Retour de Kirk Muller

« Il a un talent unique »

Depuis que le Canadien a fait l’annonce de l’embauche de Kirk Muller jeudi soir, il a beaucoup été question de son rôle vital dans la relance d’un avantage numérique moribond.

Et dès la conférence téléphonique d’hier, des questions lui ont été posées sur cet aspect du jeu. Une de ces questions a d’ailleurs donné droit à un moment cocasse. Un collègue lui demandait comment il s’expliquait qu’une équipe comptant sur une aussi bonne première unité d’avantage numérique pouvait en arracher autant. « Michel, sens-toi libre d’intervenir ! », a lancé Muller à la blague.

Cela dit, en parlant à ceux qui l’ont côtoyé ces dernières années, on constate que l’avantage numérique n’est qu’une des facettes qui sont mentionnées. L’utilité de Muller va bien au-delà des bons vieux « X et O ».

ÉPAULER LES MENEURS

Muller a passé les deux dernières saisons comme adjoint de Ken Hitchcock. L’entraîneur-chef des Blues de St. Louis a essentiellement retenu le travail de Muller auprès des meneurs de son groupe que sont David Backes, Alex Steen et Alex Pietrangelo.

« Il a aidé nos joueurs à comprendre que tout le monde les regarde, tout le temps, chaque jour, et que tu ne peux pas te laisser subjuguer par la situation, a expliqué Hitchcock à La Presse. Tu dois plutôt accepter ça comme un défi et apprécier le fait que tu ne peux pas te cacher. »

« Ce n’est pas simplement ton comportement sur la patinoire, mais aussi dans la collectivité, au gymnase. [Muller] montrait aux joueurs comment agir dans toutes les situations. »

— Ken Hitchcock, entraîneur-chef des Blues de St. Louis

« Il peut vraiment aider Max [Pacioretty] à performer à un haut niveau et à ne pas se laisser dépasser par les responsabilités de capitaine, poursuit Hitchcock. Il a aidé nos meneurs à distinguer leurs responsabilités en tant que joueurs de celles en tant que meneurs. Il est bon pour ça, parce qu’il l’a fait toute sa carrière. »

Hier, Muller a déjà dévoilé en partie son approche avec le capitaine du Tricolore.

« Ce que Max doit comprendre, c’est que ce n’est pas le rôle d’une personne. Ce qu’on voit de plus en plus, c’est un lien entre plusieurs joueurs, a-t-il expliqué. Il ne faut pas que la pression soit sur un seul gars, il ne doit pas penser que tout repose sur ses épaules. »

L’INTERMÉDIAIRE PARFAIT

Quand Jacques Martin a été nommé entraîneur-chef du Canadien à l’été 2009, il a conservé un seul des anciens adjoints de Guy Carbonneau : Kirk Muller.

Pendant deux ans, les deux hommes ont travaillé ensemble, menant d’abord le CH à la finale de l’Association de l’Est en 2010, puis à une élimination honorable au premier tour en 2011, en prolongation du septième match, contre l’équipe qui allait soulever la Coupe Stanley ce printemps-là, les Bruins de Boston.

Le mariage entre un Jacques Martin un peu froid et un Kirk Muller près des joueurs a visiblement fonctionné. On peut d’ailleurs se demander si la recette ne pourrait pas être reproduite maintenant que Muller travaille avec Michel Therrien, autre entraîneur qui n’a pas la réputation d’être proche de ses joueurs.

« Je suis un entraîneur de carrière, pas un ancien joueur, donc j’ai toujours eu un ancien joueur dans mon staff, a rappelé Martin, joint à San Jose après un entraînement des Penguins. Tu dois avoir des personnes qui amènent des forces différentes, des personnalités différentes. Kirk a beaucoup d’énergie, d’enthousiasme. C’était un bon mélange avec moi, qui suis plus stable.

« Il avait une bonne connaissance des joueurs », ajoute-t-il.

Hitchcock a tenu des propos similaires au sujet de Muller.

« Il est très heureux dans ce rôle. Ça lui plaît grandement, au point où il en est dans sa vie et dans sa carrière. Il aime cette liberté de se promener entre le vestiaire des joueurs et le bureau de l’entraîneur. Il a un talent unique, car il a été un très bon joueur et un capitaine. Il aime transmettre son savoir aux joueurs individuellement. »

LES FAMEUX AJUSTEMENTS

Manny Malhotra, lui, a d’abord connu Muller comme coéquipier chez les Stars de Dallas au début des années 2000. « J’ai habité chez lui un mois parce que la construction de ma maison n’était pas finie. Lui et sa femme ont tellement été gentils », se rappelle-t-il.

L’ancien numéro 20 du Canadien a ensuite recroisé Muller chez les Hurricanes de la Caroline, en 2013-2014. Malhotra était alors un vétéran aguerri, tandis que Muller était l’entraîneur-chef. Et ce qu’il a retenu de lui, c’est sa capacité à s’ajuster au fil d’un match.

« Il sait comment les joueurs pensent, donc il a un bon feeling sur le banc », a indiqué Malhotra, au bout du fil depuis Vancouver. 

« Si [Muller] sent qu’un gars est dans le match, qu’il en joue une bonne, il ne se gênera pas pour lui donner des présences de plus. Si c’est ton soir, il le sent. »

— Manny Malhotra

Ces ajustements, Muller sait aussi les faire dans ses schémas stratégiques. Selon Hitchcock, c’est ce qui explique pourquoi Muller excelle autant avec ses unités – il fallait bien y revenir ! – d’avantage numérique.

« Sa force réside dans sa capacité à faire que l’unité reste bonne toute la saison, croit Hitchcock. Il ne s’agit pas simplement d’avoir un bon avantage numérique : il a appris à garder le train sur les rails. Il va s’ajuster pendant les matchs, sinon il trouvera une façon de faire les correctifs dès le lendemain à l’entraînement. »

Deux missions

Kirk Muller se retrouvera en territoire connu, et pas seulement parce qu’il s’agira de son troisième séjour à Montréal. Il a en effet dévoilé qu’il aurait deux responsabilités bien précises : les attaquants et l’avantage numérique. Il est d’ailleurs à ce point satisfait de ce rôle qu’il n’a pas souhaité tenter sa chance chez les Flames ni les Ducks, les deux équipes de la LNH toujours sans entraîneur-chef. « Je suis très à l’aise avec le fait de ne pas être l’entraîneur-chef, a assuré Muller. Je savais qu’il y avait deux postes à pourvoir dans la ligue, mais je ne me suis pas lancé là-dedans. J’aime le défi ici. L’avantage numérique, les attaquants, c’est un défi qui me comble pour le moment. » En écoutant cette déclaration, on ne pouvait s’empêcher d’avoir une pensée pour Daniel Lacroix, qui était responsable de ces deux aspects il y a deux ans. L’avantage numérique avait été refilé à Jean-Jacques Daigneault la saison dernière, et voilà que le groupe d’attaquants lui échappe. Cela dit, Michel Therrien a confirmé que l’arrivée de Muller était une addition et que ses adjoints restaient en poste, mais qu’ils verraient leurs responsabilités changer. « Personne ne part », a affirmé Therrien.

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