L’humanité de Diane Arbus

Le Musée des beaux-arts de Montréal propose dès ce jeudi une exposition consacrée à la photographe avant-gardiste américaine Diane Arbus : quelque 90 clichés en noir et blanc pris entre 1956 et 1971, principalement à New York. Des images d’une grande humanité, l’artiste ayant dressé en 15 ans un portrait sensible de la diversité new-yorkaise et de ses rites.

Cette exposition du travail de Diane Arbus (1923-1971) est d’un intérêt historique et artistique. Il s’agit seulement de la troisième exposition consacrée au Canada à la grande photographe américaine depuis son suicide, en 1971. Le déploiement nous vient du Musée des beaux-arts de l’Ontario (AGO) qui a acquis, en 2017, 522 épreuves à la gélatine argentique de Diane Arbus. Et qui a présenté cette exposition à Toronto durant la pandémie, grâce à un commissariat de Sophie Hackett, conservatrice de la photographie à l’AGO.

« Diane Arbus ne s’est pas limitée à photographier des personnes qui correspondaient aux normes sociales et esthétiques de son temps, au contraire. Elle a préféré se concentrer sur des personnes en marge de la société », a expliqué aux médias la conservatrice en chef du MBAM, Mary-Dailey Desmarais, lors d’une visite de presse. Diane Arbus a, en quelque sorte, rendu hommage à la diversité humaine, ce pluralisme que l’on honore de plus en plus, à juste titre, aujourd’hui. « Le côté psychologique des personnes photographiées est aussi très présent », a ajouté Anne Grace, conservatrice de l’art moderne au MBAM.

Organisée de façon chronologique, l’expo présente les photos réalisées avec un appareil 35 mm et un Rolleiflex donnant des tirages carrés (6 x 6). Les œuvres choisies par Sophie Hackett représentent des New-Yorkais aux personnalités souvent atypiques. Couple de retraités nudistes photographié dans son appartement, personnes handicapées, artistes de cirque, de danse ou de théâtre, femmes aux coiffes originales, culturistes, travestis, animaux de zoo, cadavres ou encore des personnalités telles que James Brown ou Jorge Luis Borges. Des images souvent audacieuses qui donnent une idée de la variété de la société new-yorkaise des années 1950, 1960 et 1970, une réalité que les médias de l’époque reflétaient peu.

On retrouve la photographie la plus célèbre de Diane Arbus, Vraies jumelles. Deux petites filles de 7 ans photographiées côte à côte. Une image dans laquelle on essaie de déceler les différences physiques entre Cathleen et Colleen Wade. Un cliché dont s’est inspiré Stanley Kubrick pour son film The Shining. Pour lire plus d’information sur cette photographie (que nous ne pouvons reproduire), se rendre au lien ci-dessous.

L’expo présente aussi, dans une vitrine, des pages du magazine populaire américain Esquire qui a publié les photographies de Diane Arbus, le 1er juillet 1960. Une première pour l’artiste. Un reportage à New York intitulé The Vertical Journey, avec une grande variété de thèmes, encore une fois. Les magazines auront permis à Diane Arbus de faire connaître son travail dans les années 1960 alors que les galeries d’art ne donnaient pas encore de visibilité aux photographes d’art.

« Je veux photographier ces cérémonies remarquables qui font notre présent, dans la mesure où, vivant ici et maintenant, nous avons tendance à y voir uniquement ce qui est fortuit, vide de sens et sans structure […] Ce qui est cérémoniel et curieux et banal deviendra légendaire », écrivait Diane Arbus, en 1962, dans une lettre adressée à la Fondation Guggenheim dans le but d’obtenir une bourse. Documentés avec humanité, le curieux et le banal auront effectivement forgé sa légende…

Diane Arbus – Photographies, 1956-1971, au Musée des beaux-arts de Montréal, jusqu’au 29 janvier

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