats vocaux, ce qu’ont également fait Home Depot et Target.

Le secteur de la mode encore perturbé

« Les détaillants de mode rapide (fast fashion) continuent de perturber l’industrie du vêtement à travers le monde. L’espagnol Inditex (Zara), le suédois H&M et le japonais Fast Retailing (Uniqlo) ont tous les trois enregistré une hausse moyenne de leurs ventes dans les deux chiffres depuis cinq ans. Il s’agit d’un taux de croissance nettement supérieur à celui des autres détaillants du top 250, qui s’est établi en moyenne à 4,8 %. Deloitte rappelle que ces entreprises ont réduit le cycle de la mode à environ cinq semaines, alors qu’il était traditionnellement de six à neuf mois. »

Domination américaine

Les détaillants américains dominent encore et toujours le classement. Ils occupent 7 des 10 premières positions. Et dans le top 250, on en retrouve 80. Autrement dit, 32 % des plus importants détaillants du monde ont leur siège social dans un seul pays, les États-Unis. Cette proportion est similaire à celle des entreprises européennes (33,8 %). Du point de vue des revenus, cependant, les détaillants américains surpassent largement les Européens ; ils réalisent presque la moitié (47 %) des revenus combinés du top 250 (4400 milliards US), tandis que la portion européenne est de 33,8 % (en baisse de 6 points depuis 10 ans). Depuis une décennie, la part de l’Asie a bondi de 5 points pour atteindre 15,4 %.

Rattraper le temps perdu

Plusieurs détaillants qui avaient pris énormément de retard dans le commerce électronique ont décidé de retrousser leurs manches, constate Deloitte. C’est le cas des supermarchés, dont les ventes en ligne ont bondi de 30 % selon une étude citée par le cabinet comptable. Les pays ayant connu la plus forte croissance depuis un an sont la Chine (+ 52 %), la Corée du Sud (+ 41 %), la Grande-Bretagne (+ 8 %) et la France (+ 7 %). Walmart a par ailleurs prouvé que la vente en ligne faisait partie de ses priorités en investissant des milliards pour vendre de l’épicerie en ligne et acquérir plusieurs entreprises pour accroître son potentiel.

Le défi croissant de la croissance

La croissance des revenus est « un défi » plus laborieux qu’autrefois, constate Deloitte. « Même les 50 détaillants les plus performants [d’aujourd’hui] ne progressent pas aussi vite qu’avant. » Tandis que la progression des revenus de ce groupe était il y a 10 ans de 28,7 % en moyenne (par année sur 5 ans), elle a fondu à 20,9 %. Pour l’ensemble des 250 détaillants du palmarès, la croissance annuelle des ventes sur 5 ans est actuellement de 4,8 %. Il y a 10 ans, elle atteignait 9,1 %.

Biens durables et rentabilité

Le top 250 regroupe 51 entreprises dans le secteur des biens de consommation courante (épicerie, pharmacies), 135 entreprises dans celui des biens durables (électronique, électroménagers) et 43 dans celui de la mode. Les 21 autres offrent des marchandises diverses. Les commerces à la plus forte croissance des revenus vendent des biens durables (moyenne de + 7,6 %). « La hausse est forte depuis 2010, l’économie étant sortie de la crise », écrit Deloitte. Dans le secteur de la mode, la hausse moyenne est de 4,4 %.

De nouveaux venus

En 2017, un nombre record de 6885 magasins avaient fermé leurs portes aux États-Unis, selon Fung Global Retail & Technology, en date du 1er décembre. Mais d’autres détaillants prennent de l’expansion et augmentent considérablement leurs ventes. Cela a permis à certains d’entre eux d’accéder au top 250. En tout, le palmarès compte 10 nouveaux noms : trois du Japon, deux d’Allemagne, deux des États-Unis, un d’Australie, un de Turquie et un autre de l’Inde. La moitié vend de la nourriture. Un seul est uniquement présent en ligne.

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Zoom sur le top 10

Sans surprise, l’indélogeable Walmart demeure au sommet du palmarès avec des ventes à son dernier exercice (486 milliards US) 4 fois plus élevées que celles du détaillant en deuxième place, soit Costco (119 milliards US). Cela fait plus de 20 ans que Walmart est le plus important détaillant du monde.

On observe aussi que les entreprises américaines dominent (7 sur 10) et qu’il y a une majorité de détaillants en alimentation. Toutes les entreprises sauf une (Kroger) sont présentes dans plusieurs pays (15, en moyenne). Trois (Aldi, Schwarz, Carrefour) réalisent plus de la moitié de leurs revenus à l’extérieur de leur pays d’origine.

La marge de profit net des géants du top 10 est de 3 %. Cela est légèrement inférieur à la moyenne des 250 détaillants du classement (3,2 %) en raison du type de marchandise vendue.

Si le top 10 diffère assez peu de celui de l’an dernier, sa composition a beaucoup changé depuis 15 ans. Seulement quatre détaillants de l’époque ont su demeurer au sommet : Walmart, Carrefour, Home Depot et Kroger.

Présence canadienne

Une seule entreprise canadienne fait partie du top 50. Il s’agit de l’épicier ontarien Loblaw, qui exploite les enseignes Maxi et Provigo au Québec. Ses revenus ont atteint 34 milliards US, ce qui lui accorde le 30e rang. Avec des revenus de 18 milliards US, Empire (supermarchés IGA) occupe pour sa part le 53e rang.

Quatre autres détaillants canadiens se retrouvent dans le classement : HBC (87e), Metro (101e), Canadian Tire (111e) et Overwaitea Food Group (249e). Il y a deux ans, on dénombrait deux entreprises canadiennes de plus dans le classement : Rona (avalée par l’américaine Lowe’s) et l’équivalent ontarien de la SAQ, la LCBO (ventes pas suffisamment élevées).

Metro est donc la seule entreprise québécoise du top 250 mondial. Alimentation Couche-Tard n’en fait pas partie, étant donné que ses revenus proviennent principalement de la vente d’essence.

Pour avoir sa place dans le top 10, il faut générer des ventes de 81 milliards US… Un montant que ne réalisent même pas, tous ensemble, les six détaillants canadiens présents dans le classement. Leurs ventes combinées se chiffrent en effet à 75 milliards US.

— Marie-Eve Fournier, La Presse

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