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OPINION SANTÉ PUBLIQUE

Agir sans tarder

Il faut appliquer les recommandations du Comité permanent de la santé sur le rayonnement électromagnétique

Un appel au premier ministre du Canada, Justin Trudeau, et à la ministre de la Santé, Jane Philpott.

Depuis 2015, la France encadre l’exposition de la population aux radiations générées par les technologies sans fil.

Sa loi relative à la sobriété, à la transparence, à l’information et à la concertation en matière d’exposition aux ondes électromagnétiques interdit notamment le wifi dans les garderies, limite son utilisation au primaire et exige des fabricants de téléphones cellulaires qu’ils fassent la promotion des dispositifs limitant l’exposition aux radiofréquences (RF). De plus, les entreprises françaises devront prendre à partir de janvier 2017 des mesures pour évaluer et prévenir les risques liés aux champs électromagnétiques (CEM), et l’Agence nationale de sécurité sanitaire (ANSES) publiera bientôt la version finale de son rapport sur l’hypersensibilité électromagnétique.

Chez nous, le 9 juillet 2014, l’ancien président de l’Association médicale canadienne, le Dr Hugh E. Scully, se joignait à 20 autres médecins pour demander à Santé Canada de mieux protéger la santé des Canadiens contre les effets néfastes des CEM et d’aider les médecins à évaluer et traiter les problèmes de santé reliés aux RF.

Une cinquantaine d’experts de partout dans le monde se joignirent à eux pour souligner que la norme d’exposition maximale de Santé Canada constituait une réelle menace pour la santé publique.

Dix mois plus tard, le 11 mai 2015, 190 scientifiques de 39 pays (9 du Canada), chercheurs en impacts biologiques et sanitaires des CEM non ionisants (reliés aux antennes, cellulaires, routeurs wifi, compteurs intelligents, etc.) cosignaient un Appel international destiné aux dirigeants de l’Organisation des Nations unies et de l’Organisation mondiale de la santé. Ils leur demandaient de promouvoir des mesures préventives afin de limiter les expositions aux CEM, et d’éduquer le public sur les risques sanitaires potentiels, notamment pour les enfants et les femmes enceintes.

En juin 2015, le Comité permanent de la santé de la Chambre des communes déposait son rapport intitulé Le rayonnement électromagnétique de radiofréquences et la santé des Canadiens. Après les dernières élections, ce rapport a de nouveau été présenté à la Chambre afin que le gouvernement Trudeau puisse se prononcer, ce mois-ci, sur les 12 recommandations du Comité.

Puis l’organisme Canadians for Safe Technology, C4ST, présidé par Frank Clegg, ancien chef de la direction de Microsoft Canada, a lancé une campagne demandant au gouvernement fédéral d’en appliquer sans tarder les recommandations.

Comme cet organisme, nous nous inquiétons du fait qu’en raison de la croissance et de la popularité sans précédent des technologies sans fil, jamais les Canadiens n’ont été exposés quotidiennement à des doses de radiations non ionisantes si élevées et couvrant une aussi large bande de fréquences électromagnétiques artificielles. Depuis l’introduction en masse du wifi dans les salles de classe, des syndicats comme la Fédération canadienne des enseignantes et des enseignants s’inquiètent de l’impact potentiellement néfaste des technologies sans fil sur la santé des enseignants et des élèves.

Compte tenu des liens suggérés dans la littérature scientifique entre le développement de la technologie sans fil et des problèmes de santé, il importe de valider ces résultats et mieux en comprendre la nature et les mécanismes. Vu les sérieuses conséquences de l’hypersensibilité électromagnétique pour les personnes qui en souffrent, on doit documenter rapidement sa prévalence et les impacts sanitaires de l’exposition aux CEM. Et parallèlement, il faut, comme en Ontario et en Nouvelle-Écosse, que des associations médicales et des cliniques de santé environnementale puissent partout au Canada diagnostiquer l’électrohypersensibilité et traiter convenablement les électrosensibles.

Vu l’exposition croissante et incontrôlée de la population aux radiations émises par les technologies sans fil, liée notamment à la prolifération des villes dites intelligentes, il est essentiel que les gouvernements soutiennent solidement la recherche et l’intervention sur ces enjeux.

Il est donc urgent que Santé Canada révise de fond en comble son Code de sécurité 6 qui sert de ligne directrice aux provinces, pour limiter l’exposition aux RF, et ne protège que des effets thermiques des expositions alors qu’il devrait tenir compte aussi des effets biologiques non thermiques à moyen et à long terme.

Si, comme le dit si bien le premier ministre Justin Trudeau, le Canada « est de retour » et si « nous sommes en 2016 », les recommandations du Comité permanent de la santé de la Chambre des communes doivent être appliquées sans tarder.

* Cosignataires : Pierre Auger, médecin du travail ; Claude Béland, ex-président du Mouvement Desjardins ; André Bélisle, président de l’AQLPA ; Gilles Bibeau, anthropologue ; André Bourassa, architecte, ex-président de l’OAQ ; Isabelle Brabant, sage-femme ; Claude Castonguay, ex-ministre de la Santé ; Danielle Dansereau, scénariste ; Claudia Faille, sage-femme, ex-présidente du RSFQ ; Paul Héroux, physicien ; June Irwin, dermatologue ; Louis Jacques, médecin ; Sabine Karsenti, comédienne ; Amir Khadir, médecin et député ; Joel Kreps, psychiatre ; Abby Lippman, épidémiologiste ; Jacqueline McClaran, médecin ; Jean-Louis Martel, ex-directeur du campus de Longueuil de l’Université de Sherbrooke ; Isabelle Miquelon, comédienne ; Serge Mongeau, auteur ; Robert Poupart, ex-recteur de l’Université Bishop’s ; Marie-Claire Séguin, auteure-compositeure-interprète ; Fernand Turcotte, cofondateur du département de médecine sociale et préventive de l’Université Laval ; Sylvie Van Brabant, cinéaste.

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